La brigade nationale des douanes a ouvert une enquête approfondie sur l'implication de plusieurs importateurs dans la revente illégale de produits exonérés dans le cadre du régime du "carnet d'admission temporaire". Ce dispositif douanier permet l'importation de matières premières sans acquittement des droits et taxes, à condition qu'elles soient réexportées après transformation, conformément aux conditions strictes imposées par ce régime. Selon des sources bien informées contactées par Hespress, les investigations ont été déclenchées suite à la réception d'informations signalant que certaines entreprises importaient des matières premières sans payer de droits douaniers, puis les écoulaient directement sur le marché local, en totale infraction avec les règles dudit régime. Les premières vérifications ont ciblé des petites et moyennes entreprises opérant dans des secteurs industriels jugés stratégiques, notamment le textile, qui auraient engrangé des profits indus en commercialisant des marchandises bénéficiant d'exonérations douanières. Les contrôleurs douaniers s'appuient sur des données précises fournies par la cellule de veille et de gestion des risques de l'administration des douanes, ainsi que sur des informations actualisées provenant du service central de contrôle des opérations commerciales. Ces éléments visent à examiner en détail les documents relatifs à des opérations d'importation jugées suspectes, menées par des entreprises bénéficiant du régime du "carnet d'admission temporaire", via les ports de Casablanca, Tanger Med et Agadir. La démarche d'audit a été enclenchée à la suite d'alertes émanant de marchés locaux, faisant état d'un flux inhabituellement élevé de certaines matières premières, incompatible avec les niveaux de production et les volumes d'importation légale enregistrés. Les investigations ont permis d'identifier plus de 160 entreprises soupçonnées d'avoir recours à ce type de fraude douanière. Certaines entreprises basées à Casablanca ont tenté de tromper les agents de la douane lorsque ces derniers ont demandé des explications sur le sort de quantités importantes de matières premières onéreuses (tissus, accessoires de couture) importées dans le cadre du régime temporaire et bénéficiant d'une exonération provisoire. Ces sociétés ont affirmé que les marchandises écoulées sur le marché étaient considérées comme des rebuts, en raison de leur détérioration lors du transport depuis l'étranger. Cependant, l'examen des déclarations d'exportation ainsi que la vérification du taux de détérioration admis pour chaque secteur — déduit des quantités importées — ont révélé des manquements graves. Plusieurs unités industrielles ont été reconnues coupables d'infractions douanières majeures. Des dossiers ont d'ores et déjà été transférés aux services du contentieux et du recouvrement, en vue de négocier des règlements à l'amiable et de procéder au paiement des amendes et pénalités encourues. Le régime du "carnet d'admission temporaire", à l'instar des autres régimes économiques douaniers, fait l'objet d'un suivi strict de la part de l'Administration des Douanes, notamment à travers la plateforme informatique "BADR", qui permet de détecter toute tentative de manipulation ou de fraude. Le système utilise des algorithmes sophistiqués capables d'identifier les cas suspects, en complément des signalements transmis à la brigade nationale. Par ailleurs, d'autres entreprises ont tenté de justifier le non-respect de leurs obligations par l'incapacité à exporter leurs produits, invoquant la baisse de la demande extérieure causée par la crise économique qui frappe bon nombre de pays partenaires du Maroc. Ces difficultés ont particulièrement affecté les destinations traditionnelles à l'exportation, comme la France et l'Espagne. Toutefois, cette conjoncture défavorable ne les exonère pas des exigences du régime douanier. Le non-respect des délais légaux de réexportation des matières premières importées dans le cadre du régime temporaire expose ces entreprises à des sanctions financières. Le suivi du parcours de ces marchandises, en coordination avec les équipes régionales de contrôle des douanes, a mis en évidence des détournements massifs. Une part importante des matières premières importées n'a jamais intégré le circuit de production et d'exportation, mais a été revendues directement sur le marché intérieur.