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Le regard du professeur (9)
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 20 - 11 - 2002

«Un demi siècle dans les arcanes de la politique», est le livre du professeur et ancien conseiller royal, Abdelhadi Boutaleb. L'auteur se penche sur la perception par l'administration américaine de la cause palestinienne et de la Marche Verte.
Hatim Betioui : En dehors de la question du Sahara, quelles sont les autres questions sur lesquelles vous insistiez au cours de votre séjour à Washington ?
Abdelhadi Boutaleb : Je mettais l'accent sur la cause palestinienne et l'occupation des territoires arabes par Israël. Je frappais aux portes pour parler d'abord du Sahara, puis de la question palestinienne.
J'invitais des membres de la Chambre des Représentants et du Sénat chez moi. Une fois par semaine, j'organisais à la résidence de l'ambassade un dîner auquel assistaient des Représentants, des sénateurs, des journalistes et d'autres personnalités influentes. Nombreux étaient ceux qui répondaient à l'invitation de l'ambassadeur marocain avec plaisir ; la cuisine marocaine les séduisait et l'accueil marocain les incitait à accepter l'invitation.
Je me souviens avoir une fois contacté un membre du Sénat, que je ne souhaite pas nommer ici et qui est devenu un ami (Il est peut-être encore vivant), pour discuter avec lui de la question palestinienne et je lui est parlé d'Israël et de ses agissements. Comme j'ai remarqué qu'il abondait dans mon sens, je me suis enhardi à lui dire : «Puisque vous êtes d'accord avec ce que je dis, que vous soutenez mon point de vue et que vous ajoutez même d'autres éléments qui concordent avec mes idées, puis-je vous demander si beaucoup de sénateurs partagent vos sentiments.» Il a alors répondu : «Oui, beaucoup, et nous en discutons entre nous. » Je lui ai donc posé la question : «Pourquoi alors n'osez-vous pas clamer la vérité ? Beaucoup de choses chez vous sont inexactes et erronées.» Le sénateur a tourné la tête à droite et à gauche, comme s'il craignait d'être écouté, puis a expliqué : «Aucun parmi nous n'oserait dire à voix haute ce que je vous dis ici. « Ensuite, il a indiqué le siège sur le quel il était assis en disant : «Ce siège, je le dois aux voix des juifs.» La franchise de ces propos était une illustration claire de ce que j'entendais au sujet de l'influence du «lobby sioniste» sur la vie politique américaine et des différentes pressions qu'il exerçait sur les décideurs.
Vous savez qu'on dit que les Etats-Unis sont «le pays où les élections durent toute l'année», car, elles ont lieu au niveau fédéral ou au niveau des Etats, des conseils municipaux, des parlements des Etats pour choisir le gouverneur d'un Etat ou le président fédéral tous les quatre ans ou tous les deux ans, ou bien pour choisir périodiquement des juges de différentes juridictions. Le lobby sioniste a ceinturé les Etats-Unis de manière telle que les responsables politiques craignent pour leur pouvoir et ont constamment besoin des voix des électeurs juifs pour le conserver. C'est pourquoi l'Amérique ne change pas son attitude bienveillante à l'égard des Juifs et continue d'ignorer la réalité de la cause arabe. Certes, quelques responsables peuvent être convaincus de la justesse de cette cause, mais ils ne peuvent pas la soutenir tant que la situation politique à l'intérieur des Etats-Unis ne change pas. Les responsables savent qu'ils sont cernés par Israël à l'intérieur même de leur puissante nation.
Revenons à la Marche Verte. Comment les Américains ont-ils accueilli cette initiative marocaine ?
Après l'annonce par le Roi de l'organisation de la Marche Verte, j'ai reçu un télégramme royal crypté contenant des instructions précises. J'y ai trouvé, entre autres, ceci : «Lors de vos entretiens avec les responsables américains, tachez de leur donner toutes les garanties possibles sur notre intention de ne pas entrer en guerre contre l'Espagne, leur préciser que nous ne souhaitons pas résoudre le problème parla force, que la Marche Verte ne durera que quelques jours et que l'Espagne en tirera les conclusions et nous restituera notre territoire. Dès que je verrai le moindre signe dans ce sens, je donnerai aux marcheurs l'ordre de faire demi-tour. Veillez donc à ce que les Américains exercent des pressions sur les Espagnols pour qu'ils soient compréhensifs, d'autant plus que ce dossier ne peut rester indéfiniment fermé. La logique du temps et celle des concepts de libération et de liquidation des poches de colonialisme inciteront l'Espagne à renoncer au Sahara. Confirmez-leur ces intentions qui sont les nôtres et, en même temps, ayez des entretiens avec votre collègue l'ambassadeur espagnol (ce que Sa Majesté a ordonné à tous les ambassadeurs marocains) pour lui confirmer que nous voulons parvenir avec l'Espagne à une solution amicale et pacifique du problème.»
Bien entendu, la situation était délicate. Les Américains avaient une attitude mitigée de prudence à notre égard, et prenaient au sérieux leur alliance stratégique avec l'Espagne.
Comment avez-vous jugé l'attitude de la diplomatie américaine concernant la question du Sahara ?
Au cours des fréquentes visites que j'ai effectuées au département d'Etat -à ma demande ou à celle des Américains- pendant le déroulement de la Marche Verte, j'ai pu voir comment, dans la pratique, la diplomatie américaine s'organisait pour gérer les questions internationales. Elle divisait le monde en région, et les régions en sous-régions. Chaque ambassade présente à Washington a un bureau particulier(desk) au département d'Etat dirigé par un fonctionnaire responsable du pays représenté. J'ai rendu visite au bureau du Maroc au département d'Etat pour la première fois en 1974 quand j'ai présenté mes lettres de créances au Président Gerald Ford. C'est un bureau dirigé par un haut responsable qui connaît le dossier du pays dont il a la charge. On y trouve une photographie du chef d'Etat de ce pays. Quand un nouvel ambassadeur est désigné, sa photographie aussi est exposée, à la place de celle de son prédécesseur. La mission de ce fonctionnaire est bien définie. Il est mis à la disposition de l'ambassadeur accrédité pour être à son service, notamment pour les prestations particulières. Il reçoit l'ambassadeur ou, au besoin, se rend chez lui à l'ambassade, pour discuter avec lui de questions intéressant son pays.
Lorsque j'allais voir Henry Kissinger, le secrétaire d'Etat américain, celui-ci était entouré de ses adjoints spécialisés, comme Joseph Cisco et Alfred Atheron. Ce dernier devait par la suite être nommé ambassadeur en Egypt puis en Israel. Assistaient aussi aux réunions le fonctionnaire responsable du dossier espagnol, et ceux chargés respectivement des dossiers algérien et mauritanien (l'Algérie en tant que partie concernée par la question du Sahara et la Mauritanie en tant que partenaire). Ces hauts fonctionnaires dressaient un procès-verbal de la séance. Ce qui est surprenant, c'est que je recevais des appels téléphoniques de l'ambassadeur des Etats-Unis à Rabat, Newman, qui me parlait des propos échangés entre moi et le ministre au cours de la rencontre à Washington et y apportait ses commentaires. Cela veut dire que le département d'Etat américain adresse, le jour même, des rapports détaillés à ses ambassadeurs concernés par la question afin qu'ils puissent suivre son évolution. Telle est leur manière de travailler, elle frappe par sa rigueur et par la bonne exploitation du temps, deux vertus qui font singulièrement défaut à notre diplomatie. Il est probable aussi que, dès qu'un ambassadeur quitte leur bureau, ils tiennent une réunion et recueillent les rapports de leurs propres ambassades à l'étranger avant de prendre les décisions nécessaires. Le suivi des différents problèmes est assuré avec tact et rigueur.
On a dit que l'Administration américaine avait donné le feu vert pour l'organisation de la Marche verte. Qu'y a-t-il de vrai dans cette assertion ?
Les Américains ne savaient rien de la marche avant son déclenchement. Pendant toute une année, il ne s'agissait, dans mon esprit, que d'une grande manifestation.
Quand le Roi a annoncé l'organisation de la Marche, quelle a été la première réaction de l'Administration américaine ?
Ainsi que je l'ai dit précédemment, les Américains étaient prudents. Cependant, ils ne manifestaient aucune sorte de sympathie pour l'Espagne et recommandaient que le Maroc évite toute escalade. Ils craignaient que le Maroc n'entraîne l'Espagne dans une aventure ou une guerre dont ils ne voulaient pas. Atherton m'a dit une fois : « Si des violences éclatent, nous ne vous garantissons rien, nous vous laisserons face à face avec l'Espagne».
Les Américains ont poussé un grand soupir de soulagement quand ils ont appris l'envoi, par le général Francisco Franco, d'un émissaire auprès du Roi Hassan II pour lui faire savoir que l'Espagne était disposée à entamer des négociations avec le Maroc visant à mettre un terme au problème du Sahara. Le Maroc et l'Espagne ont effectivement engagé des négociations, et la Marche verte s'est arrêtée. L'accord de Madrid a été conclu (1975) et signé par l'Espagne, d'une part, et le Maroc et la Mauritanie, d'autre part. Toutefois, le Maroc et la Mauritanie ont convenu que la région de Dakhla serait placée sous l'autorité mauritanienne. Seulement, la mauritanie a préféré en fin de compte se débarrasser de la question du Sahara. Lorsqu'elle a informé le Roi Hassan II qu'elle ne souhaitait plus rester à Dakhla, le Souverain a adjoint ce territoire aux provinces marocaines libérées.
Pourquoi la Mauritanie a-t-elle renoncé à Dakhla ? Parce que certains éléments du Front Polisario s'étaient mis à attaquer le territoire mauritanien. En outre, l'Algérie avait commencé à exercer de fortes pressions sur la Mauritanie. A ce propos, je voudrais signaler la rencontre qui a eu lieu entre le Président algérien Houari Boumediene et le Président mauritanien Mokhtar Ould Daddah, au cours de laquelle le premier a menacé le second en lui disant : «Ne touchez pas au Sahara. Retirez-vous et renoncez à la collaboration avec le Maroc, faute de quoi vous nous trouverez sur votre chemin.» C'est tout cela qui a amené la Mauritanie à se retirer de Dakhla.


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