Une délégation militaire française en visite à Rabat pour renforcer la coopération en formation, recherche et innovation en médecine militaire    L'Algérie vacille au bord de l'effondrement, entre crises internes et isolement diplomatique étouffant    Majida El Roumi submergée par l'émotion à Rabat adresse un message touchant au Roi Mohammed VI : « Notre amour pour le Maroc est un attachement unique »    Interview avec Mohamed Birouaine : «La jeunesse marocaine de France, acteur majeur de la diplomatie citoyenne»    Gestion de l'eau : Nizar Baraka suit l'avancement des chantiers à Al Haouz    Exclusif : la Pologne envisage un éventuel appui au plan d'autonomie pour le Sahara    BCIJ : Arrestation d'une extrémiste de Daech en cours de préparation d'un attentat    Tournoi international de futsal U17 Castro del Rio / J2 : Les Lionceaux maîtrisent l'Espagne    Prépa. EN (f) U20 : Les Lioncelles s'imposent face au Bénin    Prépa. CAN (f) Maroc 24 : Les Sud-Africaines boycottent les entrainements !?    Benguérir : Interpellation de deux individus pour outrage à des policiers    Le Maroc et la Turquie signent un accord sur les corridors maritimes    Réunion ministérielle UE-UA : Bruxelles dément avoir invité le Polisario    Es-Smara attaquée : l'étiquette terroriste se précise pour le polisario    Urgences méditerranéennes : entre crise migratoire, instabilité et inégalités    Xi Jinping rencontre le Premier ministre sénégalais    Crise France-Algérie : Alger se résout à l'apaisement avec Paris    Le grand-père de la future patronne du MI6 était espion pour les Nazis, selon un média    Le ministre Abdelssamad Kayouh exhibe un selfie avec Recep Tayyip Erdoğan, au mépris de toute retenue protocolaire    La fédération sud-africaine de football étudie le modèle marocain pour refonder sa gouvernance financière    Le modèle tarifaire unifié pour le gazoduc transsaharien Maroc-Nigeria au centre des réflexions    CHAN 2024 : le Maroc disputera son premier match contre l'Angola, le 3 août à Nairobi    Mondial des clubs: Bayern-Flamengo, de quoi épicer la rivalité Europe-Amsud    Mondial des clubs (8è) : le PSG face à l'Inter Miami, le Real Madrid retrouve la Juventus    « MFM » lance « Face à Face », une nouvelle émission politique hebdomadaire    Casablanca accueillera la 3è Garden Expo Africa en octobre    La police marocaine arrête à Tétouan un Maltais recherché pour détournement de fonds    Un ressortissant d'Afrique subsaharienne arrêté à Casablanca pour trafic présumé de cocaïne    Protection des élèves : les députés socialistes veulent rendre l'assurance scolaire obligatoire    Changer le regard sur le handicap sur la base des droits humains    Hausse des tarifs du tram à Rabat : les étudiants dans l'impasse financière    Marrakech accueille le Forum international de la jeunesse avec une large participation des pays du monde islamique    L'écrivaine marocaine Zineb Mekouar remporte le prix Henri de Régnier    Casablanca Music Week : Le gnaoua de Benchemsi et la furie de Hoba Hoba Spirit enchantent le public    Kaoutar Boudarraja n'est plus : la fin d'un long combat après des rumeurs erronées    Groove, soul et émotion : Mary J. Blige et DJ Abdel électrisent Casablanca    Le peintre Belka, célèbre à Agadir les couleurs d'un Maroc intime    À Rabat, une étudiante radicalisée acquise à l'idéologie de l'Etat islamique et qui préparait un grave projet d'attentat interpellée    Challenge N°975 : Du 27 juin au 3 juillet 2025    Le Maroc pourrait accueillir la plus haute roue du monde, alors que Madrid tergiverse    Les prévisions du samedi 28 juin    Fondation Hassan II : 960 enfants marocains du monde bénéficieront du camp culturel à l'été 2025    Islamophobie et racisme en France : Des étudiants d'une grande école de commerce brisent le silence    Algérie : 7 ans de prison requis contre l'historien Mohamed Belghit    France : Peines de prison pour les membres du groupe d'ultradroite AFO projetant des attentats terroristes anti-musulmans    Bounou, Diaz et Hakimi en 8èmes, le WAC bon dernier    Le Forum Canarien Sahraoui remet une lettre officielle au Haut-Commissaire aux droits de l'Homme documentant des violations qualifiées de « graves et systématiques » dans les camps de Tindouf    L'Etat accorde plus de neuf millions de dirhams de subventions à 177 projets culturels en 2025    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Les jeunes ont besoin de visibilité et de confiance»
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 02 - 10 - 2006

Les jeunes ont-ils été trahis par les politiques ? Pourquoi la majorité d'entre eux a-t-elle déserté les partis ? Réponse de Noureddine Affaya, coauteur avec Driss Guerraoui d'un nouveau livre-enquête intitulé «Le Maroc des jeunes».
ALM : Vous avez réalisé une enquête auprès de 100 jeunes leaders marocains. Quelle analyse faites-vous personnellement des résultats de cette enquête ?
Noureddine Affaya : «Le Maroc des jeunes» est une recherche qui a démarré, avec Driss Guerraoui, en août 2005 et qui vient d'être publiée récemment. Elle contient trois parties, la première constitue une analyse du Maroc dans ses manifestations politiques, sociologiques et culturelles. La deuxième contient l'enquête menée auprès de 100 jeunes leaders marocains et la troisième expose un ensemble de témoignages de jeunes acteurs médiatiques, managériaux, artistiques, politiques et sociaux. Quant à l'analyse qu'on peut faire à partir de l'enquête, elle ne peut être que nuancée mais éloquente. Nuancée dans le sens où il s'agit d'un échantillon spécifique qui reflète, clairement, un ensemble de préoccupations, plus au moins partagées, par la majorité des jeunes marocains Eloquente parce que le discours des jeunes est d'une grande transparence. Ils expriment un attachement fort à la famille, malgré les différentes formes de distorsions que vit cette institution, une extension progressive de la pratique religieuse; une position forte à l'égard des valeurs de tolérance, d'amitié, de liberté responsable, une exigence d'égalité et de justice ; la revendication d'une véritable bonne gouvernance, un engagement effectif dans les actions citoyennes, etc. Comme si on a affaire à un nouveau paradigme concernant la jeunesse qui appelle un maximum d'écoute pour en décortiquer le sens et délimiter les attentes.
Nos politiques placent la question des jeunes au centre de leurs discours, mais la place que ces jeunes occupent dans le champ politique national n'est pas à la hauteur des attentes. Peut-on attribuer cela au désintérêt des jeunes pour la politique ou à une volonté préméditée de les écarter du jeu politique ?
On est souvent affronté à un décalage entre l'idée et la force du réel, entre les différentes formes de mutations que connaît le Maroc et les efforts de compréhension des impacts de ces mutations sur le Marocain. Il s'agit d'une société « sous-analysée » face à une dynamique irréversible de transformations et de revendications. La société marocaine, à travers ses différentes composantes, et à travers sa jeunesse, s'exprime. La prise de parole change et diversifie de plus en plus de médiums qui ont besoin d'être, chaque fois, interpellés et compris. Le « problème » des partis avec les jeunes acquiert un aspect « complexe ». Quand les jeunes attendent la communication et l'écoute, ils affrontent des structures, en général, rigides ou guidées par des stratégies circonstancielles ou de manipulation. Les jeunes Marocains, aujourd'hui, sont devant un véritable dilemme : choisir l'engagement citoyen, moderne, créatif ou sombrer dans l'intégrisme, quels que soient sa rhétorique et ses mots d'ordre. Durant des années, les jeunes faisaient confiance aux élites de gauche. Aujourd'hui, ils commencent à en douter. Leur confiance, et cela interpelle tout le monde, tend vers des mouvements de l'Islam politique. Il est vrai que cette enquête, et d'autres qui ont été effectuées sur les jeunes, reflète une nouvelle conscience du choix des forces rationnelles, démocratiques où la pratique politique est considérée comme un service public et un engagement civique auprès des populations. Les jeunes semblent être victimes des dérapages que connaît l'action politique, comme la prolifération des partis, même de gauche, le manque de programmes clairs et différenciés, les résistances qui continuent à ne voir dans les jeunes qu'une machine de mobilisation ponctuelle ou une menace dans les conflits de positionnement dans les appareils.
Dans votre enquête, vous relevez un paradoxe selon lequel les jeunes étaient derrière le mouvement politique, social et culturel du Maroc moderne, alors que depuis ces deux dernières décennies, ils deviennent victimes de ce même mouvement. Les jeunes ont-ils été trahis par la gauche marocaine ?
On ressent une amertume forte chez les jeunes et un mécontentement aussi. Ce qui semble légitime si on prend en considération les structures socioculturelles profondes conservatrices qui orientent les comportements et les jugements, et les mutations rapides qui s'opèrent dans l'économie, la famille, la ville et la communication.
Les membres d'élite nationaliste avaient entre 18 et 24 ans. La génération de l'Indépendance était constituée de jeunes, mais durant les années 80 et 90, les jeunes commencent à se sentir « trahis» par les élites qui étaient censées intégrer leurs préoccupations dans leurs stratégies. Les déceptions et les blocages les poussent à s'engager dans toute forme d'exil et d'émigration, spatiale ou symbolique. Croire en l'illusion d'un salut au-delà des frontières ou opter pour la fiction de réactiver un idéal islamiste. Il s'agit d'un double dilemme. S'affirmer en tant que jeunes guidés par les principes de civisme, de liberté, de citoyenneté et de dialogue dans un champ de conflits avec les caciques qui s'accrochent à leurs privilèges politiques et matériels, ou fuir pour un ailleurs incertain, vers un eldorado qui devient de plus en plus impossible, ou dans un imaginaire d'adversité fondé sur une culture religieuse superficielle.
Quelle alternative s'offre à la jeunesse marocaine face à la "démission" notoire des partis de gauche? Les jeunes ne risquent-ils pas de tomber entre les mains de l'islamisme radical ?
Il est clair que l'histoire riche et mouvementée de ces dix dernières années a confirmé la crainte qui fut formulée durant les négociations pour formuler un gouvernement d'alternance en 1994. En tout cas, les jeunes enquêtés, sans exception, observent, malgré les discours répétitifs, qu'ils ne sont pas pris en compte, à cause des déficits d'encadrement au sein des partis de gauche. Et ils remarquent même qu'au lieu de mobiliser les potentialités de la jeunesse, ces partis fournissent des efforts énormes pour séduire les élus des partis qu'ils considéraient jadis comme « fabriqués par l'administration».
Le dynamisme des jeunes dans l'action associative peut-il être interprété comme une réaction à la passivité des partis politiques ?
Effectivement, l'engagement citoyen dans l'action associative constitue une des réactions aux résistances des structures d'accueil des partis politiques. C'est ainsi que des solidarités interpersonnelles se tissent, ça et là, à travers le Maroc, les émeutes, l'encrage d'une certaine culture de contestation, le mouvement des diplômés chômeurs, les massmedia, etc, autant d'indices qui dénotent, malgré les résistances, de la présence de prémices d'une société en marche qui attend plus d'équité et de reconnaissance.
Quel regard portent aujourd'hui les jeunes sur le Maroc? Croient-ils vraiment aux valeurs de progrès, de démocratie et de progrès ?
Les jeunes enquêtés, et même ceux qui ont participé dans les témoignages affichent, tous, une volonté forte pour intégrer les valeurs modernes de démocratie dans la dynamique institutionnelle et sociétale. Le Maroc est un pays de jeunes, qui emmagasine un capital illimité d'intelligences et de compétences. Ils veulent participer à une nouvelle culture de confiance et de reconnaissance. Ils réclament, comme le montrent les résultats de l'étude, plus d'écoute, de mécanismes d'intégration et de possibilités de participation pour l'élaboration de nouveaux rapports à l'Etat, à la société et à la nation. Les jeunes enquêtés constatent que l'Etat s'est engagé, effectivement, dans une approche différente d'entreprise et d'initiative. L'Etat marocain s'expose à la critique. Les deux rapports de «l'Instance Equité et Réconciliation» et du Cinquantenaire illustrent le nouvel esprit de l'élite dirigeante. C'est nouveau au Maroc. L'Etat marocain n'a jamais toléré un esprit critique comme il l'a fait avec ces deux rapports. Et par les Marocains seuls. Mais un travail de mobilisation et de conscientisation parmi les jeunes reste à faire, car ils ressentent un besoin réel de visibilité et surtout de confiance pour pouvoir s'engager dans le processus de construction.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.