Le lundi 8 décembre 2025, Casablanca a franchi une étape importante en rejoignant l'initiative mondiale « Villes sûres et espaces publics sûrs pour les femmes et les filles », pilotée par ONU Femmes depuis 2010. L'adhésion a été formalisée par la maire, Nabila Rmili, en présence de Myriem Ouchen Noussairi, représentante de l'organisme onusien au Maroc. Cette démarche traduit la volonté de la ville de s'attaquer de manière systémique au harcèlement et aux violences que subissent les femmes et les filles dans l'espace public. Ce nouvel engagement s'inscrit dans la continuité d'une dynamique déjà amorcée. En mai 2024, Casablanca lançait un premier projet dédié à la sécurité des marchandes ambulantes et des vendeuses de rue, en partenariat avec les arrondissements de Hay Mohammadi et de Maârif. L'objectif était alors de renforcer la sécurité et les conditions de travail de milliers de femmes dont la présence dans l'espace public reste particulièrement exposée. Par ailleurs, les chiffres rappellent l'ampleur du défi. Selon l'enquête nationale du Haut-Commissariat au Plan menée en 2019, plus de sept femmes sur dix dans la région Casablanca-Settat déclarent avoir subi une forme de violence. Ces données trouvent un écho dans les témoignages recueillis par ONU Femmes lors du lancement du programme en 2024. Hayat, vendeuse ambulante, décrivait ainsi le climat quotidien auquel elle fait face : « Le chauffeur de taxi me pose un tas de questions : pourquoi je sors à cette heure-ci, où je vais… et cela finit souvent par des comportements inattendus et inappropriés. » Des scènes ordinaires, révélatrices d'une insécurité diffuse qui traverse tous les segments de l'espace urbain. Casablanca n'ouvre pas un chemin inédit, mais rejoint une dynamique déjà engagée dans plusieurs villes marocaines, notamment Marrakech depuis 2012, Rabat depuis 2015, ainsi que Fès et Agadir. Son adhésion renforce néanmoins la portée nationale de ce mouvement en y intégrant la plus grande métropole du pays, dont les enjeux de sécurité, de mobilité et de densité urbaine exigent des dispositifs à la fois structurants et coordonnés. Lire aussi : Sans les droits des femmes, ni la paix ni le développement inclusif ne peuvent véritablement perdurer En entrant dans ce programme, Casablanca s'engage à repenser son rapport aux espaces publics à travers des interventions sensibles au genre, adaptées aux réalités locales et portées par les communautés concernées. La ville devra aussi approfondir son cadre législatif et réglementaire afin de prévenir plus efficacement les violences sexuelles, tout en renforçant la qualité et l'efficacité des investissements publics liés à la sécurité, à l'éclairage, à la mobilité ou encore à l'aménagement urbain. Cet engagement implique enfin un travail de transformation des représentations sociales, afin que les femmes et les filles puissent jouir légitimement d'un espace public où leur présence ne soit plus perçue comme anormale, suspecte ou vulnérable. L'adhésion de Casablanca marque ainsi une inflexion importante. Elle oblige les institutions locales à concevoir des politiques publiques participatives et à associer davantage les citoyens, la société civile et les collectivités territoriales aux processus de décision. Au-delà des annonces, la réussite dépendra de la capacité à instaurer une gouvernance cohérente, capable d'aligner sensibilisation, aménagement urbain, sécurité opérationnelle et changement culturel. En se joignant à cette initiative internationale, Casablanca reconnaît que la sécurité des femmes est un baromètre essentiel de la qualité de vie urbaine. Reste désormais à traduire cette ambition en actions concrètes et continues, afin que la ville puisse réellement offrir à ses habitantes ce que toute métropole moderne devrait garantir : le droit de se sentir en sécurité, partout et à toute heure.