Le bras de fer commercial entre les Etats-Unis et l'Union européenne s'intensifie et pourrait bien devenir un test de résilience pour la cohésion politique du bloc européen. Selon une récente analyse de la Fondation pour la science et la politique (SWP), soutenue par plusieurs études relayées dans les médias allemands, ce conflit commercial dépasse le simple désaccord tarifaire : il menace de fracturer durablement l'unité stratégique de l'UE. Depuis avril, Washington impose des droits de douane de 10 % sur la quasi-totalité des importations européennes, en plus de surtaxes ciblées sur l'acier, l'aluminium et les véhicules. Ces mesures, perçues comme une réponse à ce que les Etats-Unis qualifient de pratiques commerciales « déséquilibrées », touchent inégalement les Etats membres. Des puissances exportatrices comme l'Allemagne, l'Italie ou l'Irlande subissent le choc de plein fouet. Cette asymétrie alimente les tensions internes et fait craindre aux experts une réaction désordonnée : certains pays pourraient être tentés de négocier directement avec Washington, rompant avec la ligne commune de l'UE et affaiblissant ainsi son levier collectif. Face à l'urgence, la Commission européenne cherche à conclure un accord de principe avec les Etats-Unis avant le 1er août, nouvelle date butoir fixée par Washington après un premier report. Selon un porte-parole européen, « des consultations intensives avec les Etats membres et les secteurs industriels » ont permis d'élaborer une approche relativement unifiée, pour l'instant. Un compromis envisagé consisterait à accepter un tarif d'entrée de 10 % en échange de quotas d'importation exonérés de droits de douane. Mais les analystes préviennent qu'un tel accord ne serait qu'un « cessez-le-feu économique« , précaire par nature et vulnérable aux retournements politiques de part et d'autre de l'Atlantique. LIRE AUSSI : Donald Trump impose une taxe de 30 % à l'Algérie et menace de représailles tarifaires Au-delà de l'économie, les tensions actuelles reflètent un glissement inquiétant : les relations transatlantiques prennent un tour de plus en plus géopolitique. La politique commerciale américaine, devenue plus transactionnelle et imprévisible, alimente la méfiance. L'Europe, qui peine à parler d'une seule voix face à cette nouvelle donne, se retrouve tiraillée entre protection de ses intérêts stratégiques et volonté de maintenir une alliance historique. Sans accord, le scénario du pire reste sur la table : extension des sanctions douanières, rétorsions européennes sur les services numériques ou les droits de propriété intellectuelle, voire une rupture prolongée de la coopération économique. Ce différend, bien plus qu'un simple litige commercial, pourrait servir de révélateur de l'état de santé politique de l'Union. L'UE saura-t-elle rester soudée face à un partenaire devenu plus exigeant, voire plus imprévisible ? Ou assistera-t-on à une fragmentation progressive, chaque Etat poursuivant ses intérêts dans une logique bilatérale ? La réponse pourrait se jouer dans les toutes prochaines semaines. Mais une chose est sûre : au-delà des chiffres et des taxes, c'est la crédibilité politique de l'Europe sur la scène mondiale qui est en jeu.