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«La médecine au Maroc», une esquisse historique de Fouad Laboudi sur trois siècles [Interview]
Publié dans Yabiladi le 04 - 08 - 2021

Attendu en librairie vers la mi-août, le livre du Dr. Fouad Laboudi, «La médecine au Maroc du XVIIe au XIXe siècle, esquisses historiques», analyse l'évolution de ce domaine à travers différentes phases, mises dans leur contexte politique et économique qui les a fortement influencées.
Psychiatre à l'hôpital Razi de Salé, docteur en épidémiologie, historien de la médecine et enseignant à la Faculté de médecine de Rabat Dr. Fouad Laboudi vient de publier son ouvrage «La médecine au Maroc du XVIIe au XIXe siècle, esquisses historiques» (éd. L'Harmattan). Tiré de sa thèse de doctorat, ce livre couvre l'évolution des pratiques dans le pays, entre les XVIIe et XIXe siècles. A travers le temps, l'enseignement et les infrastructures ont été influencés par les changements politiques et économiques, mais les croyances sont restées omniprésentes.
Dans votre ouvrage, on retient que le poids des croyances dans le domaine de la santé ne s'est jamais vraiment détaché de la perception populaire des maladies...
Le développement de la médecine au Maroc a connu plusieurs variations, influencées par la situation politique et les conditions économiques. Les croyances, les pratiques de sorcellerie et des moyens de guérison spirituelle ont existé depuis la préhistoire. Chaque fois que le pouvoir central a connu une phase de décadence, il y a eu un retour en force de ces croyances sur le plan sanitaire. Chaque fois aussi qu'il y a eu une épidémie, on a observé ce retour. Dans notre contexte contemporain, nous l'avons vu avec l'apparition de la Covid-19. Certains ont parlé de «destin de Dieu», voire de «châtiment divin».
Les recherches préhistoriques au Maroc ne permettent pas d'avancer des hypothèses sur l'état de santé général des Marocains, mais nous savons par exemple qu'ils ont utilisé des plantes, des remèdes naturels pour les maladies rhumatismales, inflammatoires et qu'ils ont pratiqué des formes de chirurgie. La trépanation a consisté à ouvrir le crâne au niveau d'un point précis pour traiter un hématome ou une épilepsie. Cette pratique a été influencée, à un certain degré, par les croyances religieuses et par la sorcellerie.
Entre les 17e et 19e siècles couverts dans le livre, on distingue trois phases d'évolution. L'apogée avec les sultans Moulay Rachid ben Chérif (1667 - 1672) et Moulay Ismaïl (1672 - 1727) s'est distinguée par un pouvoir central fort, qui a encouragé la recherche, la médecine et les études à l'Université Al Quaraouiyine. Les croyances spirituelles n'étaient pas le premier niveau de traitement et d'analyse des questions de la santé et de la médecine.
Avec le décès de Moulay Ismaïl et la période de décadence du pouvoir que nous connaissons, ces croyances sont revenues au premier plan. Cela a été le cas avec l'épidémie de la peste. Les savants et les médecins ont préconisé, à ce moment-là, la prévention. Mais les croyances religieuses mettaient encore cette maladie sur le compte de la volonté divine, exactement comme on l'entend durant la crise sanitaire actuelle dans certains discours. Ces croyances ont duré largement jusqu'au début du Protectorat.
Quelles sont les périodes phares qu'on peut distinguer dans l'évolution de la médecine en termes de formation ?
Il existe trois périodes également, avec la dynastie des Alaouites à partir de 1666. Les phases du pouvoir politique fort des sultans Moulay Rachid puis Moulay Ismaïl sont marquées par un progrès scientifique important, grâce au dévouement des deux dirigeants.
Moulay Rachid a réorganisé les études à Al Quaraouiyine, il a titularisé les enseignants, légalisé les diplômes, notamment ceux de la médecine. Il s'est intéressé à la santé publique, de manière générale, avec une grande importance accordée à l'hygiène. Parmi les noms phares de cette période, on retrouve Abdelkader Bellarabi, Benchekroune El Meknassi, Abdelouahab Aderraq issu d'une grande famille de médecins originaire de Souss et vivant à Fès.
Le règne de Moulay Ismaïl a été aussi une période d'apogée en termes de recherche durant 57 ans. Malgré quelques troubles politiques, le sultan a encouragé lui aussi les études à Al Quaraouiyine, il titularisait les enseignants de médecine, il a construit la ville de Meknès en donnant une grande importance aux aspects de l'hygiène dans l'urbanisme.
Le décès du sultan est caractérisé par de grands troubles, connus comme étant «La crise des trente ans». La recherche scientifique, dans tout le pays et notamment dans le domaine de la médecine, s'est considérablement détériorée. Cette période a duré jusqu'en 1844 avec la Bataille d'Isli, deuxième évènement phare. Après cela, une troisième période s'est distinguée comme étant celle de la réforme, initiée par le sultan Moulay Mohamed Ben Abderrahmane (1859 - 1873) et perpétuée par Hassan Ier (1873 - 1894). C'est une période de missions à l'étranger dans tous les domaines. L'histoire retient le nom d'un grand médecin qui est Abdessalam El Alami, lauréat d'Al Quaraouiyine parti en stage au Caire.
Le mâristân de Sidi Frej à Fès / DR.
Durant cette période, il y a une expérience peu connue entre 1888 et 1889, qui est l'avènement de l'Ecole de médecine de Tanger. Elle a été créée par les Espagnols et ses premiers étudiants ont été des Marocains, partis ensuite pour des stages et pour continuer leurs études en Espagne, puis revenus au Maroc pour travailler à Mogador. Ces expériences de réforme ont abouti de manière limitée, en raison des instabilités politiques.
En termes d'infrastructures, comment les espaces de prise en charge thérapeutique des patients ont évolué ?
Le cheminement de leur évolution n'a pas été très différents de celui de la formation et des pratiques. Leur développement a été conditionné aussi par la situation de stabilité ou d'instabilité politique. En période d'apogée, il y a eu des hôpitaux, une prise en charge bio-psycho-sociale dans les mâristâns. Après, il y a eu une décadence au cours de laquelle ces espaces se sont transformés en asiles pour aliénés, alors que depuis le XIIIe siècle même et jusqu'au XVIIe, ils ont été des hôpitaux multidisciplinaires où les disciplines et les prises en charge étaient bien définies.
A côté des hôpitaux, il y a eu aussi des projets importants au niveau de l'hygiène, comme l'assainissement et la distribution d'eau potable. Cette attention disparaît en période de décadence et un peu avant le début du Protectorat.
Cette évolution s'est opérée aux prémices du Protectorat. Comment les pratiques ont été influencées ?
En réalité, il n'y a pas eu d'influences sur les pratiques médicales, au cours de cette période. A la fin du XIXe siècle et au début du XXe, il y a eu plutôt une médecine à deux vitesses. Il y a eu la médecine dite traditionnelle, et la médecine étrangère, espagnole, française ou anglaise. Il n'y a pas eu une véritable relation entre ces deux formes du métier. L'influence a commencé avec l'instauration du Protectorat, en 1912, avec l'«élimination» de la médecine traditionnelle et un passage à la médecine moderne.
Pour réglementer l'exercice au Maroc, une loi dans ce sens est entrée en vigueur et elle a prévu que seuls les détenteurs de diplômes français pouvaient exercer en tant que praticiens. C'est pour cela que sans équivalence, même ceux qui avaient un diplôme espagnol, parmi eux les médecins marocains de l'Ecole de médecine de Tanger, n'avaient pas le droit d'exercer dans la zone sous influence française.
L'hôpital Ibn Sina de Rabat a été construit à partir de 1912 / Ph. Flickr
C'est ainsi dire que le Protectorat n'a pas instauré un système d'enseignement médical au Maroc. Il a mis en place seulement l'école des infirmiers marocains. Cette période a été influencée par les conditions politiques et économiques de la France et du monde en général, à savoir les deux Guerres mondiales. Il y avait plusieurs périodes, comme celle des épidémies. L'objectif a été d'éradiquer la peste, la syphilis et la leishmaniose. A partir de 1939 et jusqu'en 1945, cette période a connu un grand vide sanitaire avec la Seconde guerre.
Par la suite, le plan Marshall en Europe a annoncé la période de décollage sanitaire en Europe. Parallèlement, de grandes structures hospitalières ont vu le jour au Maroc, comme Ibn Sina à Rabat. Avant, les structures sanitaires consistaient en des «hôpitaux indigènes», à côté de l'Institut Pasteur. Même durant cette période, il y a toujours eu une médecine à deux vitesses : une pour «les indigènes» et une pour les Français et les notables. Le rôle des médecins étrangers était axé sur l'infiltration plutôt que sur la santé des Marocains.


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