Sahara/C24: La Gambie réaffirme son "ferme soutien" à la souveraineté et à l'intégrité territoriale du Maroc et à l'initiative d'autonomie    Une délégation du Conseil de l'audiovisuel de l'Azerbaïdjan en visite au Maroc    La Cour constitutionnelle donne suite à la démission de l'ancien ministre Moubdiî de la Chambre des Représentants    Le bilan mi-mandat du gouvernement ouvre des "perspectives prometteuses", selon des chercheurs universitaires    African Lion 2024: Fin du cycle académique, place à l'action    Double échec diplomatique algérien à Manama et à Caracas    Message de condoléances de Sa Majesté le Roi à la famille de feu Haj Ahmed Pirou    Mondial féminin U17. Le Maroc bat l'Algérie 4-0    Championnat saoudien / Le derby An.Nasr-Al Hilal: La vidéo de la grosse prestation de Bounou, impérial, devant Ronaldo et compagnie !    Qualifications Mondial Féminin U17 : Le Maroc écrase l'Algérie pour affronter la Zambie (dernier tour).    Projet Mondial 2030: Maroc, Espagne et Portugal en mode communication    Boujdour: Ait Taleb lance les services de six centres de santé urbains et ruraux    Agadir : la DGSN mobilise 4 hectares pour le nouveau siège de la Préfecture de police d'Agadir    Faciliter l'accès des malvoyants à l'information juridique : la présidence du Ministère Public et l'OAPAM signent une convention de partenariat    Siel: L'écrivaine espagnole Mireia Estrada Gelabert dévoile son premier ouvrage consacré au Maroc    La SNRT commémore sa mémoire et honore des pionniers de l'audiovisuel    Eliminatoires CdM féminine U17: Le Maroc bat l'Algérie 4-0    Emplois durables : L'IFE lance son deuxième appel à projets au Maroc    «Escobar du Sahara» : Le procès de Said Naciri et Abdenbi Bioui s'ouvre le 23 mai 2024    From Rock to Gnawa : Jazzablanca's free stage celebrates musical diversity    SIEL 2024 : Karima Moual déconstruit les stéréotypes sur la migration à travers 11 récits    La Bourse de Casablanca clôture dans le vert    Agadir : Coup d'envoi de la 5ème édition des JPO de la DGSN    Football. La FIFA confirme qu'elle n'admet que les pays membres de l'ONU    Cannabis licite: les premiers produits sur le marché local en juin    Classement CWUR : L'Université Mohammed V de Rabat, une des meilleures universités au monde    Ghiath Smart Patrol : l'Innovation technologique de la DGSN à Agadir    RedBird IMI s'empare d'All3Media, producteur de "Squid Game: The Challenge"    La FIFA tranchera d'ici deux mois la demande de suspendre la fédération israélienne    Smotrich annule l'accord de libre-échange et impose des droits d'importation de 100 % sur les produits turcs alors que le fossé se creuse    Le Club Med et la SMIT s'allient pour révéler les joyaux cachés du Maroc rural    Leila Benali à Paris pour discuter transition énergétique    Nouvelle baisse des prix des carburants ce vendredi 17 mai au Maroc    Coopération sécuritaire internationale: le président d'Interpol salue le leadership du Maroc    L'ambassadeur Amrani rencontre Ajay Banga: ferme volonté de renforcer la coopération entre la Banque mondiale et le Maroc    Caftan Week. Siham El Habti : « Ma collection est inspirée des villes impériales du Maroc »    Le CPS de l'UA condamne fermement le commerce illicite des armes légères et l'utilisation qui en est faite par les groupes armés et insurgés    Bank of Africa désignée la banque partenaire la plus active de la BERD en 2023    Le Chili « fermement opposé » à toute exploitation pétrolière en Antarctique    Prévisions météorologiques pour le samedi 18 mai 2024    Melon charentais : la culture gagne du terrain au Maroc    Rwanda. La période électorale est ouverte    Présidentielle au Tchad. La victoire de Idriss Déby Itno validée    Sommet du Conseil de la Ligue arabe à Manama : Akhannouch s'entretient avec son homologue libanais    L'UA veut renforcer le développement du cinéma en Afrique    Société Générale Maroc célèbre l'art et la musique au festival Jazzablanca    Caftan Week. Romeo : « Les jeunes créateurs doivent s'armer de patience »    SIEL 2024 : Le monde de la culture marocaine rend hommage à Lahcen Zinoun    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Les écrivains et la dictature de l'image
Publié dans Albayane le 23 - 04 - 2015

De nos jours, l'écrivain n'est plus ce qu'il ecrit ; il est ce qu'il paraît. L'œuvre a été sacrifiée sur l'autel de l'IMAGE ; son rôle n'est plus de dévoiler les mondes réels et/ou parallèles, mais l'affect et l'intellect, toujours sublimés, de son créateur. Elle est réduite à un simple relais des personnalités en quête d'admirateurs et des egos en mal de reconnaissance. Pour se faire une place parmi ses congénères, l'écrivain doit d'abord et avant tout véhiculer une image positive de sa propre personne.
Le temps des écrivains paranoïaques, schizophrènes, fous, cruels, cyniques, grincheux, laids, antipathiques est bien révolu. Pour réussir une œuvre (comprenez, pour bien la vendre et être invité partout), l'écrivain contemporain doit paraître avant tout sympathique, gentil, généreux, sage, bon communicateur et surtout posséder un gros carnet d'adresses. Pour cela, il doit confectionner un plan de carrière à l'avance, s'acoquiner aux décideurs culturels, quitte à baisser son froc, passer des jours et des jours à téléphoner à celui-ci et à celle-là dans l'espoir d'être programmé ici ou là-bas, des heures et des heures devant sa caméra dans l'espoir que celle-ci lui restitue de beaux portraits de lui ; portraits qu'il se précipitera à poster sur sa page Facebook, Twiter et consorts. Il doit y paraître souriant, toujours souriant, avec un angle qui met en relief un regard lointain, de préférence mélancolique, une prise docte pour certains, négligée pour d'autres, rebelle pour les troisièmes, c'est selon, mais impérativement sympathique, et surtout entouré de beaucoup de lecteurs/lectrices qui se ruent sur lui pour une dédicace. L'éclat de l'image, l'amabilité de l'auteur, même factices, se sont substitués à la beauté du texte. Peu importe que l'œuvre proposée soit un navet ; l'essentiel, c'est que le navet soit servi avec le sourire et qu'il réussisse à créer le Buzz. On ne cherche plus à écrire une belle œuvre, profonde et intelligente ; on préfère afficher sa supposée gentillesse et sa prétendue intelligence. On oublie qu'un bon écrivain est avant tout celui qui crée une œuvre plus intelligente et plus belle que lui. Faute de belles œuvres, les écrivains d'aujourd'hui s'affichent trop, parlent trop et abusent de leurs images. Aussi, certains sont-ils incapables de rester une journée sans poster leurs différents selfies, partager les instantanés des rencontres, récentes ou anciennes, aussi insignifiantes soient-elles, dénicher dans les rubriques illisibles des journaux inconnus ou dans les murs des amis virtuels la plus courte phrase écrite sur eux ou sur leurs livres, qu'ils scannent et partagent, repartagent jusqu'à la nausée. Certains vont jusqu'à demander à des amis, ou des facebookeu(se)rs, de se faire photographier avec leurs livres, accompagnés d'un petit commentaire laudatif. Tous les moyens sont bons pour ne pas disparaître des réseaux sociaux, de l'actualité. Et s'il n'y a plus de photos, ou si on en a trop abusé, et bien on postera des photos anciennes, du temps où on était plus jeune et plus beaux. L'écrivain d'aujourd'hui a peur de disparaître de la circulation. Résultat : il passe plus de temps à peaufiner son image sur les réseaux sociaux, qu'à lire ou à se débattre avec les phrases d'une œuvre en construction. Il n'a plus peur de rater son œuvre ; il a grandement peur d'écorcher son image par un propos déplacé, une photo non réussie ou une réaction brusque. Du coup, il ne poste que ce qui est du goût de ses supposés lecteurs, ne prend jamais position, à moins qu'elle aille dans le sens de ses « mécènes », et, comme un imbécile, se contente de liker tout et d'étirer ses lèvres béatement. Souriez ! Vous êtes filmés. Un écrivain peut-il exister simplement avec son image, sans son œuvre? C'était impossible auparavant, c'est devenu la norme aujourd'hui. Au lieu que l'œuvre fasse vivre l'écrivain, c'est désormais l'image de l'écrivain qui garde l'œuvre en survie. Au lieu que l'œuvre dégage sa propre intelligence, c'est l'écrivain, avec ses commentaires « post-écriture », enrichis par les avis des lecteurs, souvent inventés, revisités et augmentés, qui s'acharne à la rendre intelligible. De nos jours, beaucoup d'œuvres ne peuvent plus durer sans leurs auteurs, alors que ça doit être l'inverse. C'est ce qui explique que beaucoup d'entre elles restent indigestes jusqu'à ce que leurs créateurs s'acharnent à les expliquer. Elles ne deviennent pas des chefs-d'œuvre pour autant, elles deviennent potables tout au plus. D'un autre côté, l'écrivain d'aujourd'hui peut-il se permettre le luxe de négliger son image ? La réponse est NON. Nous vivons avec l'hégémonie des images et des réseaux sociaux. L'écrivain n'est plus celui qui se contente d'écrire ; il est devenu l'auteur-compositeur-interprète. Les éditeurs, à de rares exceptions, n'assument plus les exigences de l'édition ; ils se contentent d'être des épiciers. C'est à l'écrivain de faire le travail éditorial : corriger le texte, proposer le titre, la couverture, etc. Le plus souvent, c'est à lui qu'incombe la promotion des livres, c'est à lui de les vendre en contactant des journalistes, en programmant des rencontres, en participant à des salons. Tout cela doit être précédé par une image positive de soi. Vendre son livre passe d'abord par vendre sa propre image. Malheureusement, cela se fait souvent au détriment de la valeur littéraire de l'œuvre. Autant dire, un cercle vicieux et inextricable dans lequel le véritable perdant reste la littérature. Que faire alors ? Il me semble (et ce n'est qu'un avis) que pour se soigner de ce fléau qu'est l'image et redonner au texte ses lettres de noblesse, il faut que l'écrivain accepte de renoncer au rôle d'homme public qu'il s'est approprié. Il faut qu'il accepte de disparaître derrière son œuvre. Il faut qu'il laisse celle-ci se défendre d'elle-même. Pour cela, rien de mieux que de publier des livres sans nom d'auteur, juste avec des initiales ou des numéros, et laisser les mots, le style et la littérarité séduire les lecteurs. IMPOSSIBLE, diront certains. Bien sûr, c'est impossible, car l'écrivain contemporain tient beaucoup plus à son image qu'à son œuvre. Dans ce cas, qu'il soit au moins honnête, qu'il n'édulcore pas son image. Véhiculer ce qu'il est n'est pas une tare, c'est véhiculer une image sublimée de soi qui en est une, c'est surtout faire prévaloir sa propre image sur ses créations qui pose problème. En une phrase : il faut que l'écrivain disparaisse derrière son œuvre et non pas l'inverse.

Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.