Bank Al-Maghrib adopte une stratégie réactive pour répondre aux besoins de financement. Mais en temps de crise, la baisse des taux d'intérêt reste insuffisante pour déclencher une dynamique économique. Le point avec Otmane Gair, économiste, président du Centre d'études et de recherches en gouvernance et politiques publiques. - Finances News Hebdo : Est-ce que la réduction du taux directeur, en le répercutant sur les taux débiteurs, a un impact sur l'économie réelle ? - Otman Gair : D'après les données de la Banque centrale, le crédit bancaire a progressé de 7,5 % à fin juillet contre seulement 7,1% durant le trimestre précédent. Cela dit, théoriquement on peut conclure que l'abaissement du taux directeur peut avoir un impact sur l'économie réelle, notamment à travers les facilités de trésorerie et les prêts à l'habitat. Sauf qu'en situation de crise, la baisse des taux d'intérêt encourage l'emprunt, mais reste insuffisante pour déclencher une dynamique économique qui dépend, elle, de facteurs psychiques des investisseurs, de la confiance des consommateurs et de l'existence d'une visibilité sur le moyen et le long terme. - F. N. H. : Ne serait-il pas judicieux, aujourd'hui, de soutenir le système financier en réduisant son déficit de liquidité et, par conséquent, son coût de refinancement ? - O. G. : Le déficit de liquidité n'est pas seulement une question de taux d'intérêt, ou de réserves obligatoires ; il s'agit aussi d'une question de confiance des dépositaires dans le système bancaire. - F. N. H. : Comment l'abaissement de la réserve obligatoire des banques peut-elle aider à stabiliser le système bancaire ? - O. G. : L'abaissement de la réserve obligatoire offre aux banques de nouvelles possibilités de financement de l'économie et, par voie de conséquence, limite le risque de crise de liquidité. Bank Al-Maghrib a baissé dans ce sens la réserve obligatoire de 6% à 4%. La Réserve fédérale américaine, depuis le début de la crise en 2008, a injecté plus de 3.000 milliards de dollars. Au Maroc, la Banque centrale est dans son rôle. Le problème de liquidité existe encore, mais l'intervention de Bank Al-Maghrib doit être remise dans son contexte. Ce qui est en train d'être fait. Elle est réactive par rapport à ce qui se passe dans le marché pour répondre aux besoins du financement. - F. N. H. : Selon vous, quel est l'impact de la politique de Bank Al-Maghrib sur le système bancaire et, par conséquent, sur l'économie marocaine ? - O. G. : La politique monétaire joue un rôle inéluctable en matière de régulation et de stabilisation du système bancaire. L'action de Bank Al-Maghrib est parmi les plus crédibles dans la région dans la mesure où son autonomie lui garantit une efficacité de ses mesures en matière de promotion de la croissance et de la stabilité des prix. C'est dans ce sens que les décisions de baisse du taux directeur ou du niveau des réserves obligatoires s'inscrivent. Propos recueillis par S. Zeroual