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Alger exige le départ de quinze agents français : Paris envisagerait une riposte ciblée après les révélations sur les opérations clandestines algériennes
L'Algérie a sommé la France, dimanche 11 mai, de procéder «sans délai» au rapatriement de quinze agents français, envoyés en renfort ces dernières semaines, notamment dans le domaine de la gestion consulaire. Cette exigence intervient alors que Le Journal du Dimanche (JDD) a publié, dans sa dernière édition, une enquête accablante sur les opérations souterraines orchestrées par les services de sécurité algériens en France. Paris prépare une riposte, jugée «inévitable» par plusieurs sources diplomatiques. Une convocation sèche et un grief diplomatique C'est le chargé d'affaires français à Alger, Gilles Bourbao, qui a été convoqué, dimanche 11 mai, au siège du ministère algérien des affaires étrangères, en l'absence de l'ambassadeur. Les autorités algériennes ont dénoncé «les manquements flagrants et répétés de la partie française au respect des procédures.» Alger critique l'envoi d'agents auparavant titulaires de passeports de service, auxquels «ont été accordés des passeports diplomatiques pour faciliter davantage leur entrée en Algérie», selon les termes communiqués par la diplomatie algérienne. Ce durcissement fait suite à des mois de frictions, mais aussi à une série de révélations du JDD évoquant une implication directe du président Abdelmadjid Tebboune et de ses services dans des tentatives d'intimidation et de neutralisation d'opposants exilés en France. La France accable Alger d'opérations clandestines L'enquête du JDD rapporte que le Quai d'Orsay a saisi les autorités algériennes pour demander la levée de l'immunité du premier secrétaire de l'ambassade d'Algérie à Paris et du consul adjoint de Créteil. Ces deux agents sont soupçonnés par la justice française d'avoir activement participé à la tentative d'enlèvement d'un opposant algérien très médiatisé, connu sous le nom d'Amir DZ. Le JDD révèle qu'en avril 2021, une magistrature parisienne de haut rang a été saisie pour s'opposer à une tentative de transfert secret d'Amir DZ vers l'Algérie, sur fond d'accusation de «financement du terrorisme.» Selon un juge cité dans les documents, «certaines demandes étaient grossièrement truquées. Il y avait des faux. C'était une tentative de manipulation de la justice française. Indigne d'un Etat.» Une traque menée par l'entourage présidentiel Le quotidien dominical détaille le rôle central du président Tebboune, décrit comme obsédé par les opposants. «Abdelmadjid Tebboune a fait une fixation sur les opposants vivant parfois jusqu'à l'obsession», écrit le JDD, citant des proches et d'anciens collaborateurs du chef de l'Etat algérien. Un ancien ministre témoigne, de manière tranchante : «Il est très impulsif (...) Quand on le critique, même discrètement, même indirectement, il entre dans une logique de vengeance.» Des extraits d'échanges internes cités dans l'article accréditent cette perception : «Son problème est qu'il pense que celui qui est contre lui, même un ami, devient son ennemi personnel.» Sadek, le bras armé de la répression extérieure Le général Sadek, chef de la DGDSE (renseignement extérieur algérien), est identifié comme «l'homme à tout faire du régime», selon un conseiller cité par le JDD. L'article ajoute : «C'est le général Sadek qui a tout coordonné dans l'affaire Amir DZ.» Il aurait personnellement ordonné le déclenchement d'une cellule clandestine opérant depuis l'ambassade d'Algérie à Paris. Parmi les documents consultés par le journal, figurent aussi les noms du colonel Souhil Zerquiine, alias Mouad, et du général Mehraz Djebbar, ancien patron de la DGDSE, tous deux cités comme superviseurs d'une série d'opérations clandestines contre les dissidents. «Il s'agissait de surveiller, corrompre, intimider ou neutraliser les activistes», affirme une source française de haut niveau citée par le journal. Les preuves matérielles : écoutes, traqueurs et adresses IP La justice française s'appuie sur des preuves matérielles, notamment un traqueur GPS retrouvé dans la voiture d'Amir DZ, que le JDD publie en photographie. Le même dispositif aurait permis de localiser l'activiste à plusieurs reprises, y compris lors de son passage à Berlin, où il avait sollicité la protection des autorités allemandes. Selon les enquêteurs, les services algériens avaient recours à des adresses IP diplomatiques depuis l'ambassade d'Algérie pour envoyer des messages chiffrés à destination des agents opérant sur le terrain. «Trois types de documents identiques ont été retrouvés à Paris et à Lisbonne», indique un magistrat cité anonymement.