Une étude publiée par Bank Al Maghrib pronostique un retour de l'économie marocaine au niveau pré-COVID mais pas avant plusieurs années. Appuyés par le FMI, des cherches de BAM ont dressé une pré-évaluation de l'impact de la pandémie COVID-19 et des résultats des mesures politiques adoptées dans le royaume. « Le scénario ambitieux d'assainissement budgétaire n'a naturellement pas anticipé la pandémie. Les réformes fiscales prévues ont ainsi été temporairement mises en veilleuse et l'attention s'est portée sur politiques pour atténuer l'impact de la COVID-19 », fait ressortir une étude, fruit d'une conjointe collaboration entre les chercheurs de BAM (Aya Achour et Omar Chafik) et ceux du Fonds Monétaire International (FMI) (Aleš Bulíř et Adam Remo). « Nos simulations, fondées sur des hypothèses (actions des autorités marocaines au cours du premier semestre 2020 avec certaines conjectures sur le court et moyen terme tant à l'étranger que dans le pays), suggèrent que même avec une combinaison budgétaire et monétaire bien coordonnée, le retour au niveau de PIB réel pré-COVID nécessitera plusieurs années. Aussi, la dette publique connaîtra une augmentation durable liée à la pandémie », expliquent les auteurs du document, soulignant : « Outre les hypothèses évidentes de demande externe, nous émettons également un jugement sur les perturbations de l'offre à moyen terme dues à la pandémie. Et ce que ce soit au niveau des restrictions de voyage touristique s'étendant jusqu'en 2021, voire 2022, qu'au niveau de la baisse soutenue de la demande pour les exportations marocaines ». En clair, le ralentissement de la croissance de la productivité et les perturbations des chaînes d'approvisionnement réduiront le potentiel Croissance du PIB pendant un certain temps. Dès le début, pour combattre la COVID-19, les autorités marocaines ont imposé un confinement dont la rigueur était plus que bénéfique pour limiter la propagation. Mais la médaille a son revers puisqu'il y a eu un impact négatif aux conséquences fortes sur l'activité économique, apprend-on dans le rapport qui met l'accent sur quatre parties du scénario post COVID-19, à savoir la demande intérieure et facteurs d'offres; les facteurs de l'offre et de la demande externes; évolution des marchés des produits de base; et les facteurs budgétaires. Un confinement réussi mais aux conséquences lourdes Pour ce qui est du premier axe, l'étude relève que le lock down strictement appliqué a eu le double effet de l'offre et de la demande des autres pays. « Au moment de l'élaboration de l'étude, la productivité totale des facteurs non agricoles était selon les estimations, en baisse d'environ 5% et le taux de participation au travail d'environ 4% sur la base d'enquêtes auprès des entreprises (HCP). En ce qui concerne la demande, les ménages et les entreprises ont réagi à l'incertitude générale accrue en réduisant la consommation (d'environ 3%) et investissement (d'environ 10%) », détaillent les experts qui précise également que : « Pendant le confinement, selon l'enquête nationale de juillet 2020, 84% des entreprises marocaines ont interrompu leurs activités. Hôtels, restaurants et industries textiles ont été totalement fermés en baisse et près de 50% de tous les répondants ont déclaré qu'il leur faudrait encore un an ou plus pour atteindre les niveaux de production pré-pandémique ». Et de rappeler, selon les données macroéconomiques mi-2020 publiées par HCP, que le PIB non agricole de 2020 devait baisser de 5,25%, année après année; le taux de chômage devait grimper à 12,25 %; et les heures travaillées en moyenne par semaine devaient plonger de 45 à 22 heures. S'agissant du second axe, soit les facteurs externes, l'étude note que le ralentissement des pays partenaires commerciaux a interrompu les canaux d'approvisionnement des fabricants du Maroc, en particulier dans le secteur automobile. « Le manque de voyages internationaux a frappé de plein fouet le tourisme et pour 2020, les revenus devraient baisser de 60 à 70%. Récessions dans les pays hôtes des travailleurs marocains et en conséquence, par rapport aux transferts de fonds, ils devraient être en baisse de 25 % », ajoute-t-on avant de préciser pour les exportations, que le prix international des phosphates, a diminué d'environ 15 % en 2020 et pour les importations qu'en 2020, les prix du pétrole étaient inférieurs d'environ 33% et les prix des denrées alimentaires d'environ 7%. Demande d'importations contractée « L'évolution des soldes budgétaires reflète quatre évolutions majeures, à savoir l'activité économique a ralenti, tout comme la collecte des recettes, en particulier les recettes non fiscales et les taxes à la consommation ; les dépenses de santé ont augmenté, principalement pour la prévention, le dépistage et le traitement COVID ; les transferts monétaires pendant le confinement aux ménages vulnérables ont bondi de près de 1,5% du PIB ; et le gouvernement a réduit la plupart des dépenses non urgentes », ont fait savoir les analystes, estimant que globalement l'impulsion budgétaire n'a compensé que partiellement le déficit de la demande privée – au prix de ratio dette / PIB projeté à environ 75% en 2020. « Le gouvernement marocain a choisi d'atténuer l'impact économique et social de la crise COVID principalement par le biais de transferts monétaires et garanties. Quant à la position politique budgétaire pour 2021, nous supposons ainsi une orientation budgétaire globalement neutre qui stabiliserait la dette publique à environ 75% du PIB, les transferts étant l'élément résiduel de notre simulation », signalent-ils. Toujours selon la même source, l'impact de la pandémie sur le Maroc dépend essentiellement des hypothèses sur sa durée dans les pays industrialisés parce que la demande d'importations de l'UE et des Etats-Unis devrait rester contractée et que le prix du phosphate ne devrait pas se redresser avant 2025. En conséquence, l'impact sur le marché marocain est susceptible de durer longtemps. Et de conclure que compte tenu du l'ampleur du choc, le taux de croissance ne serait pas suffisant pour que le PIB revienne à son niveau d'avant COVID-19 que d'ici 2030.