Au Maroc, les micro-entreprises et TPE représentent 98,4% du tissu des entreprises, mais leur développement reste limité. Entre obstacles internes et contraintes externes, croissance, modernisation et accès aux marchés sont freinés. Le CESE vient de rendre public un avis dans lequel il propose une approche intégrée pour renforcer leur résilience, améliorer leur environnement et accélérer la mise en œuvre du Small Business Act. Formation, financement, accompagnement et digitalisation sont au cœur de ses recommandations pour stimuler la compétitivité et la pérennité. Au Maroc, les micro-entreprises et TPE jouent un rôle important dans l'économie nationale. Elles représentent 98,4% du tissu national des entreprises de personnes morales. Pourtant, leur développement reste freiné par des obstacles structurels. Comment renforcer leur résilience et leur permettre de croître durablement ? Au lendemain du lancement du programme de soutien des TPME, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a publié un avis sur le sujet à destination de cette catégorie d'acteurs économiques. Dans son document, le CESE préconise une approche intégrée, combinant soutien interne et amélioration de l'environnement externe. Ainsi, le CESE recommande de regrouper tous les dispositifs de soutien dans un cadre normatif unique. L'objectif est de simplifier l'accès aux aides et d'accélérer la mise en œuvre du Small Business Act. Une structure claire permet aux entrepreneurs de mieux comprendre leurs droits et opportunités. En outre, estime le CESE, une instance nationale indépendante doit suivre et évaluer les politiques en faveur des micro, TPE et PME. Pourquoi ? Pour s'assurer que chaque mesure est efficace et adaptée aux besoins réels. Les données collectées permettront des ajustements rapides et ciblés. De plus, les entreprises ne rencontrent pas les mêmes défis partout. C'est pourquoi le CESE insiste sur la cartographie nationale des besoins régionaux. Cette démarche garantit la cohérence des actions et l'efficacité des dispositifs locaux, tout en facilitant l'accès aux services de proximité. Par ailleurs, le renforcement des compétences est primordial pour cette frange. En réponse, le CESE propose d'élargir l'offre de formation pour les porteurs de projets. Les associations d'entrepreneurs joueront un rôle central, avec des cahiers des charges précis. L'enseignement scolaire et la formation professionnelle, eux, doivent intégrer des modules en entrepreneuriat, complétés par des stages immersifs en entreprise, préconise le conseil. Concernant le volet financier, le CESE rappelle que les besoins des micro-entreprises, TPE et startups sont différents. Il considère donc essentiel d'accélérer le dispositif de soutien aux PME prévu par la Charte de l'investissement. La publication rapide des textes d'application garantira pour sa part un accès plus fluide au financement et renforcera la confiance des entrepreneurs. Au-delà du financement, les entreprises ont besoin de conseils et de partenariats. Le CESE recommande à ce propos un plan national structuré autour du Small Business Act, combinant services de proximité, partenariats avec des acteurs qualifiés et formats modulables de soutien. L'accès aux marchés reste fondamental pour la survie des micro entreprises et TPE. Mais comment permettre aux micro/TPE/PME d'atteindre des marchés plus larges ? Le CESE préconise les alliances stratégiques et la mise en réseau. Les quotas différenciés et la co-traitance pour la commande publique faciliteront leur intégration dans les chaînes de valeur. Procédures administratives : le CESE appelle à la simplification Autre sujet adressé par le CESE, la lutte contre la corruption et la concurrence déloyale qui reste essentielle. Dans cette optique, le CESE encourage la simplification et la digitalisation des procédures administratives. Un environnement transparent et efficace est un levier pour stimuler l'investissement et la croissance. Enfin, une évaluation à mi-parcours de la réforme fiscale est nécessaire, estime le CESE. L'objectif est d'alléger la charge sur les micro/TPE et de renforcer la confiance avec l'administration fiscale. Une fiscalité adaptée encourage l'innovation et favorise la pérennité des entreprises. Renforcer les micro, TPE et PME, c'est investir dans l'avenir économique du Maroc. Ces recommandations ouvrent la voie à des entreprises plus résilientes, compétitives et intégrées dans un écosystème dynamique. Car dans la pratique, ces catégories d'acteurs économiques sont très fragilisées. En effet, le travail effectué par le CESE permet de rappeler que les micro-entreprises et TPE rencontrent de grandes difficultés. Leur croissance, leur modernisation et leur intégration dans les chaînes de valeur restent limitées. Entre 2017 et 2022, seulement 0,2% des micro-entreprises ont évolué vers le statut de TPE ou PE. Les régressions, elles, restent fréquentes, surtout en période de crise. En 2024, près de 15.658 défaillances ont été enregistrées, presque toutes parmi les TPE. Selon Allianz Research, ce chiffre pourrait atteindre 16.000 entreprises en 2025. Les raisons d'une fragilité prononcée Le CESE identifie plusieurs facteurs qui freinent ces entreprises. Malgré les réformes publiques, elles font toujours face à de multiples obstacles. Beaucoup souffrent de carences en capital humain, en gestion, en planification et en innovation. De nombreux porteurs de petits projets se lancent dans l'aventure par nécessité, et non par opportunité. L'usage du digital reste limité pour sa part, avec une forte dépendance au marché local. Les plus petites structures peinent à obtenir des financements adaptés, et les startups ne trouvent pas toujours les dispositifs nécessaires. L'accompagnement non financier, pourtant vital pour développer compétences et compétitivité, reste fragmenté et insuffisant. Ces fragilités internes se cumulent avec des contraintes externes. L'accès aux marchés, qu'il s'agisse de la commande publique, de l'export ou de l'intégration avec les grandes entreprises, reste très limité. La concurrence déloyale de l'informel pèse lourdement sur leur activité. Les lourdeurs administratives, elles, compliquent encore leur fonctionnement. Autre point faible, la confiance envers l'administration fiscale qui demeure fragile, malgré les efforts de simplification, de digitalisation et de transparence. Les délais de paiement, eux, représentent une charge supplémentaire pour leur trésorerie. Enfin, le cadre juridique actuel ne répond pas suffisamment aux besoins spécifiques des micro-entreprises, TPE et startups. Ces entreprises se trouvent ainsi confrontées à des obstacles multiples, internes et externes. Leur potentiel reste sous-exploité, malgré leur rôle central dans l'économie. Renforcer leur soutien, améliorer leur environnement et faciliter leur accès aux marchés devient urgent pour stimuler la croissance et la compétitivité. Abdelhafid Marzak / Les Inspirations ECO