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La diva de la «convivencia»
Publié dans Les ECO le 23 - 08 - 2013


Françoise Atlan
Chanteuse
Quand elle chante, elle raconte son histoire et un héritage judéo-arabe. Elle s'appelle Françoise Atlan, elle est chanteuse mais surtout directrice artistique d'un festival tolérant aux confins des dialogues entres les civilisations : les Andalousies atlantiques. Rencontre avec une artiste au grand cœur, dans un café marseillais dont l'âme est chez elle. Au Maroc !
L'histoire de Françoise Atlan est l'histoire d'un destin étroitement lié à la musique qui commence par une belle récompense, celle de la reconnaissance de soi et de son patrimoine culturel. Elle n'oublie pas ses racines, ni d'où elle vient puisqu'elle fait parler les civilisations dans ses chants. Un don éclairé par des rencontres exceptionnelles qui l'ont aidé à trouver sa «voix». Etablie dans la région d'Aix-Marseille depuis de longues années, d'abord étudiante à l'Université d'Aix-Marseille en musicologie puis élève au Conservatoire d'Aix dans la classe de piano de Monique Oberdoerffer), Françoise Atlan obtient un Capes, puis des prix de piano et de musique de chambre. Alors étudiante en licence de musicologie où elle s'adonne au piano, Roland Hayrabedian lui conseille vivement de «travailler sa voix». Un peu plus tard, la voix toujours non éduquée, Maurice Ohana la choisit pour enregistrer la 4e Cantiga pour voix d'enfant, la «Cantiga del Azahar» (la fleur d'oranger).
Elle devient en 1987 soprano solo de l' ensemble Musicatreize, qui vient d'être créée par Roland Hayrabedian. Guidée par ses professeurs, elle continue cet apprentissage vocal, en particulier avec Andrea Guiot, (inoubliable Micaela aux côtés de la Callas qui fut Carmen). C'est finalement cette technique vocale qu'elle utilisera et qui l'accompagnera, quel que soit le répertoire qu'elle chantera. Entourée de professionnels et de gens compétents, Françoise Atlan doit néanmoins encore trouver sa «voix», ce quelque chose qui la rendra exceptionnelle. D'ailleurs, son professeur la conseillera juste avant sa mort, comme pour laisser une diva derrière lui : «Ne t'éloigne pas de ton chant de prédilection. N' y renonce jamais» lui confiera Maurice Ohana. Le conseil ne tombera pas dans l'oreille d'un sourd, mais chez une grande dame qui a de l'oreille, une oreille musicale qui ne fera que grandir.
Elle écoute son conseil et concilie ses deux identités vocales, entre airs de concerts de Mozart, berceuses Judéo- espagnoles, et chants judéo-arabes entonnés par les femmes de sa famille. Sa carrière débute en mai 1992, avec l'enregistrement de son premier disque «Romances Sefardíes», chez Buda Musique. Premier disque encensé par la critique, avec notamment un article FFFF sur Télérama. S'enchaîneront ensuite les concerts : Carnegie Hall à New York, Royal Albert Hall de Londres, Festival de Bergen, de Mexico avant que ne suivent deux autres disques, «Entre la Rose et le Jasmin» et «Noches», récompensés par un «Diapason d 'Or», et le «Choc du monde de la musique». En 1998, elle est lauréate du prix Villa Médicis hors les murs, pour un projet de collecte de la tradition poétique et musicale juive dans la ville de Fès. Un prix qui, selon elle, fera tout commencer.
Le retour aux sources
Imprégnée du patrimoine judéo-arabe, cette amoureuse du Maroc qui ne peut pas s'empêcher de vivre sur ses terres même si le travail l'oblige à aller loin, décide de vivre quelques mois à Fès, et travaille assidûment le répertoire arabo-andalou de la prestigieuse Ecole de Fès, aux côtés de Mohamed Briouel. Ils entament alors une collaboration qui les mènera au prestigieux Carnegie Hall de New York. D'ailleurs en juin 2014, ils se produisent au théâtre de la ville. Grâce à cette expérience, elle fréquentera la communauté juive de Fès, qui lui apprend que dans la ville impériale, juifs et musulmans vivent ensemble : leur musique commune en est l'éblouissante particularité. Pour Françoise Atlan, cette terre marocaine a quelque chose d'exceptionnel.
En 1998, c'est le baptême du feu : Mohammed Briouel décide qu'elle chantera en soliste à la «Nuba Hijaz Al-Kbir», lors du Festival de musique Arabo andalouse de Fès. Les puristes sont dans la salle, ainsi qu'André Azoulay, conseiller de sa majesté, qui demande à la rencontrer à l'issue du concert. Cette rencontre changera à jamais sa vie puisqu'elle trouve en cet homme de paix les réponses aux questions qu'elle se posait en ce qui concerne son identité, ou plus exactement, pour reprendre les mots d'André Azoulay, «nos identités plurielles et additionnées». La voilà «adoubée» par ses pairs car ce concert a été exceptionnel. «Tant par l'audace puisqu'une européenne, femme et soliste chantant un répertoire exclusivement masculin est chose rare, que par l'émotion ressentie, soutenue par un public à la fois curieux, enthousiaste, plein de ferveur, et finalement conquis».
Elle ne se doutera pas que cette rencontre avec André Azoulay constituera le début d'une belle collaboration artistique qui aboutira à un festival andalou et ouvert à la tolérance. En effet, elle deviendra directrice artistique du Festival des andalousies atlantiques d'Essaouira, une belle aventure qu'André Azoulay lui confie depuis 5 ans. «En octobre 2013, seront fêtés les 10 ans de ce festival, dont le dessein est immense et qui se concrétise lorsque artistes juifs et musulmans viennent dire au public, avec leurs musiques et leurs paroles, ce qui peine à se dire dans d'autres cercles. La cité des Alizés, Essaouira, y est pour beaucoup. Elle est ce modèle de convivencia, ville-port, ville-monde, de même que Marseille» car son cœur est entre Essaouira et Marseille.
«Et c'est également lors du Festival des andalousies atlantiques d'Essaouira, que peut se voir et s'écouter ce que nous chantent ces différentes cultures, à travers leurs broderies chantées si proches et si lointaines à la fois». C'est toutefois au Maroc qu'elle apprend à se réconcilier avec les composantes de ses racines judéo-arabo-berbères. Avant Essaouira, Françoise Atlan était établie à Marrakech depuis l'année des attentats meurtriers de Casablanca en 2003 toujours dans cette quête qui consiste à regarder et entendre ! C'est ce qui rapproche juifs et musulmans, et non ce qui les sépare, à travers ses rencontres, ses expériences musicales et de vie, ses illusions aussi. Elle y restera 9 ans, jusqu'à la fin de l'année 2012.
De Casa à Marseille
Après 9 ans d'exil et de quête spirituelle et musicale, la native de Tanger et amoureuse d'Essaouira choisit de revenir à Marseille afin de créer sa compagnie, forte de toutes ces expériences, tout en conservant ce lien indéfectible qui la lie au Maroc. «Une Compagnie à l'image d'une structure dont l'architecture rappellerait un plafond orné de stuc et de zelliges : s' y mêleraient les projets musicaux avec les musiciens d'ici et d'ailleurs, sous formes de rencontres, de concerts et d'enregistrements discographiques, la diffusion et l'exploitation des collectes effectuées au Maroc, la diffusion de ses écrits poétiques et musicaux, la valorisation de nos patrimoines communs. Pouvoir éditer, diffuser les «Carnets de voyage d'une flâneuse émerveillée». Une compagnie au-delà d'une simple structure répertoriée, le témoignage d'un retour de ces 9 ans de pérégrination et qui ne cesseront de la ramener d'un rivage à l'autre», confiera la diva qui choisit Marseille aussi car c'est ici qu'elle décide de mettre à plat et d'approfondir tout ce qu'elle a vécu musicalement et humainement, durant ces 9 années de «gestation» : faire en sorte de tisser des liens entre Marseille et le Maroc.
Une Marseille qu'elle souhaite relier aux villes qui l'ont accompagnée, et qui sont plus que jamais présentes en elle, en particulier, Essaouira, dans sa dimension de ville ouverte sur le monde (émission à suivre sur France Culture «Essaouira, ville monde», à laquelle elle a participé). Essaouira multiple, aux cultures additionnées et aux identités plurielles : une véritable tradition que l'on retrouve aussi à Marseille. En choisissant de retourner en France, elle éprouve aussi le désir de rendre hommage à ces communautés judéo-espagnoles, entre Marseille et Aix-en-Provence, qui l'ont accueillie lorsqu'elle était étudiante, pour des repas, des soirées. Reconnaissance pour ceux d'entre eux originaires du Maroc (Tétouan, Larache,Tangers), au travers de ses précédents enregistrements du répertoire judéo-espagnol en Haketia, le judéo-espagnol parlé dans le nord du Maroc. Ainsi qu'avec le disque «Andalussyat», (Prix de l'Académie Charles Cros) en compagnie de l'orchestre de Fès, à la couleur incontestablement marocaine.
De la maturité à l'avenir tout tracé
Arrivée aujourd'hui à sa «maturité vocale», et à l'occasion de ses 20 ans de carrière, elle prépare l'enregistrement d'un nouveau disque de Romances séfarades, dont le choix de la couleur et du répertoire seront résolument de style «Ottoman», dans le style gréco -turc, avec des romances en ladino, l'autre langue judéo-espagnole parlée, entre autres, par les juifs de Salonique et d'Istanbul. Elle sera accompagnée par l'ensemble grec «En Chordais», dirigé par Kyriakos Kalaitzidis, ensemble avec lequel elle a déjà collaboré à Thessalonique. Thessalonique, l'ancienne Saloniki, dont la tradition séfarade regorge de chants d'amour, de berceuses, de chants d'allégresse, de même que les villes d'Istanbul et de Rhodes. Ce style diffère de beaucoup de celui auquel son public est habitué. En effet tout y est différent : les textes, les mélodies, les couleurs des états d'âme, les inflexions vocales : la saveur, convaincue que je suis de sa grande beauté et de sa capacité à toucher l'auditeur. C'est ainsi que l'artiste oscille d'aventures en aventures, sur différentes terres où l'héritage musical et traditionnel est primordial.
De Fès à Marseille en passant par Essaouira ou Tanger, ses racines judéo-arabes l'amèneront à faire le lien entre sa terre marocaine qu'elle aime, avec le monde et l'ouverture d'esprit. Son combat est avant tout artistique parce qu'il n'y a pas de meilleur moyen de faire passer le message. Elle continue avec un nouveau projet, celui d'«Ensemble Gaia», une troupe de musique autour de la chanteuse avec des voix venues d'horizons différents comme pour faire passer le message le plus loin possible et de la manière la plus belle et la plus noble qui soit. «L'Atlantique n'est pas la Méditerranée, mais ne nous enveloppe-t-elle pas de la même façon ?», ainsi que l'écrit le poète marseillais Louis Brauquier, et dont la poésie est toute entière dédiée au monde maritime («Je connais des îles lointaines»), dans son évocation de Mogador.». Parole d'une «souiria» de cœur, marocaine dans l'âme mais définitivement citoyenne du monde à travers sa musique...


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