La Loi de Finances 2014 a abouti au rejet de 188 propositions d'amendement. 31 ont été adoptées. L'instauration d'une taxe à la première immatriculation d'une voiture de luxe a été amendée. La profession estime que le chiffre d'affaires sur ce segment de voitures risque de baisser de 30% à 40%. Le problème est qu'une telle mesure risque d'avoir l'effet inverse par le biais d'une réduction des recettes fiscales. Elle peut favoriser, par ailleurs, le développement de l'informel. Détails. La commission des Finances a achevé le vote de la première et de la seconde partie du projet de Loi de Finances 2014. Un projet empreint d'austérité à cause de ses mesures budgétaires restrictives. Il a fait jaser le milieu des affaires et le Patronat, en particulier, parce qu'il risque de prendre en otage la croissance de l'économie. La lecture du budget fait ressortir, noir sur blanc, qu'il faut serrer la ceinture pour arriver à joindre les deux bouts. Et même les amendements apportés au PLF 2014 n'augurent rien de bon. Au moment où nous mettions sous presse, le vote de la première partie (recettes) du projet de Loi de Finances 2014 a abouti au rejet de 188 propositions d'amendement. 31 ont été adoptées (9 émanent de la majorité, 11 du gouvernement et 11 de l'opposition). Du côté opposition, c'est l'Istiqlal et l'USFP qui ont eu, le plus, gain de cause dans la mesure où chacun d'eux a pu passer quatre amendements. Le PAM en a passé 2 et l'UC un seulement. Comme attendu, la liste des requêtes du PI était longue. Sur le registre de la fiscalité, le PI demande la révision de l'IR dans la perspective d'exonérer les salaires bas et d'augmenter l'impôt sur les hauts revenus. Le parti de la balance demande, par ailleurs, l'imposition progressive du secteur agricole tout en donnant des données précises sur le secteur et l'impact généré par la taxation. Aussi, la fiscalisation des provinces du Sud est-elle sollicitée. Le parti revendique également son soutien aux diplômés chômeurs en demandant 3.000 postes d'emplois pour cette catégorie. L'USFP, à son tour, exhorte dans ses différents amendements la ré-industrialisation du pays à travers la création d'une caisse pour le développement industriel à même d'accompagner les grands projets. Les Usfpéistes demandent au gouvernement d'augmenter la TVA à 30% pour les jets et avions privés ainsi que les yachts et les voitures d'une valeur de plus de 60 millions de centimes. Il est également question de créer une mutuelle pour les métiers d'artisanat. Le parti a également demandé l'annulation de la hausse de la TVA sur certains produits alimentaires, notamment le riz et les conserves de poissons, le sel et les dattes. L'USFP affiche enfin son opposition à la disposition consistant à l'achat des agréments du transport par l'Etat. Le parti pense plutôt que le gouvernement doit se limiter à faire respecter les cahiers des charges aux professionnels du secteur. Bref qu'est-ce qui a été retenu par le tamis ? Quid des principaux amendements ? La taxe aérienne a été adoptée en commission. Cette mesure va entraîner dans son sillage un renchérissement du prix des billets d'avion au moment même où l'on encourage la mobilité notamment des étudiants, hommes d'affaires... Un autre amendement et pas des moindres attire l'attention : il s'agit de l'instauration d'une taxe à la première immatriculation d'une voiture de luxe. (voir P6). La question qui se pose d'emblée est : cette mesure ne risque-t-elle pas de se traduire par une entrave au développement du secteur automobile ? A rappeler qu'effectivement dans le PLF 2014, austérité oblige, le gouvernement n'autorise pas l'Administration à acquérir des voitures et plus précisément celles dont la valeur dépasse 300.000 DH. Ajoutons à cela, le fait que la TVA sur achat de voiture de tourisme n'est pas récupérable. Aussi, les amortissements ne sont-ils pas entièrement déductibles. Aujourd'hui, une nouvelle taxe vient couronner le tout. L'Etat trouve apparemment dans le secteur automobile une vraie niche fiscale. Que pense l'AIVAM de cette armada de mesures qui se sont cumulées au cours des dernières années et de cette dernière taxation en particulier ? D'après la profession, un tel amendement va porter préjudice à ce segment de voitures. Les importateurs sont quasiment unanimes que le chiffre d'affaires sur ce segment risque de baisser de 30% à 40%. Le comble c'est qu'elle a été introduite sans aucune concertation avec les importateurs des voitures de luxe sachant que ces derniers ont quasiment bouclé leur programme de commandes pour l'année 2014. Pris au dépourvu, ils n'ont pas pris en considération cette nouvelle variable dans la gestion courante des commandes. D'ailleurs, ils n'ont pas eu le temps de réagir parce que la décision a été prise du jour au lendemain et votée le jour suivant. Sur le plan fiscal, cette mesure peut avoir l'effet inverse. Au lieu d'aider à renflouer les caisses de l'Etat, elle risque de se traduire par une baisse de recettes. Il ne faut pas perdre de vue que lesdits importateurs participent par le biais de la TVA, de l'IS et de l'IR. Au demeurant, si les importateurs sont contraints de réduire leurs achats et si les ventes baissent, les recettes afférentes à ces trois types d'impôt vont fondre comme neige au soleil. Pis encore, s'inquiète la profession, cette mesure risque de bousculer les habitudes et contribuer davantage au développement de l'informel qui se traduit par une surfacturation et une évasion fiscale. La profession n'est pas contre une taxation, mais elle insiste fortement sur la révision du taux d'imposition dans une logique plus commerciale et la révision du mode opératoire. Cette mesure, à l'instar des précédentes, risque de provoquer la défiance d'une profession qui, jusqu'à aujourd'hui, fait preuve d'organisation, de développement et de structuration. Les pénalités de retard Autre mesure amendée, celle relative aux pénalités de retard payées par une entreprise, dans le cadre d'une relation commerciale avec une entreprise. Celles-ci seront considérées comme des charges et ouvrent droit à déduction. A un moment où les opérateurs croient à un ajournement du projet de loi sur le retard de paiement, cette mesure vient raviver les enjeux de l'application des intérêts de retard. Concernant l'amendement qui vise à introduire des modifications dans l'IR, en créant un impôt forfaitaire auquel peuvent être assujettis les auto-entrepreneurs, une telle disposition peut encourager cette catégorie à l'investissement et à la création d'entreprise. Pour ce qui est du maintien de l'exonération sur les bougies, force est de constater que rares sont les ménages, avec l'électrification du monde rural, qui les achètent encore. Par contre, les bougies utilisées dans le cadre des fêtes auraient pu être imposées. Les principaux amendements, tels qu'ils se présentent actuellement, sont mitigés et ne changent pas grand chose dans le PLF 2014. La TVA sur les frais de publicité de l'alcool demeure récupérable. Or, si on prend l'exemple de l'Hexagone, la TVA sur les frais de publicité de l'alcool ou tout produit nocif à la santé n'est pas récupérable. Aussi, les dépenses de publicité ne sont-elles pas déductibles au niveau de l'IS. Une niche qu'aurait pu explorer, entre autres, le gouvernement. Une chose est sûre : le PLF 2014 reste un peu fidèle à sa première mouture. Le gouvernement veille à rationaliser la dépense publique à travers la limitation des constructions et l'achat de véhicules neufs. Ajoutons à cela la suspension des marchés publics qui, comme souligné dans notre précédente édition, n'est pas exempte d'incidences sur l'investissement et l'emploi, principaux leviers de la croissance économique. Et pour combler le tout, le gouvernement, en voulant mettre un terme à la problématique du butoir, a donné un coup de massue à la tirelire des ménages à cause de la hausse du taux de TVA de certains produits. Dire que la croissance, en 2014, sera tirée par la demande interne, serait un simple leurre. Le comble est que la masse salariale et les charges de compensation vont continuer de peser de tout leur poids sur le budget. Force est de constater que la crise internationale a mis à rude épreuve les finances publiques. Et depuis, tout le monde s'accorde à dire que le Maroc a besoin d'un nouveau modèle économique, voire une austérité intelligente et bien réfléchie. Le gouvernement ne l'entend pas encore de cette oreille.