Le Maroc traverse en 2025 une nouvelle vague de chaleur d'une intensité remarquable, illustrant l'accélération d'une dynamique climatique déjà préoccupante. L'épisode de 2024 avait tiré la sonnette d'alarme : 21 personnes avaient perdu la vie à Beni Mellal sous des températures approchant les 50°C. Un an plus tard, les signaux se multiplient, confirmant une tendance durable. Le pays n'est plus confronté à des événements ponctuels, mais à une transformation profonde, marquée par des impacts en chaîne sur les plans environnemental, économique, agricole, énergétique et sanitaire. Depuis 2024, le Maroc est confronté à une intensification marquée des vagues de chaleur, qui se manifestent avec une fréquence et une gravité croissantes. Cette réalité expose les vulnérabilités du pays, notamment dans les secteurs de l'eau, de l'agriculture, de l'énergie et de la santé, et souligne la nécessité d'adapter les politiques publiques face à un climat désormais instable et imprévisible. En juillet 2024, Beni Mellal enregistrait 48°C, un record qui avait mis en lumière les limites de la résilience face aux extrêmes climatiques. En 2025, la chaleur extrême persiste, avec des pics dépassant les 46°C dans plusieurs localités comme Ben Guérir et Smara, désormais classées parmi les dix villes les plus chaudes du globe. Ce qui était considéré comme exceptionnel devient récurrent. Les services météorologiques annoncent des vagues de chaleur plus fréquentes et plus longues. Le Maroc semble avoir basculé dans une phase de risque climatique permanent, où la résilience humaine et infrastructurelle est mise à rude épreuve et doit s'adapter de manière accélérée et continue. En 2024, l'évaporation dans les retenues hydrauliques dépassait 1,5 million de mètres cubes par jour, amplifiant une sécheresse persistante depuis six ans. En 2025, les mêmes symptômes réapparaissent, mais dans un contexte encore plus alarmant : les niveaux de remplissage des barrages frôlent les seuils critiques, les rares précipitations n'ont pas permis de reconstituer les stocks, et l'intensité de la chaleur aggrave l'évaporation. Le recours accru au pompage souterrain exerce une pression directe sur le réseau électrique. Les plans de dessalement et d'optimisation hydrique, pourtant engagés depuis 2023, peinent à absorber l'ampleur du défi. Ce glissement progressif fait passer la gestion de l'eau du registre du développement durable à celui de la sécurité stratégique. Dès 2024, les producteurs avaient été contraints de réorganiser les journées de travail pour protéger les ouvriers. Mais la principale victime reste la production elle-même. Les cultures de tomates, melons ou agrumes, déjà éprouvées par la chaleur et le manque d'eau, subissent désormais un stress devenu permanent : floraison perturbée, fruits de calibre réduit, éclatement physiologique. En 2025, cette situation s'aggrave. L'association de températures extrêmes, de pénurie hydrique et de salinité des sols menace directement les rendements. Les marges de manœuvre s'amenuisent pour les exploitants. Le modèle agricole intensif, dépendant d'une ressource devenue rare, montre ses limites dans un environnement désormais hostile. Lire aussi : Crise climatique : L'ONU appelle à des pratiques durables de consommation et de production La hausse de la consommation électrique observée en 2024, alimentée par les climatiseurs et les pompes agricoles, n'était qu'un avant-goût. En 2025, un nouveau record est franchi : la demande progresse de plus de 15 %. Si la transition énergétique est amorcée, elle reste insuffisante face à la rapidité du phénomène. Dans les unités agroalimentaires, les chambres froides fonctionnent en continu pour préserver les denrées, aggravant la pression sur le réseau. La dépendance à des solutions de refroidissement énergivores s'intensifie, alors que les alternatives écologiques tardent à se généraliser. Les 21 décès recensés à Beni Mellal en 2024 avaient choqué l'opinion. Un an plus tard, les autorités redoutent de nouvelles pertes humaines. Pourtant, les dispositifs de prévention, les systèmes d'alerte et les équipements adaptés restent encore très limités. Le lien entre chaleur extrême et mortalité, bien que connu, ne suscite pas encore une réponse à la hauteur. Les hôpitaux, tout comme les collectivités locales, manquent d'outils pour anticiper et gérer les crises thermiques. Le pays reste insuffisamment armé pour affronter une chaleur devenue létale, notamment pour les populations âgées, les enfants et les travailleurs exposés. Déjà en 2024, les projections faisaient état d'un coût climatique pouvant atteindre 19 % du PIB mondial à l'horizon 2050. En 2025, ces estimations se traduisent par des pertes concrètes : baisse de la production agricole, hausse des charges énergétiques, exode rural accru et dégradation des infrastructures. Les écarts entre régions urbaines et territoires ruraux se creusent. Ces derniers, moins équipés et plus exposés, accumulent les vulnérabilités. La canicule n'est plus seulement un risque environnemental : elle devient un facteur de désintégration territoriale et de fracture sociale.