Activité portuaire : nouveau cap de 130 millions de tonnes de trafic franchi au premier semestre 2025    La représentante spéciale de l'ONU pour la Libye salue l'engagement du Maroc pour la facilitation du dialogue inter-libyen    Palestine : Netanyahu demande l'aide du CICR pour les otages, Hamas pose ses conditions    Guerre en Ukraine : Après l'ultimatum de Trump, Witkoff attendu en Russie    Qualifs. Afro Basket U16 filles / Zone 1 : Le Maroc domine l'Algérie et se qualifie pour la phase finale    Vague de chaleur et averses orageuses du lundi au vendredi dans plusieurs provinces du Royaume (bulletin d'alerte)    Rentrée scolaire : l'Alliance des libraires dénonce des publicités mensongères de réductions sur les fournitures    Festival de Tbourida de Bir Jdid, ou quand les Sabots racontent l'Histoire !    HCP: Plus de 72% des actifs se trouvent dans 5 régions du Maroc    Mufti d'Al-Qods: L'aide envoyée par Mohammed VI, un acte de soutien concret à Gaza    Les hôteliers européens se rebiffent contre Booking    CHAN 2024 : L'Algérie frappe fort en s'imposant face à la Guinée    La Spice Girl Mel B célèbre son deuxième mariage à Marrakech avec une touche marocaine    Coupe du monde U20 : Mohamed Ouahbi veut croire en l'exploit malgré un groupe relevé    Al Hilal anticipe l'absence de Bounou et se tourne vers Abdullah Al-Maiouf    Transition énergétique : ACWA Power décroche les projets NOOR Midelt 2 & 3    Revue de presse de ce lundi 4 août 2025    Países Bajos: Ismael Saibari y Couhaib Driouech ganan la Supercopa con el PSV Eindhoven [vídeo]    Marhaba 2025 : Number of passengers traveling to Morocco rises by 4.1%    Marruecos: El subempleo corroe el mercado laboral, el desempleo femenino sigue en aumento    Alerte météo : vague de chaleur et averses orageuses de dimanche à vendredi dans plusieurs régions    Une réponse on ne peut plus claire du conseiller de Trump, Massad Boulos, adressée, qui plus est, à un média algérien : Le Sahara est marocain et l'unique base de solution reste l'initiative marocaine d'autonomie.    L'ICESCO lance le deuxième concours de poésie «Villes de poèmes»    Maroc-Gambie : Renforcement de la coopération dans le domaine judiciaire    Fès-Meknès : un demi-milliard de dirhams pour transformer la gestion des déchets    Affaire Airbnb dévoile les manœuvres de l'Algérie et de ses relais étrangers    Canicule : Alerte en Espagne et au Portugal    Etats‐Unis : préparatifs en cours pour un commandement militaire autonome en Afrique, le Maroc envisagé comme siège    Le Maroc présente les ambitions atlantiques du roi Mohammed VI au Forum parlementaire d'Awaza    Un avion reliant Barcelone à Essaouira atterrit en urgence à Malaga    Le conseiller spécial américain Massad Boulos salue l'attachement du Maroc à la stabilité régionale avant sa visite à Rabat    Dette : les OPCVM, premiers créanciers du Trésor    « 3+3 » Atlantique : Un nouveau format de coopération euro-africaine    Le consul d'Algérie à Lyon refuse d'émettre des laissez-passer depuis un an selon la préfète du Rhône, tollé en France    Hiroshima : 80 ans après, et « comme si de rien n'était »    Brahim Diaz préfère le Real Madrid aux offres saoudiennes    Education Gloires et déboires d'une réforme à contre-la-montre [INTEGRAL]    Abdellah et Zakaria Ouazane vont signer de nouveaux contrats avec l'Ajax    Football régional - «La Nuit des Stars» : La Ligue Marrakech-Safi célèbre l'excellence    Le Maroc importe 15 000 tonnes de silicates et conserve 13 % des parts d'importation régionales dans la zone MENA    L'entreprise chinoise BlueSky High-Tech ouvre une filiale au Maroc pour affermir sa présence dans l'équipement énergétique    Le Moussem Moulay Abdallah Amghare se pare de magnifiques sculptures de cheval et de faucon en vue de l'ouverture    Mauritanie : L'Algérie a-t-elle exercé des pressions pour bloquer l'accès à un média ?    En hommage à l'art et à la fraternité maghrébine : Le Syndicat Professionnels Marocain des Créateurs de la Chanson Marocaine célèbrent la fête du trône en Tunisie    Diaspo #400 : De Paris à Sydney, Jamal Gzem met en image les histoires humaines    Festival des Plages Maroc Télécom : Réussite de l'Edition Spéciale Fête du Trône    Casablanca accueille la 1ère édition du festival AYTA D'BLADI    «Vallée des vaches» : Le Maroc documente des gravures bovines inédites à Tiznit    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Culture et indépendance
Publié dans La Vie éco le 24 - 03 - 2006

De l'Océan Atlantique au Golfe, la majorité des slogans publicitaires sont conçus aujourd'hui en arabe dialectal. C'est bien le seul truc, avec les chansons d'Oum Kalthoum, sur lequel les Arabes se soient mis d'accord.
Dans la précédente chronique consacrée à l'usage de la langue maternelle au Maroc, à savoir darija, j'avais évoqué la littérature francophone que le Salon du livre de Paris célèbre en ce mois de mars. Concernés au plus haut point par cette dimension linguistique, les écrivains et intellectuels marocains n'ont pas manqué ces derniers jours – à cause ou grâce à une émission littéraire («Culture et dépendances», animée par Franz-Olivier Giesbert sur France3) – de lancer une polémique suite à une déclaration intempestive de Tahar Ben Jelloun, qui accusa la langue arabe de ne pas être assez «ouverte» pour permettre d'écrire certaines choses, notamment sur la sexualité. Ce ne fut pas la seule «sortie» de Ben Jelloun dans cette émission puisque, à une question de Giesbert sur l'identité littéraire de l'auteur de La prière de l'Absent, ce dernier a fait son «outing» identitaire en précisant qu'il n'est pas un auteur francophone, mais un écrivain français et… marocain. Après ces propos, on ne tarda pas à lire sous la plume de Mohamed Berrada, romancier et critique marocain de langue arabe, une réponse cinglante dans le quotidien Al Ittihad Al Ichtiraki et une autre de l'autre écrivain, toujours de langue arabe, Ahmed Al Madini, dans le supplément culturel du même journal. On ne va pas se plaindre pour une fois d'une polémique qui nous rappelle le bon vieux temps de la lutte des langues des années 80.
Mais, Dieu que les choses sont complexes au Maroc lorsque la langue des écrivains se délie ! Elles se compliquent davantage pour un chroniqueur trilingue, tentant d'user équitablement et autant que faire se peut : de la langue française pour le plaisir, pour travailler et gagner sa vie ; de la langue arabe fos'ha pour lire des livres et des journaux ; et de darija pour communiquer avec les siens, son entourage, pour se marrer un coup et éventuellement pour nourrir les deux premières langues ! Mais ça, on ne l'avoue pas chez nous lorsqu'on est un intello pur et dur ou un écrivain à succès de quelque langue que ce soit. Dire que l'on peut aimer à parler, à lire ou à écrire dans une langue sans jeter l'opprobre sur une autre langue pour incapacité, mauvais héritage du passé ou mépris pour les parlers du peuple ne fait pas partie de nos mÅ"urs culturelles. Certes, on ne peut laisser dire que l'arabe n'est pas une langue ouverte sur les choses du sexe quand on connaà®t toute la littérature érotique, parfois franchement grivoise, que recèle la bibliothèque arabe. Tahar doit lire les poèmes d'Abou Nouwas sur l'homosexualité (puisque c'est un des thèmes de son dernier roman) ; les préceptes érotiques de Nafzawi et bien d'autres textes qui frisent quelquefois la pornographie mais qui sont en vente libre dans les médinas du Maroc et côtoient les écrits religieux les plus obscurantistes dans une promiscuité improbable et certainement inconcevable à la FNAC, rue de Rennes à Paris. Il devrait également, comme l'a rappelé perfidement Berrada, relire dans la foulée sa propre traduction de Mohamed Choukri, Le pain nu et d'autres romanciers contemporains du Moyen-Orient dont celui, merveilleux et revigorant, de l'écrivain et dentiste égyptien Aala' Assouani : Immeuble Yacoubian. Il est disponible même en français pour les paresseux ou les monolingues.
Mais ni Berrada ni Al Madini, qui ont longtemps séjourné en France, lisent et parlent volontiers la langue de Pivot (car tout cela n'est que de la mousse médiatique), ne peuvent ignorer que toutes les langues sont des héritages du passé. Au Maroc, nous sommes bien placés pour le savoir, le dire et l'écrire. Il n'est que de voir l'exemple admirable d'intellectuels, poètes et écrivains amazighophones, dont nombre sont à l'IRCAM, qui usent avec une grande et riche éloquence de la langue arabe fos'ha. On ne peut dire qu'ils soient rancuniers et ils n'en font pas tout un fromage qui sent la défensive ou la mélancolie de l'écrivain contrarié. J'ai déjà écrit ici qu'une langue, comme la liberté d'expression, ne meurt que si l'on ne s'en sert pas. La belle et flamboyante langue arabe, injustement qualifiée de classique et maladroitement désignée par ses propres locuteurs de fos'ha («l'éloquente» et donc l'élitiste), évolue à son rythme, à celui des peuples qui en usent ainsi qu'au bon plaisir des gouvernants qui abusent des gouvernés comme du gouvernail.
Mais on ne peut pas dire qu'il y a de plus en plus de gens à manier cette langue avec le respect qu'elle mérite, lorsqu'on tend une oreille à toutes les chaà®nes de télé du Moyen-Orient qui bouchonnent sur les satellites. Même les télécoranistes et autres vedettes d'une espèce de «Starsyslam», dont la langue arabe et sa charge religieuse constituent le fonds de commerce, ont vite compris que pour attirer le chaland, il faut parler la langue du cÅ"ur… de cible. Principe de marketing que les publicitaires et autres marchands de la «réclame» ont aussi vite pigé. Résultat : la majorité des slogans publicitaires sont conçus aujourd'hui en arabe dialectal des pays respectifs et ce de l'Océan Atlantique au Golfe persique. C'est bien le seul truc, avec les chants d'Oum Kalthoum, sur lequel les Arabes se soient mis d'accord dans leur grand fantasme unioniste.
Alors, une question pour finir et pour en rire : partir avec Ben Jelloun ou rester pour rigoler avec mon pote Al Madini – dont la faconde dialectale est irrésistible – mais chouia en arabe fos'ha et bazzaf en darija qohha? Vous, je ne sais pas, mais moi, je n'ai pas envie de partir !


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.