En périphérie de la Capitale économique, les constructions illégales prolifèrent malgré les drones et les démolitions qui se suivent depuis des mois. Mais encore ? Les constructions illégales continuent de gagner du terrain, en périphérie de Casablanca. À Médiouna, Nouaceur ou encore Berrechid, de nouveaux bâtiments apparaissent régulièrement, souvent loin de tout cadre légal. L'allusion est ici faite aux hangars, maisons et locaux commerciaux construits sur des terrains agricoles ou dans des zones non-aménagées. Depuis le début de l'été, les autorités ont renforcé leur action contre l'urbanisation illégale en déployant des drones de surveillance. Ces appareils survolent les zones sensibles pour repérer rapidement les constructions non autorisées. Les propriétaires identifiés sont alors invités à démolir ou à régulariser leurs biens, faute de quoi les services municipaux procèdent eux-mêmes à la démolition Sur le terrain, les opérations s'enchaînent. Mais les infractions aussi. Car les contrevenants ne manquent pas d'imagination. «Dans certains cas, les toits sont recouverts de gazon synthétique pour passer inaperçus depuis les airs», témoigne Naoufal, agent immobilier. «Ailleurs, les bâtiments sont dissimulés derrière des installations agricoles, à peine visibles depuis les images captées par les drones», continue-t-il. Youssef, la trentaine, vit à Lahraouiyine. Il a vu plusieurs bâtiments tomber sous les coups de pelleteuse. «Ce sont parfois des familles qui ont tout mis dans un terrain, pensant pouvoir construire avant que ça se voie. D'autres, c'est du pur investissement, à la chaîne. Moi, je ne suis pas contre l'ordre, mais il faut aussi comprendre pourquoi les gens prennent ces risques». Ce que Youssef évoque, c'est le fond du problème. Derrière les murs illégaux, il y a une réalité sociale. Le besoin de logement, l'accès difficile au foncier, les démarches longues pour obtenir un permis, la pression de la spéculation. Autant de raisons qui poussent certains à construire sans attendre. Face à cela, la réponse des autorités s'organise. Depuis plusieurs mois, les agents d'autorité (caïds, pachas, moqaddems) sont redéployés sur le terrain pour renforcer les contrôles. Des sanctions ont été prises à l'encontre de certains fonctionnaires accusés de laxisme, voire de complicité. Des décisions qui témoignent d'une volonté claire : mettre fin à l'impunité et restaurer une forme d'ordre urbanistique. La municipalité et la région, elles aussi, se mobilisent, car les équipes techniques sont à l'œuvre, les services d'urbanisme renforcés, et les concertations avec les communes se multiplient. Mais les élus locaux ne sont pas toujours sur la même longueur d'onde. Dans certaines zones, des retards d'exécution persistent, parfois liés à des désaccords ou à un manque de moyens. Du côté de l'Etat, la stratégie repose sur une coordination resserrée entre les différents niveaux d'administration. L'enjeu est double : enrayer l'expansion anarchique tout en préparant le territoire à accueillir les grands projets à venir, notamment ceux liés à la Coupe du Monde 2030. Des solutions viables Au-delà des démolitions et des rapports, une question reste inévitable : comment construire la ville autrement ? Comment offrir aux habitants des solutions viables, encadrées et accessibles ? Car si les drones peuvent voir ce qui se construit illégalement, ils ne voient pas toujours ce qui manque : des logements abordables, des terrains régularisés et des procédures simplifiées. Casablanca, dans sa croissance effervescente, se trouve à un carrefour. Réprimer l'anarchie ne suffirait peut-être pas. Aussi, faudrait-il penser l'urbanisation dans sa globalité, avec ses contraintes, ses urgences et ses visages. Ceux de ceux qui construisent, parfois dans l'ombre, pour ne pas être oubliés.