Le secteur du pneumatique est sous les projecteurs avec l'annonce d'un nouvel entrant. Zoom sur l'opérateur chinois Shandong dans ce secteur, qui cherche à s'étendre au-delà de son marché local. Le groupe chinois Shandong Yongsheng Rubber prévoit de construire une usine de pneus automobiles au Maroc, a rapporté le site spécialisé Tyrpress. Les travaux de construction de cette usine devraient commencer dans six mois, selon les termes de la demande d'implantation déposée par le groupe, qui fabrique les marques de pneus Tracmax et Road King, a-t-on précisé de même source. Fondé en 1986, Shandong Yongsheng Rubber Group Co., Ltd. est l'un des principaux fabricants chinois de pneumatiques. Basé à Guangrao, dans la province du Shandong, le groupe emploie plus de 6 000 personnes et dispose d'actifs fixes évalués à 1,56 milliard de yuans. Les produits de Yongsheng Rubber sont commercialisés sous plusieurs marques, dont DOUPRO, ROADMAX, ROTALLA et TRACMAX. Ces marques sont présentes dans plus de 80 pays, couvrant les marchés d'Europe, d'Asie, du Moyen-Orient, d'Afrique, d'Océanie et d'Amérique. Lire aussi | Pourquoi la Chine investit massivement dans les usines marocaines En 2021, l'entreprise a exporté 1,8 million de pneus radiaux pour camions et 12 millions de pneus semi-acier, générant un chiffre d'affaires de plus de 2,7 milliards de yuans. Dans ce grand marché mondial en constante mutation, le groupe a décidé ces derniers mois de se rapprocher des pays d'Afrique du Nord afin d'être plus proche de ses marchés clés en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique. Il n'est pas seul : plusieurs équipementiers automobiles et fabricants de composants de batteries électriques chinois, dont Sentury Tire, Shandong Daye, Hunan Zhongke Shinzoom et CNGR Advanced Material Company, ont annoncé ces dernières années des investissements au Maroc. Au-delà de son positionnement stratégique, le Maroc dispose d'une capacité de production qui dépasse les 700 000 véhicules par an et d'un parc automobile national de près de 4 millions d'unités. Le pays semble ainsi offrir un terreau favorable à l'émergence de filières complémentaires. Dans les détails, le groupe chinois prévoit de lancer une usine qui aura une capacité de production initiale de 6 millions de pneus par an, avant d'atteindre progressivement 12 millions d'unités. Bien que cela soit une bonne nouvelle sur le plan économique, cette entrée relance le débat sur le développement du marché local. Lire aussi | Chine. Les atouts d'une «ancienne-nouvelle puissance» en «réémergence» « Le projet chinois pourrait ainsi jouer un rôle de catalyseur. Car au-delà de l'implantation d'une seule usine, c'est bien la reconstruction d'un écosystème complet — matières premières, compétences, logistique — qui est en jeu », nous confie une de nos sources. Lumière sur un secteur qui cherche sa voie... Malgré le dynamisme de son marché automobile, le Maroc demeure absent sur certaines niches. C'est le cas du pneumatique, qui, dans le passé, avait commencé à construire un écosystème. Le pays disposait de deux usines à Casablanca : un site de Goodyear (fermé en 2006) et un autre de General Tire (fermé en 2002). Une grande partie de leur production était destinée à l'export. Hélas, l'aventure n'a pas duré puisque les deux usines ont cessé leurs activités. Et pour cause : les marchés parallèles, la taille du parc automobile... « Aujourd'hui, il faut bien admettre que la situation a beaucoup changé. Avec une capacité de production de véhicules en forte croissance, le Maroc peut relancer cette filière. Outre l'approvisionnement des constructeurs, l'activité peut également fournir le marché du renouvellement local, puisque le pays regroupe près de 4 millions de véhicules. D'autres filières peuvent être développées (rechapage) et donner une valeur ajoutée au secteur automobile », nous confie Sylvain Borré, ex-DG de Continental Tyre North Africa. Lire aussi | Nvidia veut ouvrir un centre de R&D en Chine, selon le Financial Times « Certes, le secteur n'arrive pas à décoller au niveau de la production locale, mais en termes de commerce, que ce soit au niveau de la première monte ou du remplacement, le secteur fonctionne plutôt bien, et beaucoup mieux que dans les autres pays de la région. Et si on observe le marché des voitures de tourisme, on se rendrait compte qu'il est beaucoup plus grand qu'en Tunisie ou qu'en Algérie. » Et de poursuivre : « Cependant, vous avez raison, au niveau industriel, il n'y a pas — ou plus — d'implantation. Dans le passé, il y a eu Continental par l'intermédiaire de la marque General Tire, il y avait aussi Goodyear, Michelin. » Le rechapage comme alternative « Le rechapage des pneus de tourisme est en train de se démocratiser en Europe. Et comme beaucoup de phénomènes, cela déteint forcément sur les marchés d'Afrique du Nord », explique Borré. Aujourd'hui, avec une unité de production timorée depuis les fermetures des sites de General Tire et Goodyear, le marché paie au prix fort des pneus importés. Alors le rechapage se positionne comme une alternative très compétitive au niveau des prix. Dans ce domaine, Imperial Pneu (groupe local) s'est imposé comme un leader. Le groupe dispose d'une usine de rechapage de pneus poids lourds dans le quartier industriel de Aïn Sebaâ. Cette unité moderne, d'un montant d'investissement de 20 millions de dirhams et occupant une surface d'exploitation de 1 600 m2, est dédiée uniquement aux poids lourds et bénéficie d'une alliance technologique avec la multinationale de fabrication de pneumatiques Goodyear International.