Je pense que la paix a, elle aussi, une âme quand elle quitte le corps, son support car elle est toujours omniprésente sur terre malgré la barbarie qui secoue le monde. Je sens sa présence chaque fois que je pousse les bras de mon vieux portail, elle m'ouvre les bras, la paix, généreusement pour faire baisser les pulsations de la solitude. Mon vieux chien Koukous m'attend toujours derrière le vieux portail aux reins fatigués comme les miens à la même heure car il sait que je reviens toujours à la maison à la même heure comme le soleil et la lune dans leurs rotations perpétuelles. Le chien s'agite comme un fou quand il sent de loin la sueur de mon corps et les relents de l'alcool qui m'accompagnent dans les rouages du quotidien, il sautille, le brave chien, pour me souhaiter la bienvenue, il s'accroche aux bras dénudés de la vigne vierge qui plonge ses dents dans les fissures de la muraille de mon vieux jardin. Les fleurs insensibles au vent et aux larmes de la rosée de la nuit couvent leurs secrets au fond des pots même si leurs pétales fatiguées tombent sur le parvis de la vie. Le vieil oranger me garde encore ses pépites d'or malgré la sève qui bouscule son vieux corps, les oranges que je presse le matin pour redonner à mon vieux corps un peu de vigueur. Il nous arrive d'être heureux dans la vie, d'oublier la mort quand les corps se décomposent au fond de la tombe quand les âmes agitent leurs girouettes au dessus des cimetières en attendant le jour de la résurrection. (Kénitra, Mars 2016)