Le Maroc, sous la conduite éclairée de S.M. le Roi, est un modèle reconnu en matière d'ouverture et de coopération sécuritaires (Pdt d'INTERPOL)    Parlements africains : La « Déclaration de Laâyoune »    Face aux rumeurs, Barada réaffirme son plein respect de la loi    Réforme électorale : les féministes dénoncent une parité au rabais    Marrakech: Signature d'un mémorandum d'accord entre le Maroc et l'Ethiopie en matière de lutte contre les différentes formes de crimes violents et de crime organisé (DGSN)    Bouaida: Sahara marocain: la résolution 2797 du Conseil de Sécurité marque un "tournant historique"    Séisme d'Al Haouz : plus de 53.000 habitations reconstruites    El Mansouri détaille les avancées et les défis du développement rural    Le Maroc a connu une transformation industrielle profonde ces deux dernières décennies    Offshoring. Le Maroc lance son Plan 2030    Marrakech accueillera le XIXe Congrès Mondial de l'Eau en décembre 2025    L'ambassadeur du Maroc au Royaume-Uni élu vice-président de la 34eme session de l'assemblée de l'OMI    Tourisme : plus de 900 projets clés en main prêts à l'investissement dans 60 provinces    La Bourse de Casablanca démarre dans le vert    Ukraine : Un « futur accord » de paix devra maintenir son entière « souveraineté »    Tebboune absent du sommet du G20 : un problème de santé derrière le retrait    Suspension de vols vers le Venezuela après un avertissement sécuritaire américain    Cas de grippe aviaire: extension des mesures de prévention à toute la Suisse    Brésil : l'ex-président Bolsonaro va rester en détention provisoire    Süper Lig: En-Nesyri signe une belle performance avec Fenerbahçe contre Rizespor    Hakimi se sent "beaucoup mieux" et veut "disputer la CAN dans les meilleures conditions"    Tanger : Le tiktokeur "Moulinex" placé en détention dans l'affaire Benchakroun    Berrada dévoile un plan ambitieux pour moderniser l'école et réduire la surcharge des classes    Narcotrafic : Aux origines de la déferlante de cocaïne sur le Royaume    Décès de la légende du reggae Jimmy Cliff    L'OPM réinvente Shéhérazade : un voyage symphonique entre Orient et Occident    Deux films marocains au Red Sea International Film Festival    Marche Verte et fête de l'indépendance : Vif succès du Gala National organisé par le Syndicat Professionnel Marocain des Créateurs de la Chanson à Tunis    Festival Miss Citrouille des Doukkala : Zahira Talaï sacrée reine de beauté !    Décès maternels : le ministère lance une plateforme nationale de surveillance    Washington : levée des droits de douane sur certains produits agricoles brésiliens    Lancement de la 1ère Foire du Livre en Espagnol de Rabat    Gouvernance minière africaine : Signature d'un accord entre le Maroc et l'AMSG    Achraf Hakimi donne de ses nouvelles : objectif CAN, coûte que coûte    "santa claus, le lutin et le bonhomme de neige" : Un spectacle féerique pour toute la famille au cœur du pôle nord !    Centres de diagnostic d'Akdital : un projet arrêté, une réflexion nationale qui s'impose    Programme VIA 2025: de jeunes ambassadeurs de la sécurité routière à l'honneur    Botola D2 / J9 : Le MCO coleader, le RBM lanterne rouge    CDM (f) Futsal / J2 : Les Lionnes face au pays hôte ce lundi    Coupe Arabe FIFA 25 / Barrages : les 3e et 4e adversaires du Maroc identifiés ce mercredi    Younes Sekkouri : "Nous voulons plus d'apprentissage dans les entreprises"    Sahara : Boualem Sansal, le bouc émissaire de la croisade vindicative de l'Algérie contre la France (Confessions)    Nigeria : 50 élèves enlevés d'une école catholique échappent à leurs ravisseurs    UEFA Foundation for Children: Tibu Africa officiellement sélectionnée    Prévisions météorologiques pour lundi 24 novembre 2025    Archéologie : L'arganier, un savoir-faire né dans la région d'Essaouira depuis plus de 150 000 ans    Doha : le Maroc doublement primé lors de l'événement Fashion Trust Arabia    Rabat : création du Forum Marocain des Sciences de l'Education    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Afrique: Boko Haram: Vers un Etat islamique au Bassin du Lac Tchad
Publié dans L'opinion le 16 - 01 - 2015

Si rien n'est fait maintenant, le bassin du Lac Tchad va devenir, sans délai, un Etat Islamique Boko Haram. Nous sommes à l'aube d'une autre catastrophe humanitaire, après celle de l'assèchement du lac, sans que cela n'attire suffisamment l'attention du monde entier, communauté internationale, instances régionales et sous-régionales comprises. Les récentes percées de Boko Haram et le désordre en Libye vont continuer à nourrir le terrorisme dans cette région.
Le bassin est d'une superficie de 967.000 km2 (sans la Libye). Il comprend trois régions du Cameroun, deux régions du Niger, six (Etats fédérés) du Nigeria, trois régions de la RCA et l'ensemble du territoire du Tchad, avec une population estimée à 30 millions. Les habitants du bassin du Lac Tchad sont issus de plusieurs groupes ethniques et tribaux (Kanouris, Mobbers, Boudoumas, Haoussas, Kanembous, Kotokos, Arabes shewa, Haddas, Kouris, Fulanis et Mangas). Ils sont pêcheurs, éleveurs, agriculteurs ou commerçants.
Depuis plus de trois ans, les parties camerounaise et nigériane du bassin sont touchées, de plein fouet, par le terrorisme de la secte, avec comme conséquences de lourdes pertes en vies humaines, des enlèvements, des destructions de biens privés et publics. Boko Haram détient toujours plus de 200 jeunes filles kidnappées en avril 2014 dans leur lycée de Chibok dans l'État de Borno. Depuis cet événement qui a marqué les esprits, et malgré l'apparente gesticulation mondiale, le groupe islamiste continue d'enlever ou de tuer régulièrement des milliers d'hommes, femmes et enfants. Même si les statistiques ne sont pas disponibles, à ce jour, le conflit de Boko Haram et les forces de sécurité camerounaise et nigériane ont fait plus de 20 000 morts et 1 500 000 déplacés.
Beaucoup dépeignent cette situation comme le résultat d'une crise politique interne au Nigeria, depuis le troisième mandat raté du Président Obasanjo, qui a été forcé par le Sénat en 2006 de quitter le pouvoir au profit de feu le Président Yaradu'a, nordiste, malade et décédé en 2010, avec comme vice-président le discret homme politique sudiste de l'Etat de Bayelsa, Goodluck Ebele Jonathan, qui préside aujourd'hui aux destinées du pays. Mais cela n'explique pas comment un petit groupe de malfrats est devenu une puissante force qui défie les armées organisées, redoutables et républicaines, comme celle du Cameroun. Pour comprendre la dynamique de cette crise, nous devons examiner trois causes profondes.
La première cause est l'héritage de la colonisation. Le Cameroun et le Nigeria ont accédé à l'indépendance en 1960 et sont devenus la même année membres de l'ONU. En février 1961, la population du Cameroun septentrional a décidé, à une majorité importante, d'accéder à l'indépendance, en s'unissant à la Fédération de Nigeria, en application de la résolution 1608 (XV) de l'Assemblée générale des Nations Unies. Aujourd'hui, presque chaque nigérian nordiste a une famille de l'autre côté au Cameroun et vis-versa. La porosité de nos frontières ne permet pas un contrôle strict sur le transfert des armes et l'utilisation du Cameroun comme base logistique par les djihadistes Boko Haram.
La deuxième cause est la mauvaise gouvernance politique et socio-économique. La situation socio-économique de la plupart des pays de la région se trouve, d'une manière générale, fortement détériorée, au regard des indicateurs pessimistes des secteurs sociaux de base. Depuis moins d'un quart de siècle, de nouvelles ressources économiques (agricoles, minières, industrielles) y créent une nouvelle différenciation de l'espace, une grande mobilité des populations et l'apparition de conflits intercommunautaires. Or, le bassin du lac Tchad apparaît comme une zone d'échange privilégiée entre Afrique du Nord et Afrique centrale.
Les pays du bassin font face à des dissensions internes depuis des années, exacerbées par un manque de consensus politiques. Au Nigeria, dès l'annonce des intentions du Président Obasanjo de réformer la Constitution afin de briguer un troisième mandat, le vice-président nordiste Atiku Abubakar, futur candidat à l'élection présidentielle de 2007, a pris le flambeau pour mener une campagne contre cet amendement. Atiku était ainsi soutenu par des politiciens nordistes majoritairement musulmans, tel que l'ex-général et ancien président Muhammadu Buhari, principal challenger du Président Goodluck à l'élection présidentielle de février 2015. Cependant, le départ d'Obasanjo et la santé fragile de Yaradu'a n'ont pas aidé le pays à se maintenir dans cette dynamique de développement initiée par Obasanjo. Le Cameroun traverse une période de transition politique assez compliquée, amplifiée par les arrestations des grands dignitaires du pays dans le cadre de la lutte contre la corruption.
Enfin, la troisième cause provient des faiblesses de l'intégration sous-régionale. Depuis l'avènement des indépendances, le bassin a toujours connu une situation d'instabilité au plan socio-économique. Cette situation a conduit les pouvoirs publics à chercher d'abord à consolider leur autorité au plan interne avant de s'engager dans d'autres entreprises, notamment l'intégration. Cet état de choses a renforcé un micro nationalisme latent avec, pour conséquence, une prédominance des intérêts nationaux très étroits et souvent à court terme, sur l'esprit communautaire. C'est l'une des raisons pour lesquelles la Commission du Bassin du Lac Tchad (CBLT) peine à mettre en place un mécanisme communautaire de prévention et la résolution des conflits.
Le 17 mai 2014, les chefs d'Etat (Nigeria, Cameroun, Benin, Tchad, Niger) et le président François Hollande se sont réunis à Paris et ont adopté un plan d'action régional pour lutter contre la secte. Les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l'Union européenne y étaient également représentés. Le plan adopté par le sommet prévoit la coordination du renseignement, l'échange d'informations, le pilotage central des moyens, la surveillance des frontières, une présence militaire autour du lac Tchad et une capacité d'intervention en cas de danger.
Le 7 octobre 2014, un sommet régional de chefs d'Etat africains pour lutter contre la secte a été organisé à Niamey autour du président nigérien Mahamadou Issoufou, et ses homologues du Nigeria, du Tchad, du Bénin et le ministre de la défense du Cameroun. Comme d'habitude en Afrique centrale, la date butoir du 20 novembre 2014 a été dépassée sans que la coordination des forces mixtes et la finalisation des contingents soient effectives, éléments essentiels de la stratégie de lutte commune élaborée par des états-majors des différents pays du bassin.
Sur le terrain, la secte a multiplié les menaces verbales, les attaques meurtrières sur les civils, les institutions publiques, les extorsions d'argent aux hommes d'affaires et les prises des camps militaires, mettant en doute l'efficacité des actions entreprises pour contenir le terrorisme.
Les stratégies annoncées ont deux défauts majeurs : a) la non prise en compte des organisations régionales comme la CEMAC, la CEEAC, ou l'UA mais surtout la CBLT, dont l'une des missions est la préservation de la paix et la sécurité dans le bassin ; b) la non-implication officielle des organisations islamiques comme l'Organisation de la coopération islamique, capables d'enrichir les stratégies adoptées avec des discussions avec les musulmans membres de la secte.
La non-traduction en action de la volonté politique des Etats membres, la prédominance des intérêts nationaux sur l'esprit communautaire, la duplicité et les suspicions, une très grande dépendance de certains dirigeants vis à vis de l'extérieur, des infrastructures inadéquates, surtout dans le domaine de la communication, le manque de confiance pour certaines armées dans la gestion des informations stratégiques collectées par les drones, ont contribué à amplifier cette crise.
Le Conseil de Sécurité de l'ONU doit rapidement voter une résolution pour le déploiement dans cette région d'un contingent international de prévention et maintien de la paix, qui collaborera étroitement avec la Minusca en RCA et l'opération Barkhane. Le caractère global de la menace d'un éventuel Etat islamique sur le bassin du Lac Tchad, que représentent les djihadistes de Boko Haram et autres terroristes, a pour objectif, au-delà du bassin " d'établir leur pouvoir sur la bande sahélienne de l'Atlantique à l'Océan Indien et d'y installer leur régime obscurantiste impitoyable. " Les erreurs du passé en Irak, en Afghanistan, en Libye, en Syrie ou au Mali, doivent servir de leçons à la communauté internationale.
Par Alain Nkoyock, Docteur en Management, Fonctionnaire international auprès des Nations Unies


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.