Les villes, au regard de leur importance, ont toujours été avantagées concernant laccès à leau potable. Le monde rural a, quant à lui, été au centre des préoccupations étatiques chaque fois quil sagissait de le doter de moyens capables de lui assurer une irrigation optimale des terres agricoles, alors que laccès à une eau potable saine na été que rarement pris en compte. Jean Baudrillard, sociologue et philosophe français, a dit : «le plaisir de l'eau sur les lèvres est supérieur à celui de boire». Une si belle citation ne saurait être comprise dans toute sa profondeur que par une personne dont lexistence est liée à leau au quotidien. En effet, limportance que revêt leau, cet élément incontournable pour toute forme de vie, surtout dans les milieux ruraux, est indéniable. Question déquilibre Depuis lindépendance du Royaume, les gouvernements qui se sont succédé nont cessé dériger, en priorité, lapprovisionnement du monde rural en eau. Feu Hassan II, soucieux de limportance dune telle denrée, avait dressé toute une vision autour de «la construction des barrages» comme solution pérenne pour anticiper les périodes de sécheresse qui peuvent frapper le Royaume de plein fouet. Toutefois, lune des critiques que lon peut avancer à légard de toutes les démarches entreprises ultérieurement concernant lapprovisionnement du monde rural en eau tient au fait que la plus importante des priorités relevait de lirrigation. Autrement dit, laccès à une eau potable saine passait en second lieu. Certes, laccès à leau potable est difficile à la campagne, mais force est de constater que le rythme démographique des villes, conjugué au phénomène de la «marchandisation de leau» imposent des changements économiques, politiques et sociaux qui risquent daggraver la situation de laccès à leau potable essentiellement dans les milieux ruraux. La seule alternative qui doit être de mise le cas échéant tourne autour dune bonne gouvernance effective et rationnelle de leau et dune allocation équitable des ressources hydriques. Il est à cet égard incontournable détablir des équilibres entre les milieux ruraux et ceux citadins. Toute politique, toute action, toute démarche liée à la gestion de leau et à son accès et ne prenant pas en compte la sécurité alimentaire, sanitaire, environnementale et économique tout en tenant compte des disponibilités des ressources hydrauliques à longue échéance, est vouée à léchec. Retour aux sources Lenjeu est de taille : une eau disponible, de qualité parce que saine, consommée avec prudence, est collectée et assainie. Concrètement, partout dans le Royaume, il sagit de parer aux inégalités daccès, dassurer, dorganiser et de pérenniser une répartition entre les différents secteurs, de protéger quantitativement et qualitativement cette ressource devenue plus rare et plus vulnérable. La gestion et la valeur de leau sont indissociables du développement du monde rural dans le Royaume. La dimension culturelle est en quête dune réhabilitation. Le moment est venu de retourner à cette dimension culturelle que revêtait leau dans les douars et autres villages marocains. Point dassemblée pour la «jmaâ», véritable «parlement» assurant la gestion du quotidien de la communauté, le puits ou la source au Maroc ont toujours été le point central vers lequel convergent toutes les activités sociales, économiques ou politiques de la tribu, du douar ou du village. Laccès à leau potable dans le monde rural nest plus à discuter. Ce qui doit être présent dans les esprits dorénavant, est que les citoyens des milieux ruraux ont droit à une eau courante et assainie. Il y va de leur santé, de leur bien-être et de leur stabilité. Il y va de lavenir du Royaume.