En 2025, le Maroc devra composer avec un contexte commercial mondial moins porteur, marqué par les tensions douanières. Fitch Solutions prévoit un ralentissement des exportations, mais estime que la demande intérieure, l'agriculture et l'investissement continueront de soutenir la croissance. Le climat économique international pour 2025 s'annonce moins favorable pour le Maroc. D'après les dernières analyses de Fitch Solutions, les nouvelles taxes douanières imposées par les États-Unis auront des répercussions au-delà de leurs frontières, affectant les perspectives de croissance des économies ouvertes, dont celle du Royaume. Ce coup de frein sur le commerce mondial, et en particulier européen, aura des effets indirects mais tangibles sur la croissance marocaine. Toutefois, le pays pourra s'appuyer sur des moteurs internes solides pour amortir ce choc extérieur. L'effet domino des tarifs américains sur les exportations marocaines Bien que les échanges directs entre le Maroc et les États-Unis demeurent limités – les exportations vers ce pays n'ont représenté que 3 % du total en 2023 –, l'impact des droits de douane américains sera d'abord ressenti en Europe, partenaire commercial majeur du Royaume. La zone euro absorbe près de 70 % des exportations marocaines, dont une large part est composée de biens manufacturés liés à des secteurs cycliques comme l'automobile, les équipements électriques ou encore la construction. Fitch Solutions estime que ces catégories de produits, souvent considérées comme discrétionnaires, sont particulièrement sensibles à un ralentissement de la demande. En conséquence, la croissance réelle des exportations marocaines devrait nettement ralentir, passant de 6,1 % en 2024 à 2,9 % en 2025, soit son niveau le plus faible depuis 2020. Ce repli contribuera à une révision à la baisse des prévisions de croissance du PIB national pour l'an prochain : Fitch Solutions abaisse sa projection de 4,8 % à 4,3 % pour 2025. Le ralentissement se poursuivrait même en 2026, où la croissance anticipée serait ramenée à 4,8 %, contre une prévision initiale de 5,5 %. Demande intérieure, agriculture et investissement en relais Ce repli de la dynamique extérieure ne remet pas en cause la trajectoire globalement positive de l'économie marocaine. Après une croissance estimée à 3,2 % en 2024, le pays devrait enregistrer une accélération à 4,3 % en 2025, portée par plusieurs facteurs endogènes. D'une part, la consommation des ménages reste vigoureuse, dopée par la désinflation attendue. Fitch Solutions table sur un recul de l'inflation moyenne à 1,1 % en 2025, favorisé par la détente sur les marchés pétroliers. D'autre part, la reprise de la production agricole, après une période marquée par la sécheresse, soutient les revenus dans les zones rurales et renforce la demande globale. Selon les premières estimations du Haut-Commissariat au Plan, le PIB marocain a progressé de 4,2 % en glissement annuel au premier trimestre 2025. Ce rythme est supérieur à celui du trimestre précédent (3,7 %), bien qu'en deçà des prévisions de Fitch Solutions (4,6 %). L'essentiel de la croissance a été tiré par les secteurs minier et de la construction, avec respectivement +6,7 % et +6,3 %. La production agricole, quant à elle, enregistre une hausse de 3,1 % en glissement annuel et de plus de 10 % en variation trimestrielle corrigée des variations saisonnières, son meilleur résultat depuis 2021. L'investissement privé est lui aussi bien orienté, grâce à l'assouplissement prévu de la politique monétaire. Fitch Solutions anticipe une baisse du taux directeur de Bank Al-Maghrib à 1,75 % d'ici fin 2025, profitant du cycle de détente monétaire amorcé aux États-Unis et en Europe. La solidité de l'ancrage du dirham à l'euro protège par ailleurs le pays contre un éventuel reflux de capitaux. Ce contexte devrait encourager les entreprises à investir, notamment dans les secteurs en expansion comme l'aéronautique, qui bénéficie de la hausse des dépenses militaires en Europe. Comptes extérieurs, finances publiques et perspectives de moyen terme Du côté des équilibres macroéconomiques, les indicateurs extérieurs devraient continuer de s'améliorer. Le déficit courant, estimé à 1,2 % du PIB en 2024, se réduirait à 0,8 % en 2025. Cette amélioration s'expliquerait par la baisse de la facture énergétique et alimentaire, rendue possible par le recul des prix mondiaux et par le redressement de la production agricole. Le déficit commercial des biens se contracterait légèrement, de 17,4 % à 17 % du PIB. Le secteur touristique, en plein essor, contribuera à compenser la faiblesse des exportations de biens. L'organisation de la Coupe d'Afrique des Nations prévue entre décembre 2025 et janvier 2026 renforcera cette tendance, avec un afflux attendu de visiteurs. De son côté, le soutien du Fonds monétaire international, qui a approuvé en avril une nouvelle Ligne de crédit flexible de 4,5 milliards de dollars, est perçu par Fitch Solutions comme un signal fort de la solidité financière du Maroc. En revanche, les finances publiques devraient connaître une légère détérioration en 2025. Les recettes fiscales progresseraient moins que prévu, en raison d'une croissance économique plus modérée et d'un recul des bénéfices des entreprises exportatrices. Fitch Solutions abaisse donc sa prévision de croissance des recettes à 10,8 %, contre 11,6 % auparavant. En parallèle, les dépenses publiques devraient augmenter, en particulier celles liées au service de la dette et aux projets d'infrastructure en lien avec la Coupe du Monde 2030. Le déficit budgétaire atteindrait ainsi 4 % du PIB, contre 3,9 % en 2024. La trajectoire de la dette publique resterait toutefois contenue. Le déficit primaire demeurerait stable à 0,7 % du PIB, et l'accélération de la croissance permettrait de stabiliser le ratio dette/PIB à court terme. À moyen terme, Fitch Solutions prévoit une reprise de la consolidation budgétaire, avec un ratio d'endettement attendu à 62,5 % du PIB en 2034, contre une estimation de 70,2 % pour 2025, grâce notamment à l'effet différé des réformes fiscales et à l'élargissement progressif de l'assiette.