En perte de vitesse et de créativité, Motorola ? Les chiffres se lisent toujours à divers niveaux. Le point avec le responsable marketing du constructeur au Maroc. Challenge Hebdo : est-il vrai que Motorola a, en ce moment, des problèmes de créativité en termes de design dans les nouvelles gammes? Imad Mouhib : la créativité au niveau du design est quelque chose de très subjectif. Motorola a inventé la tendance vers les portables les plus tendance, notamment le design clamshell (clapet «Star Tak»). On a aussi inventé le concept du portable ultra-fin avec les L6 & L7 SLVR. Aujourd'hui, nous continuons non seulement à innover dans le design des produits, mais aussi dans les technologies qu'ils embarquent. Exemple du premier téléphone mobile haute définition (30 images par secondes) qui incarne la créativité au sens le plus large. C. H. : après le succès consommé de la gamme RAZR, pensez-vous lancer de nouvelles lignes pour faire redécoller les ventes? I. M. : la gamme RAZR est devenue une référence avec plus de 200 millions d'unités vendues. Près de quatre après ce lancement, il est très difficile de faire oublier ce succès planétaire... Aujourd'hui, nous adoptons une approche différente dans la recherche et développement. En effet, il est révolu le temps où un téléphone mobile «prétendait» savoir tout faire et répondre à tous les types de besoins. Notre nouvelle stratégie consiste à mettre au point d'excellents produits ciblant des utilisations très précises : multimédia, musique, productivité, etc. Dans ce contexte, les nouvelles plateformes de software - notamment le Linux-Java qui est une «open source» - autorisent des performances toujours plus élevées. C. H. : quels arguments comptez-vous mettre en avant pour contrer la montée en puissance de vos concurrents au Maroc? I. M. : le marché national n'est pas coupé du reste du monde et la compétition est donc la même, au Maroc comme ailleurs. Nous sommes présents sur le marché des télécoms depuis la création de notre groupe en 1928. Depuis, nous avons toujours développé un business équilibré entre les activités du mobile et le reste : networks, radio-communications, governments & enterprises… Ceci nous donne un avantage certain dans la course pour la «convergence» dont nous avons fait notre vision sous le thème générique «Seamless Mobility», ce qui signifie mobilité sans interruption. C. H. : d'après le cabinet international Gartner, Motorola vient de perdre une place au classement mondial, devenant numéro 3 derrière Samsung (2ème) et Nokia (1er). Que compte faire le constructeur pour remonter la pente? I. M. : la notion de parts de marché peut être trompeuse parfois. Un numéro 4 en termes de volume peut être numéro 2 en termes de valeur ou inversement... Il est vrai que, selon les résultats déclarés, nous avons «shippé» en 2007 moins de quantité qu'en 2006. Mais les parts de marché doivent être lues dans le long terme. il serait injuste de ne commenter que les chiffres des deux derniers trimestres. Motorola est resté leader depuis 1983 jusqu'à 2006. Cette légitimité historique ne saurait être mise en question. C. H. : quelle appréciation faites-vous sur le marché marocain des télécoms, s'agissant des opérateurs institutionnels avec lesquels vous travaillez, Maroc Telecoms, Méditel et Wana? I. M. : on a la chance d'avoir un marché très dynamique où les trois opérateurs représentent une locomotive qui tire non seulement le marché des télécoms, mais aussi toute l'économie marocaine. C'est un marché hyper-concurrentiel où le gagnant final reste le consommateur. C. H. : votre sentiment sur le marché informel, surtout la filière de Derb Ghallef, qui porte un coup terrible aux constructeurs... I. M. : le marché informel ne concerne pas que la téléphonie, mais aussi l'électroménager, le textile, l'audiovisuel… Tous ces secteurs sont forcément plus ou moins affectés par ce fléau. Compte tenu du dynamisme et de l'attrait qui caractérisent ce marché, sans doute assiste-t-on à la reconversion de pas mal de petits commerces en vendeurs ou en réparateurs de téléphones mobiles. Le fait est qu'il s'agit désormais d'une donne du marché avec laquelle il faut composer, qu'il faut utiliser comme un bon baromètre parce que, souvent, on y apprend énormément de choses sur les ressorts du marché. Cela représente naturellement un manque à gagner pour le marché officiel, mais sans représenter, à mon avis, une réelle menace.