Le président de la Cour des comptes, Driss Jettou, a d'ores et déjà transmis ses rapports au ministère de la Justice et des libertés. C'est un geste qui marque une rupture par rapport au mode de gouvernance de son prédécesseur. On se rappelle que ces rapports restaient dans les tiroirs du procureur près la Cour des Comptes pendant des mois, jusqu'à ce que l'opinion publique les oublie ! Aujourd'hui, Jettou trace son territoire et c'est de bon augure.Cependant, d'aucuns diront qu'avec la nouvelle Constitution, le ministère de Mostafa Ramid n'a nullement besoin d'attendre de recevoir officiellement lesdits rapports avant d'agir. En effet, Ramid avait déjà ordonné une enquête sur l'ensemble des rapports de 2010, du temps d'Ahmed Midaoui, il y a quelques mois. Toutefois, la symbolique du geste du premier auditeur du pays mérite d'être citée. Maintenant, sur le fond, il y a à faire. Les magistrats constituant l'équipe de choc de Ramid doivent établir des priorités. Il ne s'agit surtout pas d'agir dans une logique quantitative, mais de prôner une démarche qualitative. En d'autres termes, les dysfonctionnements portant sur des milliards de dirhams ne doivent pas être mêlés à des dossiers concernant quelques millions de dirhams, l'impact économique n'étant pas le même. En effet, le rapport 2011 porte sur plusieurs types d'audits. Entre la gestion communale, la gouvernance des établissements publics et les dépenses engagées par les partis politiques, il y a bel et bien des priorités. Le contrôle des dépenses des partis, par exemple, porte sur quelques millions de dirhams. Ce n'est pas pour autant que les auditeurs de la Cour des comptes vont les négliger, mais le budget de certains établissements publics, qui tourne autour de plusieurs dizaines de milliards de dirhams, nécessite encore plus de perfectionnement dans l'approche contrôle, car les risques de dilapidation et de manque à gagner sont énormes. C'est bien là que sont attendus et les contrôleurs de Jettou et les magistrats de Ramid. Sans cela, la reddition des comptes n'est que pure surenchère !