Le ton est abrupt, presque brutal : 30 % de droits de douane sur tous les produits européens importés aux Etats-Unis, à compter du 1er août 2025. C'est la dernière salve économique lancée par Donald Trump, revenu à la Maison-Blanche avec une énergie protectionniste décuplée. Dans son style inimitable, le président à nouveau promet de « corriger les injustices commerciales » que l'Amérique aurait subies de la part de l'Union européenne. Le secteur automobile, l'agroalimentaire, les produits de luxe, l'équipement industriel : tout est dans le viseur. Et le signal est clair : Washington veut remodeler ses relations commerciales à ses conditions. À Bruxelles, la réaction ne s'est pas fait attendre. Les vingt-sept Etats membres, réunis en urgence, ont unanimement dénoncé une mesure « absolument inacceptable », selon les mots du ministre danois des Affaires étrangères Lars Lokke Rasmussen. L'Union européenne, consciente de la gravité de la menace, ne cède cependant ni à l'émotion ni à la précipitation. Derrière les portes de la Commission européenne, c'est un plan de riposte méthodique qui se met en place. L'objectif est de préserver les intérêts économiques du bloc sans rompre complètement le dialogue diplomatique. La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a affirmé que l'Europe ne resterait pas passive face à ce qu'elle considère comme une attaque directe contre ses exportateurs. Tout en soulignant l'importance de la relation transatlantique, elle n'a laissé planer aucun doute sur la détermination de l'Union à prendre des mesures de rétorsion si aucune solution équilibrée n'était trouvée. Déjà, une première liste de produits américains susceptibles d'être frappés par des droits de douane équivalents a été élaborée. Elle couvre des secteurs sensibles et symboliques pour l'économie américaine, tels que l'aéronautique, l'agroalimentaire, l'automobile et certains biens de consommation emblématiques. Lire aussi : Trump menace d'imposer des tarifs douaniers de 30% à l'UE et au Mexique Les chiffres avancés parlent d'eux-mêmes. Selon les documents internes à la Commission, les contre-mesures européennes pourraient atteindre une valeur totale de 72 à 84 milliards d'euros. Ces mesures ne seraient pas seulement défensives ; elles visent aussi à exercer une pression sur les puissants groupes industriels américains afin qu'ils fassent entendre leur voix à Washington. Cette stratégie s'inspire d'une logique déjà éprouvée lors des précédentes tensions commerciales, notamment en 2018, lorsque Trump avait imposé des taxes sur l'acier et l'aluminium. Cependant, le contexte de 2025 est bien différent de celui de la décennie précédente. L'économie européenne sort à peine de plusieurs années de perturbations, entre pandémie, conflit en Ukraine, inflation énergétique et désindustrialisation rampante. L'industrie allemande, moteur historique de l'export européen, est particulièrement exposée. Une taxation brutale de ses voitures et machines sur le marché américain serait un coup dur pour des groupes déjà fragilisés. De son côté, la France insiste sur la nécessité d'une réponse collective, solidaire et rapide, sans pour autant brûler les ponts de la négociation. À Washington, la rhétorique de Donald Trump reste fidèle à elle-même : offensive, nationaliste, mais toujours calculée. Il n'exclut pas la possibilité d'un accord, mais il place la barre très haut. En exigeant une révision complète des conditions d'échange avec l'Europe, il cherche à imposer une vision unilatérale des relations commerciales, fondée sur la pression et le rapport de force. Pour l'heure, une délégation européenne est attendue dans la capitale américaine d'ici la fin juillet. Ces discussions seront décisives. Si aucun compromis n'est trouvé, les sanctions entreront en vigueur début août et déclencheront très probablement une guerre commerciale ouverte entre les deux puissances économiques. Pour des pays comme le Maroc, l'enjeu est moins immédiat mais non moins stratégique. Une escalade tarifaire pourrait bouleverser les flux commerciaux mondiaux et entraîner une reconfiguration des chaînes de valeur. Le Royaume pourrait alors se positionner comme une plateforme de substitution dans certaines filières industrielles. Mais à l'inverse, un ralentissement global du commerce transatlantique affaiblirait aussi la demande externe, impactant potentiellement nos exportations vers l'Europe, principal partenaire commercial du Maroc.