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Le regard du professeur (2)
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 11 - 11 - 2002

«Un demi siècle dans les arcanes de la politique», est le livre du professeur et ancien conseiller royal, Abdelhadi Boutaleb. Cet épisode nous ramène aux débuts des grands noms du nationalisme marocain. Éléments de Biographie significatifs.
Hatim Betioui : Et Lahcen Lyoussi ?
Abdelhadi Boutaleb : Du temps du protectorat, il était agent de l'autorité de l'intérieur, et un des grand caïds. Puis il à été écarté de son poste quand il a refusé de prendre part au complot des caïds. Au sein du gouvernement, il était ministre de l'Intérieur. Son niveau d'instruction était limité, mais il avait cette sagesse des chefs de tribu formés à l'école de la vie.
Et, de fait, il avait une grande expérience. Il était familier avec le monde rural auquel il appartenait. Il en connaissait les reliefs aussi bien que les besoins et les aspirations, les hommes et les tribus. Lorsqu'il a été nommé ministre, il ne s'est pas intéressé à autre chose qu'à la sécurité et au contrôle des activités des caïds et des gouverneurs. Il y avait toutefois, des cadres capables de faire marcher les départements, de ce ministère qui a toujours été le plus grand des ministères ou, comme on l'a baptisé à l'époque de Driss Basri, «Le père des ministères».
Mokhtar Soussi ?
Un fqih , un érudit et un homme de lettres. Il doit son renom à sa culture historique, notament ses écrits sur «Souss al-Alima» et son livre «Al-Maassoul», un imposante encyclopédie. Il représentait un branche de «fqihs» qui étaient essenciellement des hommes de lettres. Loin d'être un intégriste hermétique, il était très ouvert. Il fréquentait les jeunes étudiants, dialoguait avec eux et les impressionnait par son humilité et l'étendu de son savoir. Il jouissait de l'estime de tous les ministres, indépendamment de leurs appartenances politiques. Il y avait entre lui et moi une grande entente spirituelle et culturelle, et nous nous apprécions mutuellement.
Abdelkader Benjelloun ?
Il a occupé le poste de ministre des Finances. Après des études de sciences politiques et de droit à Paris, il a été le deuxième avocat que comptait le Maroc, après Ahmed Zarrouk. C'était un révolutionnaire qui avait un véritable programme socio-culturel. C'était aussi un des premiers promoteurs de la démocratie et de la modernité au Maroc. Secrétaire général adjoint du PDI, il était le deuxième personnage du parti, après Mohamed Ben Hassan Ouazzani. Il a marqué le PDI de son empreinte révolutionnaire progressiste.
Thami Ouazzani ?
Lui aussi était parmi les ministres issus du PDI. Il a était nommé ministre des Mines et de la Production industrielle, après des études à Paris sanctionnés par une licence en droit et après avoir exercé comme avocat. Peu d'années seulement se sont écoulées entre la fin de ses études et le moment où il a rejoint le gouvernement. Il a adhéré tôt à l'Action Nationale Marocaine en faisant partie des jeunes scouts nationalistes. Avac lui et Bensouda, nous nous formions un «Trio» soudé par une amitié ininterrompue, qui dure encore à ce jour.
Ahmed Bensouda ?
Il a été élevé et a grandi dans le militantisme national. C'était le premier militant de notre parti, et durant des années il n'a fait que passer d'une prison à l'autre.
Pour moi, c'est l'ami de toujours et le compagnon de lutte. Toute notre vie, nos liens d'amitié n'ont jamais été alértés ou interompus. Il a marqué le ministère de la Jeunesse et des Sports de l'empreinte de son action militante. Il se comportait avec son département comme il se comportait avec les cellules nationales qu'il guidait, orientait et éduquait.
M'hamed Douiri du PI ?
Lui aussi était un de ces éléments istiqlaliens qui sympathisaient, sur le plan personnel, avec leurs adversaires politiques. Il y avait, et il y a toujours, entre lui et moi une grande affection et une grande entente.
Nous étions trois au gouvernement de la même tranche d'âge : lui, Thami Ouazzani et moi-même.
Douiri était le premier marocain diplômé de l'Ecole Polytechnique. Il avait donc la prédisposition technique et la compétence nécessaires pour diriger le ministère des Travaux publics. Et il a réussi.
Quand vous avez été nommé ministre du Travail et des Affaires Sociales, dans quel état avez-vous trouvé le ministère ?
Comme je l'ai déjà mentionné, à la tête de chaque ministère se trouvait un directeur général français : directeur de l'intérieur, directeur du travail et des affaires sociales, directeur de la Santé, directeur des Finances, directeur des Travaux publics, etc. C'étaient de véritables ministres, mais qui portaient le titre de directeur. A l'instauration du premier gouvernement, chacun de ces directeurs a essayé de s'associer avec le ministre marocain dans la prise de décision en imposant la double signature, mais nous avons refusé.
Nous avons donc commencé à exercer la souveraineté marocaine, indépendament d'eux, pratique que la France a fini par admettre. Je vais vous citer un cas étrange qui illustre cette crise. Le ministère que je dirigais était chargé d'organiser le travail entre les employeurs et les travailleurs et d'appliquer la législation régissant les rapports entre les deux parties, et surtout entre le patronat et les syndicats. A l'époque, l'économie nationale était conduite par les étrangers, alors que les Marocains n'étaient qu'ouvriers dans les usines et les ateliers de ces étrangers. La Résidence Généraale refusait d'affecter des nationaux au ministère du Travail , dont la vocation était, comme déjà mentionné, d'intervenir pour régler les conflits de travail entre les ouvriers locaux et les patrons d'usines européens.
Dès que la formation du premier gouvernement a été annoncée et avant même que je ne me rende au ministère pour m'y installer, son directeur général René Tomazini (qui était le véritable ministre), m'a téléphoné pour me dire : «J'ai appris, Monsieur le ministre, que vous occuperez votre bureau demain. Je voudrais savoir quand vous comptez nous honorer pour que je vous accueille à l'entrée de l'administration». En arrivant à mon bureau au ministère, il m'a demandé : «Comment souhaitez-vous que les fonctionnaires s'adressent à vous, en utilisant l'expression Votre Excellence ou Monsieur le ministre ?». Comme la question m'a semblé bizarre, je lui ai demandé à mon tour: «pourquoi cette question ?».
Alors, il a insisté pour que je choisisse un titre. Je lui ai répondu ceci : «concernant le titre votre Excellence, je ne sais ni où commencent ni où se terminent les limites de son champ d'application.
Pendant le protectorat, vous l'utilisez avec avec tous les fonctionnaires, du caïd du village au ministre du makhzen de la capitale, en passant par le pacha de la ville. Quant au terme ministre, je sais qu'il désigne un membre responsable du gouvernement. C'est pourquoi je le préfère à Votre Excellence.
Tomazini a dit : «C'est bien, nous nous y conformerons». puis il m'a demandé : «comptez-vous prononcer un discours devant le personnel du ministèreà l'occasion de votre nomination ?». J'ai dit: «Oui, c'est ce que je compte faire». Alors, il m'a posé une autre question, qui m'a foudroyé : «Pensez-vous qu'il soit nécessaire que les Marocains assistent à la cérémonie d'investiture ?». J'ai rectifié : «Je pense que vous voulez parler des étrangers». Il m'a dit : «Non, je veux bien dire les Marocains».
Quand je lui en ai demandé la raison,il m'a répondu en bafouillant,visiblement embarrassé: «Monsieur le ministre, ce ministère est sensible. Jusqu'ici,nous avons surveillé tous les employés, dont nous nous méfions,. Maintenant, nous n'avons dans le ministère, qui emploie 386 personnes, que trois coursiers marocains. C'est pourquoi je vous demande si vous pensez qu'ils doivent être présents». Je lui ai répondu : «Il est impératif qu'ils soient présents. Le Maroc doit au moins être représenté par eux». puis il m'a demandé : «En quelle langue vous adressez-vous aux fonctionnaires?». Comme il m'a laissé entendre qu'aucun des fonctionnaires ne comprenait l'arabe, j'ai dit: «Aucune importance. Je parlerai en français». Puis il m'a encore demandé : «Voulez-vous que les employés se présentent pour vous saluer ou que vous passiez pour les saluer?». J'ai répondu: «Je préfère passer les saluer, c'est moi qui les ai rejoints».
Après mon discours, que j'ai prononcé en français, je suis passé saluer les fonctionnaires du ministère un à un. Ils étaient de nationalités française, espagnole, portugaise, italienne et autres. Vers le fond de la salle, je me suis trouvé, à l'extrémité du rang, face à deux individus, l'un noir et l'autre brun. Le premier, de stature élancée, portait un turban dont le bout pendait sur son épaule. Quand je suis arrivé à sa hauteur, et c'était le dernier que je saluais, il s'est incliné pour m'embrasser la main. Je l'ai retirée en disant: «serrons-nous plutôt la main» . Sa réponse a été : «Sidi, cela fait maintenant 33 ans que je travaille ici, et jamais cette mainsale n'a serré une autre main. Nous, les trois chaouchs faisant le salut militaire à tout le monde». Alors je lui ai dit : «C'est maintenat terminé. Vous avez été un esclave du colonialisme. Aujoud'hui, c'est l'ère de l'indépendance, vous êtes libres. Tendez la main pour saluer le ministre, votre frère».
Au moment de la formation du premier gouvernement, le Maroc comptait en tout et pour tout 5 médecins marocains, 3 avocats, 3 agronomes et 1 ingénieur des ponts et chaussées. Le nombre d'élèves inscrits dans l'enseignement primaire ne dépassait pas les 200.000. L'enseignement secondaire n'arrivait pas jusqu'au baccalauréat. Tous les établissements de l'Etat étaient dirigés par les Français, les Marocains n'y tenant aucun rôle.


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