Dès l'entrée dans la salle du complexe culturel Mahdi Benbarka à Rabat, les spectateurs aperçoivent dans un coin sombre, sur la scène, "une détenue palestinienne" les mains menottées, les yeux bandés, le corps recroquevillé, qui, de temps à autre, émet des gémissements captivant toutes les émotions. Par Leila Chafii L'acte se déroule alors même que les spectateurs affluent encore, pour s'enchaîner, par la suite, avec l'entrée en scène des bourreaux israéliens qui retirent la prisonnière et l'entraînent derrière le paravent. Des bruits de grincement de métal et des cris de la femme envahissent la salle, entrecoupés par les voix des bourreaux, avant que les soldats ne ramènent la détenue sur scène où elle subira l'interrogatoire. La détenue "héroïne" n'était que l'écrivain, actrice et réalisatrice palestinienne Valentina Abou Aksa, qui a passé une année tout entière en compagnie d'anciennes prisonnières politiques palestiniennes, dans l'objectif de réaliser cette pièce, intitulée "Je suis libre", et dans laquelle elle campe le rôle principal aux cotés de Hussein Nakhla qui incarne le personnage du détective israélien. "Ma décision de faire du travail de terrain la quintessence de ce projet, m'a poussé à me mettre dans la peaux des femmes qui ont tant souffert dans les geôles de l'occupation", explique Valentina dans sa présentation de la pièce. Au sujet du choix de la cause de la prisonnière palestinienne, elle a considéré qu'"il est naturel de penser à la femme tant qu'on est femme", ajoutant que nombreux sont les cas de détenues palestiniennes qui ont enduré des tortures plus cruelles que celles réservées aux hommes. S'agissant de la situation des prisonniers palestiniens en général, Valentina a fait état de quelque 7.000 prisonniers, dont 40 femmes et 1.500 personnes en détention sans aucune accusation ou procès, ainsi que des centaines de mineurs. Pour Hussein Nakhla, la pièce a pour objectif de faire découvrir au public la réalité et la cruauté des sévisses infligés aux détenues palestiniennes par les bourreaux des services de renseignement israéliens. La cause des prisonnières a été longtemps passée sous silence, et la pièce se veut de mette en exergue l'apport et le rôle de la femme palestinienne dans l'épopée de la lutte contre l'occupation, a-t-il soutenu. Valentina Abou Aksa a entamé sa carrière théâtrale en 1987 au sein de la troupe "Al Hakawati" avec laquelle elle a entrepris une série de tournées dans plusieurs pays européens. Hussein Nakhla s'est quant à lui lancé dans le théâtre en 1979 en tant qu'acteur et a participé à de nombreuses œuvres artistiques à l'échelon national et international.