Dans un climat de tension croissante entre les priorités budgétaires américaines et les ambitions internationales de Washington, le Sénat américain a adopté jeudi un plan de coupes budgétaires d'un montant de 9 milliards de dollars, une décision impulsée par la Maison Blanche de Donald Trump et appuyée par la controversée Commission Doge, liée à l'influent Elon Musk. Le texte, déjà approuvé en juin par la Chambre des représentants, devra y être revoté dans sa version modifiée avant vendredi soir, pour respecter les délais constitutionnels. L'aide internationale sacrifiée sur l'autel du budget Ce texte vise essentiellement à annuler des dépenses déjà votées par le Congrès, notamment près de 8 milliards de dollars alloués à l'agence USAID, fer de lance de l'aide américaine au développement à l'étranger. Les coupes touchent également les médias publics NPR et PBS, qui pourraient perdre jusqu'à 1,1 milliard de dollars de financement fédéral. Une première version du projet prévoyait aussi de couper 400 millions de dollars destinés au programme mondial Pepfar de lutte contre le sida, un programme phare lancé par George W. Bush et qui a sauvé des millions de vies, notamment en Afrique. Sous la pression de sénateurs modérés, cette disposition a finalement été retirée. "Quand vous avez une dette de 36.000 milliards de dollars, on se doit de faire quelque chose", a justifié John Thune, chef de la majorité républicaine au Sénat. LIRE AUSSI : Trump relance l'épreuve de force commerciale, l'UE affûte sa riposte "C'est conforme aux engagements du président Trump de réduire les dépenses", a ajouté Lindsey Graham. Tout en affirmant son attachement au soft power, le sénateur interventionniste de Caroline du Sud a critiqué "des programmes libéraux sans lien clair avec leur objectif initial". Du côté démocrate, c'est l'indignation. Corey Booker, sénateur du New Jersey, a qualifié ce vote de "terrible mise à mal des idéaux constitutionnels" et d'attaque déguisée contre la diplomatie humanitaire des Etats-Unis. Une doctrine trumpienne assumée Donald Trump, lui, s'est félicité publiquement d'avoir « récupéré 9 milliards de dollars destinés à une aide étrangère gaspilleuse« , dénonçant une fois encore NPR et PBS comme des "outils anti-républicains". Au-delà du symbole budgétaire, cette coupe ne représente qu'un dixième de 1 % du budget fédéral, selon les sénateurs, c'est une inflexion stratégique de la politique américaine qui se dessine : recentrage isolationniste, fin de la bienveillance diplomatique, et offensive contre les piliers libéraux de la société civile. Ce vote pourrait n'être que le premier d'une série, dans ce que les républicains appellent les « paquets Doge », une initiative de réduction des dépenses guidée par la commission Doge, entité technocratique non élue mais influente, créée à la demande d'Elon Musk et soutenue par l'administration Trump. Le Congrès américain a le dernier mot sur les fonds publics. Mais Donald Trump, lui, semble avoir repris la plume. Et c'est une toute autre histoire qu'il entend écrire, à coups de dollars supprimés et d'institutions ébranlées.