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Le plus difficile à comprendre, c'est ce qui se passe sous nos yeux»
Publié dans La Gazette du Maroc le 18 - 04 - 2008

Les voyages forment la jeunesse, dit-on ; et ils forment aussi l'esprit. Un jeune magistrat, Alexis de Tocqueville est parti aux Etats-Unis pour un rapport de travail : il en est revenu avec un chef-d'œuvre de philosophie politique : « De la Démocratie en Amérique », attention le titre est trompeur…
Ce qui est bien en philosophie, c'est que tout le monde peut s'y mettre, à condition bien sûr d'y consacrer les efforts nécessaires. La faculté de jugement et la pensée appartiennent à tous, et c'est tant mieux. Que vous soyez comptable, infirmier, directeur de banque ou serveur de restaurant, il ne tient qu'à vous vous s'asseoir un moment pour réfléchir à des choses qui jusque là vous étaient habituelles. Même un analphabète peut y réussir. L'un des plus grands écrivains marocains, Mohamed Choukri, n'a-t-il pas appris à écrire sur le tard, à l'âge de 21 ans ? Et malgré cela, n'a-t-il pas produit un chef-d'œuvre avec son Pain nu ? Ce simple exemple devrait donner du courage à plus d'un d'entre nous; la paresse intellectuelle trouve toujours des prétextes. Autre exemple. Prenez le cas d'Alexis de Tocqueville, au XIXème siècle. Voilà un licencié de droit, magistrat de son métier, et qui sera chargé par les pouvoirs publics français d'une mission d'examen des prisons américaines.
Philosophie politique
Le rapport sera exécuté et remis aux autorités compétentes. Jusque là rien de philosophique me diriez-vous. Seulement notre jeune magistrat profitera de son séjour aux Etats-Unis pour réfléchir sur le fonctionnement et l'évolution des régimes démocratiques. Résultat : un livre, De La Démocratie en Amérique, qui fait désormais référence en matière de philosophie politique. A vrai dire le titre de l'ouvrage est un peu trompeur. L'auteur y analyse certes les ressorts de la démocratie américaine (nous sommes au 19ème siècle et l'Amérique est encore un continent tout neuf qui fascine les gens… comme aujourd'hui ?), mais cela sera surtout l'occasion d'une profonde réflexion sur le sens social des régimes démocratiques en général. Tocqueville s'interroge surtout sur les conséquences qu'un tel régime produit sur l'esprit et les mœurs des gens. Disons le tout de suite : notre auteur n'est pas tendre avec la démocratie, non pas qu'il soit un ennemi de celle-ci et des libertés qu'elle procure, mais il a vu très tôt les vices qu'un tel régime engendre. Explications. La première caractéristique de toute société démocratique, c'est l'égalité des conditions. Aucun des membres d'une telle société ne subit sa destinée du simple fait de la position sociale qu'il occupe : chacun est libre de travailler, de s'enrichir, et de s'élever dans la société afin de se distinguer des autres. Cela a l'air banal et pourtant c'est un paradoxe étonnant de nos démocraties : on a à la fois une aspiration à l'égalité (collectivement, nous sommes tous égaux) et une aspiration à l'inégalité (chacun cherche à se différencier des autres). Résultat : l'homme d'aujourd'hui, l'homme moderne et démocratique, désire à la fois l'égalité dans le général et la distinction dans le particulier. Et force est de constater que l'individuel et la recherche du bien-être pour soi l'emportent souvent sur la conscience collective. Comprenez bien : notre auteur ne dénonce pas la démocratie en elle-même, il dénonce l'usage partiel que les gens en font. Cet usage se résume à l'aspect matériel des choses (recherche du bien-être individuel) et à une surestimation des droits par rapport aux devoirs du citoyen.
Individualisme moderne
Prenez l'exemple du droit de vote. Cela est certes un droit, mais aussi un devoir de citoyen ; et n'assistons-nous pas aujourd'hui à une diminution significative du taux de vote dans la plupart des élections des pays libres? L'aspect spirituel et vertueux de la démocratie, c'est cela qui a été négligé selon notre auteur, la liberté oui, mais pour quoi faire ? « La révolution démocratique s'est opérée dans le matériel de la société, sans qu'il se soit fait dans les lois, les idées, les habitudes et les mœurs, le changement qui aurait été nécessaire pour rendre cette révolution utile. Ainsi nous avons la démocratie, moins ce qui doit atténuer ses vices et faire ressortir ses avantages naturels». Ce qui est fragilisé ainsi c'est le lien social et la solidarité qui devraient au contraire prévaloir. La recherche exclusive du bien-être matériel isole les personnes les unes des autres, et l'on débouche sur une attitude de repli sur soi généralisée. En choisissant de se replier ainsi sur ce que Tocqueville appelle «la petite société», les individus renoncent à exercer leurs prérogatives de citoyens : à quoi bon le reste de la société puisque j'ai la mienne? C'est l'individualisme moderne: «L'individualisme est un sentiment réfléchi qui dispose chaque citoyen à s'isoler de la masse de ses semblables de telle sorte que, après s'être créé une petite société à son usage, il abandonne volontiers la grande société à elle-même». Lecteur, il ne s'agit pas d'être naïvement nostalgique d'un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, il s'agit d'être lucide sur l'évolution de ce beau régime que l'on nomme démocratie et au sein duquel nous vivons aujourd'hui dans notre pays. Ce qui dérange chez Tocqueville, c'est qu'il gratte là où ça fait mal. Tout le monde est d'accord pour flatter la démocratie et ses libertés; mais notre auteur est l'un des rares à avoir osé s'aventurer dans une critique (constructive) de ce qu'il appelle «les vices de la démocratie». Et des vices de la démocratie, il en existe beaucoup, par exemple celui d'essayer d'imposer ce régime de force à des populations, et en profiter par là même pour envahir ce pays… Alors, c'est beau de critiquer, mais que proposer ? A vrai dire notre auteur reste assez vague sur la question; il suggère une voie moyenne entre une liberté débridée et un asservissement total : «Si quelqu'un me montrait entre l'indépendance complète et l'asservissement entier de la pensée une position intermédiaire où je puisse espérer me tenir, je m'y établirais peut-être ; mais qui découvrira cette position intermédiaire» ? Si chaque citoyen prenait conscience de ses devoirs civiques autant que de ses droits (aucun problème pour ces derniers !), on irait peut être vers cette voie intermédiaire, l'excès est mauvais en tout.


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