En 2025, le Maroc accélère la structuration du cannabis légal. L'Agence nationale de régulation des activités liées au cannabis (ANRAC) a annulé plus de 90 licences pour non-respect des règles, marquant un tournant dans la régulation du secteur. Objectif : crédibiliser la filière, soutenir les agriculteurs et attirer des investissements dans un cadre transparent, durable et rigoureux. Depuis l'adoption de la loi 13-21 relative à l'usage légal du cannabis, le Maroc a entamé une vaste réforme pour structurer un secteur longtemps associé à l'informel et à l'économie parallèle. En 2025, cette dynamique de régulation s'est accélérée, avec des chiffres en nette progression, mais également des mesures fermes prises par l'ANRAC, notamment en matière de retrait d'autorisations. Une nouvelle phase semble s'ouvrir, marquée par un contrôle accru, des exigences de conformité renforcées et une volonté affichée de crédibiliser davantage la filière. Plus de 90 licences ont été annulées en raison du non-respect des obligations juridiques et réglementaires. Ces retraits, précédés par des avertissements formels, concernent aussi bien des investisseurs que des coopératives agricoles qui n'ont pas donné suite à leurs engagements contractuels. L'ANRAC, consciente des enjeux en matière de crédibilité et d'attractivité du secteur, entend ainsi mettre fin à une logique de spéculation ou d'inertie qui pourrait nuire à l'ensemble de la filière naissante. Ce tour de vis réglementaire n'est toutefois pas isolé. Il s'inscrit dans une stratégie plus large de structuration encadrée du cannabis légal. Parmi les initiatives les plus marquantes figure la préparation, en collaboration avec l'Ordre National des Médecins, d'un modèle unifié d'ordonnances médicales pour l'usage thérapeutique du cannabis. Huit spécialités médicales sont concernées, dont six sont déjà prêtes à être validées. Ce projet vise à rassurer les professionnels de santé, les patients et les autorités sanitaires, tout en érigeant des garde-fous scientifiques contre les usages détournés. Lire aussi : Le Maroc fixe les règles de la culture réglementée du cannabis à usage médical Dans les zones concernées par la culture du cannabis, l'année 2024 a également été marquée par une deuxième opération de culture légale de la variété locale « Beldia ». Ce lancement a cependant connu des retards à cause des conditions climatiques exceptionnelles enregistrées en début d'année. De fortes pluies et chutes de neige ont poussé les agriculteurs à retarder leurs semis jusqu'au mois d'avril. Malgré cela, les autorités ont su adapter le calendrier, illustrant une certaine flexibilité face aux aléas du terrain. Les chiffres de 2024 témoignent d'une montée en puissance rapide de la filière. À ce jour, 3 029 autorisations ont été délivrées, contre seulement 721 en 2023. La majorité de ces autorisations, soit 2 837, concernent la culture et la production, et ont été accordées à 2 659 agriculteurs. Par ailleurs, 192 autorisations ont été octroyées à 98 opérateurs pour des activités telles que la transformation, la commercialisation, l'exportation ou encore l'importation et le transport de semences. Cette dynamique se traduit également par des résultats agronomiques significatifs. Sur une superficie totale de 2 169 hectares, 1 701 hectares ont été cultivés avec la variété locale Beldia, certifiée et encadrée par l'Institut National de la Recherche Agronomique (INRA). Cette variété a produit en moyenne 17 quintaux par hectare, tandis que les variétés importées, sur 468 hectares, ont affiché une productivité moyenne de 28 quintaux par hectare. Au total, la production légale a atteint 4 082 tonnes de cannabis, avec un rendement moyen de 20 quintaux à l'hectare. L'ANRAC a également procédé à la certification de 7,6 millions de graines importées sur la base de 30 licences d'importation, tout en autorisant 1 717 quintaux de graines Beldia pour 112 coopératives. Ces efforts témoignent de la volonté de garantir la traçabilité et la qualité génétique des semences utilisées. Pour 2025, l'ANRAC affiche des objectifs clairs : renforcer la structuration du secteur, assurer un meilleur accompagnement des petits agriculteurs et faciliter l'accès aux marchés, tant au niveau national qu'international. L'accent sera mis sur la formation, sur la mobilisation de financements, ainsi que sur la valorisation des produits dérivés du cannabis, dans une optique de développement durable des territoires concernés. Le processus de régulation du cannabis au Maroc entre ainsi dans une nouvelle ère. L'Etat entend instaurer un modèle économique viable, où les petits agriculteurs trouvent leur place et où les opérateurs privés peuvent investir dans un cadre sécurisé. Le retrait de plus de 90 licences n'est pas un simple acte administratif, mais un signal fort adressé à tous les acteurs de la chaîne : l'ère de l'approximation est révolue. Le Maroc veut faire du cannabis légal un levier de développement rural, une source de revenus formels et un vecteur de notoriété internationale pour son agriculture. Cette ambition ne saurait tolérer les demi-mesures.