Aujourd'hui, tous les pays aspirent à devenir des "Startup Nations", un idéal qui séduit autant les grandes puissances que les économies émergentes. Au Maroc, c'est la stratégie Digital 2030 qui traduit cette ambition avec l'objectif affiché de créer 3.000 startups et 240.000 emplois dans le numérique. Une vision qui, malgré les efforts notables en matière d'incubation et de développement d'infrastructures d'accueil, suscite des critiques pour ses faiblesses structurelles et des objectifs jugés irréalistes. Le financement n'en demeure pas moins un défi qu'on peine encore à surmonter. En témoigne le dernier rapport de "Africa The Big Deal", qui montre que les startups marocaines restent à l'écart des grandes levées de fonds en Afrique. Depuis le début de 2025, aucune n'a dépassé le seuil des 100.000 dollars. Une contre-performance qui contraste fortement avec l'année précédente, lorsque les jeunes pousses marocaines avaient levé près de 95 millions de dollars, d'après une étude conjointe de l'Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P) et de Startup Researcher. Cette idylle demeure un fait isolé qui ne saurait cacher le fait que notre écosystème, bien qu'en évolution rapide, reste inégalitaire et fonctionne à deux vitesses. D'un côté, les privilégiés bénéficient d'un accès facilité au financement, y compris à l'international, grâce à leurs réseaux. De l'autre, une majorité de jeunes entreprises, souvent en phase d'amorçage ou de croissance initiale, peinent en silence à décrocher quelques miettes de liquidités. En 2024, trois startups ont ainsi capté à elles seules 65 % du capital total levé, un chiffre qui illustre la forte concentration du financement dans un environnement ultra-concurrentiel où la survie dépend étroitement de la résilience financière. Les startups pâtissent ainsi des mêmes problèmes que les PME menacées en permanence de faillite. A cela s'ajoute la faiblesse du financement local qui pousse même les "champions nationaux" à se financer à l'étranger malgré les nombreux mécanismes mis en place par l'Etat dans le cadre des partenariats public-privé tels que Innov Invest... Certes, l'intervention de l'Etat est indispensable mais elle ne peut suffire à elle seule pour libérer les énergies de l'ensemble de l'écosystème. Les financements bancaire et boursier sont tout aussi nécessaires. Certes, le secteur bancaire est de plus en plus impliqué dans l'économie numérique, mais sa répugnance au risque pèse encore lourd sur le potentiel de croissance de notre écosystème toujours embryonnaire. Les succès des pays qui ont réussi dans ce domaine est dû à leur capacité à ouvrir généreusement les vannes du financement au maximum de startups prometteuses, quel que soit le risque. Une recette toujours valable pour hisser notre écosystème sur le pavois.