Le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Chems-Eddine Hafiz, fait désormais l'objet d'une vigilance accrue de la part des services de l'Etat français, en raison d'un positionnement jugé équivoque. Défenseur proclamé des principes républicains, il est soupçonné de tenir un discours double, conciliant posture institutionnelle et familiarités avec des réseaux d'inspiration frériste. Sa proximité ancienne avec le régime algérien, qu'il n'a jamais démentie, alimente les doutes sur la nature de son influence et sur ses fidélités profondes. Le recteur a vivement désapprouvé un rapport officiel portant sur l'influence des Frères musulmans, critiquant ce document qui vise, selon lui, non une mouvance idéologique, mais la religion musulmane elle-même. «Une idéologie politique, pas une religion», lit-on sous sa plume, dans des propos rapportés par Le Journal du dimanche (JDD). Ce désaccord frontal avec une analyse jugée rigoureuse par les services concernés a provoqué une onde de perplexité jusque dans les cercles gouvernementaux. «Républicain rassurant sur les plateaux, mais figure d'influence dans certaines mosquées où il verrouille les discours», confie en substance le JDD. Selon les éléments recueillis, Chems-Eddine Hafiz entretiendrait, de manière régulière et suivie, des rapports discrets avec des acteurs de l'appareil diplomatique algérien à Paris, lesquels font l'objet d'un suivi spécifique par les services du renseignement. «Le recteur sous surveillance», titre sobrement Le JDD dans sa dernière édition, qui évoque un climat de méfiance croissante à l'égard d'un homme dont les alliances paraissent désormais trop nombreuses pour ne pas interroger. La DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure) s'attacherait, sans doute, à démêler les liens tissés par le recteur avec des réseaux religieux installés en France, mais également connectés, selon plusieurs sources, à des cercles d'influence algériens. L'institution parisienne, fondée en 1926, se retrouve ainsi exposée à une interrogation plus large sur la légitimité doctrinale de ses porte-voix.