L'adoption récente de la Loi de finances 2026 a été saluée comme une étape «charnière» par la ministre de l'Economie. Une loi qui promet réduction du déficit, relance de l'investissement, consolidation de l'Etat social et soutien à la compétitivité. Pourtant, un double décalage est ressenti entre les ambitions affichées et les outils pour les atteindre, ainsi qu'entre la réalité économique et les hypothèses qui la cadrent. Car si l'intention stratégique est claire, l'architecture opérationnelle, elle, vacille. Le socle prévisionnel repose sur des hypothèses dites prudentes telles que 4,5% de croissance, 2% d'inflation, 65 dollars le baril de pétrole. Or, comme le souligne l'expert-comptable Mohamed Belkhayat, ces prévisions semblent déjà en deçà de la dynamique économique réalisée en 2025. Pourquoi dès lors brider les leviers d'action sous couvert de prudence ? Le risque serait qu'à force de sous-estimer la croissance, on limite artificiellement les marges de manœuvre, en particulier pour des politiques sociales et des investissements qui pourraient bénéficier d'un surcroît de ressources. Ce conservatisme technique pourrait être défendable s'il était contrebalancé par une rigueur absolue dans la cohérence sectorielle. Or, on retrouve dans certains pans, un empilement désordonné de dispositifs, déconnectés les uns des autres. Le fait est qu'à vouloir tout promettre, le Budget 2026 doit composer avec des ambitions vastes, des hypothèses modestes, et des politiques sectorielles encore fragmentées. Il faudra plus que des équations budgétaires pour transformer cette loi en levier de transformation. Pour réussir, il est impératif d'articuler vision, cohérence et agilité d'exécution. Nous avons besoin d'un cap, mais aussi de la boussole qui va avec. Meriem Allam / Les Inspirations ECO