Mort de Ronald Messier n'est plus Mariem Berdouzi (journaliste en stage) Ronald Messier, figure emblématique de l'archéologie marocaine, a rendu l'âme le 2 septembre 2021. Professeur émérite à Middle Tennessee State University, historien et archéologue, il s'est fait remarquer par son dévouement total au domaine de l'archéologie, par sa générosité infinie envers tous ceux et celles qui ont eu la chance de le côtoyer et par son amour inconditionnel pour le Maroc et les marocains. Sa venue au Maroc Cet archéologue américain a connu le Maroc très jeune. Il y est venu à la fin des années 60.A l'époque, il travaillait, à Michigan University, sur sa thèse doctorale dont le thème était « les monnaies d'or en Afrique de nord », notamment de l'époque fatimide et de l'époque Almoravide. Ronald est le premier chercheur qui a effectué des analyses physico-chimiques sur ces monnaies dans l'objectif de prouver leurs origines, une technique considérée autre fois comme innovante. Sijilmassa : « la cité de l'or » Alors professeur, ses préoccupations pédagogiques prennent, pendant un bon moment, la prérogative sur tout le reste, et ce n'est qu'en 1987 qu'il décide d'explorer la possibilité de faire un projet au Maroc. D'où l'idée d'exécuter cinq grandes campagnes de fouilles dans l'un des sites islamiques les plus importants au Maroc, en l'occurrence celui de Sijilmassa ; la cité de l'or comme dixit le feu. C'est donc la toute première fois que le voile est véritablement levé sur ce site, tout en utilisant des procédés étrennant, jusque-là ignorés par les autres archéologues. Ce qui permet d'obtenir des résultats plus exacts et révélateurs de l'importance de cette ville mythique. Il est à noter que ce projet maroco-américain s'est inscrit dans le cadre d'un partenariat entre l'institut national de l'archéologie et de patrimoine, et Middle Tennessee State University, et qui a duré jusqu'en 1998. Et d'ajouter ; c'était une vraie occasion pour les jeunes archéologues marocains, qui découvraient le travail de terrain. C'est d'ailleurs le cas d'Abdallah Fili, archéologue et professeur à l'université Chouaib Doukkali d'El Jadida. «C'est grâce à ce programme que j'ai pu faire la connaissance de Ronald. En tant que stagiaire, j'ai bénéficié de son savoir-faire et encouragé par sa confiance. Depuis, c'est une relation d'amitié et de camaraderie qui commencera et dura plus de 30ans.», a-t-il affirmé. Le site d'Aghmat : un nouvel engagement archéologique En 2005, Aghmat est devenu la nouvelle direction des archéologues. Ville médiévale et ancien émirat indépendant, cette petite ville située aux pieds de haut Atlas n'a jamais cessé d'attirer l'attention de ceux qui connaissent sa valeur historique. Messier a déployé des efforts estimables pour que le programme Moroccan-American Project at Aghmat (MAPA) voit le jour, ce dernier est alors initié sous l'insistance de Frederick Vreeland, ancien ambassadeur des Etats Unies d'Amérique au Maroc, et de son épouse Vanessa Vreeland, en vue de restaurer le Hammam d'Aghmat ; le plus grand Hammam médiéval de tout le Maghreb dans l'espoir de l'ouvrir un jour au public. « Roland a mis les mains et les pieds pour qu'il trouve des sources de financement, et convaincre des fournisseurs à l'urgence de contribuer à sauver les vestiges de la ville. Il voulait vraiment réussir ce projet, et il n'a pas hésité un seul instant à frapper à toutes les portes », a souligné Abdallah Fili. Ronald Messier : le philanthrope Il l'a parcouru de Tanger à Lagouira. C'était quelqu'un qui connaissait bien le Maroc. Ses qualités de générosité, sympathie et clémence ont toujours été le fil qui tissait ses relations avec les autres. Ces autres auxquels il n'a jamais refusé de l'aide, toujours soucieux de leur formation et de la transmission des connaissances. Il mettait tout son savoir à la disposition des apprenants. En dépit de toutes les exigences de la recherche scientifique et la rigueur que demande ce genre de travaux, Ronald arrivait régulièrement à créer une atmosphère de bonne humeur et de convivialité. «Je m'apprêtais sincèrement à écrire aux autorités marocaines pour voir les possibilités de lui discerner une médaille de reconnaissance de la part du Maroc, après tout ce qu'il a fait », nous confie Abdallah Fili. Même son de cloche chez Abdelouahed ben-Ncer qui regrette son départ. « Ronald Messier qui vient de nous quitter constitue une perte considérable pour l'Archéologie médiévale marocaine et ce, dans la mesure où feu Messier a beaucoup œuvré pour une meilleure documentation de deux sites archéologiques nationaux. », a-t-il fait savoir. Ronald Messier était alors un homme de paix, celui qui a pu lier les deux rives de l'Atlantique. Un philanthrope qui a aimé tout le monde jusqu'à son dernier soupir.