Sahara-CIA files #3 : Washington a redouté une attaque du Maroc sur Tindouf    18è Conférence de la Commission hydrographique de l'Atlantique Oriental et son séminaire associé du 29 avril au 03 mai à Casablanca    Bourse de Casablanca : Clôture dans le vert    Sommet social mondial: M. Hilale s'entretient à Genève avec les directeurs généraux des organisations internationales    Rabat: Coup d'envoi du Concours officiel de saut d'obstacles 3* d    Tanger : Fermeture définitive de la prison locale Sat Village (DGAPR)    Covid-19: dix nouveaux cas    L'intégration industrielle au centre d'entretiens entre Mezzour et Bruno Le Maire    Meknès : le 16ème SIAM ouvre ses portes au grand public    Vidéo. Aide au logement : 110.000 familles ciblées chaque année, le dispositif transparent    Du 17ème au 18 Congrès : Engagement, détermination et renouveau [INTEGRAL]    Partenariat historique entre ARAMCO et la FIFA    Attentat près de Moscou: Un nouveau suspect arrêté    Pétrole: La part de la Russie dans la production mondiale restera inchangée jusqu'en 2050    Gaza, Ukraine, relations sino-américaines… Voici ce qu'en pense le chef de la diplomatie chinoise    Sahara marocain : Le soutien de l'Espagne au plan d'autonomie marocain traduit un « engagement politique et stratégique »    CAF : La CAN 2023, la plus rentable de l'histoire avec 80 millions de dollars de bénéfices    Affaire match RSB-USM Alger : La FAF porte plainte contre la CAF    Vietnam: la démission du président de l'Assemblée nationale acceptée    Lalla Meryem préside le Conseil d'Administration des Oeuvres Sociales des FAR    Réunion à Rabat en préparation à la 4e conférence ministérielle mondiale sur la sécurité routière    25 tonnes de haschich dissimulés dans un camion de melons marocains en route vers la France [Vidéo]    Les têtes d'affiche du 26e Festival Jazz au Chellah dévoilées    Dîner Royal en l'honneur des invités et participants au SIAM    Tanzanie. 200.000 sinistrés suite aux inondations    Gaz butane et prix du mouton : Le gouvernement calme le jeu    OCP réussit une levée de fonds historique de 2 milliards de dollars sur le marché international    Prévisions météorologiques pour le samedi 27 avril 2024    Promesse de fin de mandat : Akhannouch veut renforcer l'état social    Matières premières : le Maroc devrait bien s'en tirer    Jazzablanca : le tourbillon rock-blues « Zucchero » pour une première apparition au Maroc    Le FC Séville mise sur Youssef En-Nesyri pour renflouer ses caisses    En Couv'. Gouvernement : trente mois de réalisations...    Maroc-Portugal : des relations excellentes « ancrées dans des liens historiques »    FC Barcelone: Xavi entraîneur jusqu'en 2025    Les températures attendues ce vendredi 26 avril 2024    Les produits à base de cannabis bientôt sur le marché local    Football espagnol / Ingérence étatique : FIFA et UEFA expriment leur inquiétude    Botola D1/ J27: Un Match de relégables en ouverture ce soir    Europe meets Morocco in the 26th edition of the Jazz au Chellah festival    "Travel Diaries" : L'art new-yorkais s'invite au Musée Mohammed VI de Rabat    Lubna Azabal, étoile marocaine, à la tête du jury des courts-métrages et de La Cinef à Cannes    Festival Angham: Meknès vibre aux rythmes issaouis et gnaouis    Le Maroc dénonce vigoureusement l'incursion d'extrémistes dans l'esplanade de la Mosquée Al-Aqsa    Dakhla: la Marine Royale porte assistance à 85 candidats à la migration irrégulière    Comment le Maroc s'est imposé sur le marché du doublage en France    Espagne : Après l'ouverture d'une enquête sur son épouse, Pedro Sanchez envisage de démissionner    Interview avec Abdulelah Alqurashi : « Produire le premier film saoudien classé R a été risqué, mais je brûlais de voir la réaction du public »    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Littérature Mdidech & Co «Vers le large» de l'écriture carcérale
Publié dans Le Soir Echos le 01 - 09 - 2010

«Vers le large» est le titre du dernier livre de Jaouad Mdidech (Ed. Marsam, Rabat, 2009, 168 pages, 60 DH), récit étiqueté « roman » et faisant partie de ces « témoignages » qui portent sur les années de plomb. L'auteur a des antécédents dans le domaine : il a commis, voilà une dizaine d'années, un premier livre (« La Chambre noire », Ed. Eddif, 2001, préfacé par Abraham Serfaty) où il relate son expérience de prisonnier politique comme d'autres l'ont fait et le font encore.
Le roman est structuré en deux parties, deux moments cruciaux dans l'existence du protagoniste : « La prison centrale de Kénitra » et « Vers le large ». Cette seconde partie relate les efforts du personnage pour retrouver une vie normale après une quinzaine d'années d'enfermement. Une description minutieuse et précise a d'abord été faite de l'univers carcéral et les tentatives de s'organiser pour ne pas être broyés par cette machine infernale mise en place par le Makhzen. Des retours sur la vie d'avant constituaient des moments de fraîcheur dans le récit ; ils permettent aussi bien au protagoniste qu'au lecteur de s'évader pour ne pas étouffer.
Des anecdotes qui vous laissent interloqués sont rapportées dans un style simple et précis. Ainsi cette visite chez le dentiste qui met face à face le prisonnier et un enfant de dix ans. Ce dernier remarquant les menottes, il demande par curiosité à notre homme le pourquoi de son incarcération. Le prisonnier politique explique alors qu'avec ses codétenus il souhaitait pour son pays l'éradication de la pauvreté, plus d'équité et de la prospérité pour tous les citoyens. La réaction du gamin laisse pantois : « Vous êtes contre le Roi ! » (p. 49).
Des souvenirs heureux émaillent le texte, des amours furtives revisitées dans le souvenir et prolongées dans la solitude cellulaire.
Malgré la présence de l'anecdotique, on a parfois du mal à inscrire ce texte dans le genre romanesque qu'il revendique. Beaucoup de faits sont véridiques, des personnes sont reconnaissables dans le paysage politique marocain, les indices autobiographiques sont quasi évidents et plusieurs situations s'inscrivent parfaitement dans le volet « années de plomb » de notre Histoire. N'aurait-il pas été plus judicieux de publier le livre sans indication de genre comme ce fut le cas pour « La Chambre noire » ? Difficile de trancher.
La deuxième partie est toutefois plus romanesque puisque le protagoniste mène sa quête personnelle même s'il est éclaboussé de temps à autre par l'Histoire qui ne pardonne pas. A sa libération, il tente de retrouver les espaces foulés auparavant par l'homme libre et l'existence menée par le jeune homme qu'il était avant la dure épreuve, mais les changements ont touché tout aussi bien les lieux que le mode de vie.
Pourtant un ardent désir de vivre se dégage de cette partie du roman. Comme déchaîné, ou plutôt parce que déchaîné, le protagoniste parcourt le Maroc dans tous les sens : Casablanca , Tanger , Agadir , l'Atlas , les sources d'Oum Rabiï , les cascades d'Ouzoud… Il jouit du contact avec la nature, se baigne : « […] je passais le plus clair de mon temps dans l'eau […]. Nager. Et faire l'amour » (p. 116). Réapprendre à vivre ne fut pas facile et Jaouad Mdidech a bien su transmettre le message et l'image au lecteur. Plusieurs réponses sont apportées à cette question inéluctable que se pose tout lecteur qui a côtoyé notre littérature carcérale depuis plus d'un quart de siècle : « Que sont-ils devenus ? ». C'est cette interrogation qui servira de titre au dernier chapitre du roman ; quelques pages en guise d'une affectueuse pensée à tous ceux qui ont subi le même sort.
Deux autres livres ont vu le jour en même temps que celui de Jaouad Mdidech et relatent encore et toujours cette plaie béante sur les pages de l'Histoire du Maroc. Le premier est écrit par Mohammed Errahoui, « Mouroirs » sous-titré « Chroniques d'une disparition forcée » (Ed. Saad Warzazi, 2008, 341 pages), une autre descente vers d'infâmes lieux de honte, en l'occurrence le bagne d'Agdz et le mouroir de Kelâat M'gouna. C'est un témoignage précis sur les dates et les espaces, il accompagne le lecteur de la « chasse à l'homme », à son incarcération et même jusqu'à ce moment que Errahoui nomme une « libération problématique ».
Le deuxième livre est une sorte de journal d'un prisonnier écrit sur des cahiers par Mohamed Fellous lors de son emprisonnement : « Soliloque carcéral » (Co-Ed. Attannoukhi et Saad Warzazi, 2009, 248 pages). Un style touchant et intimiste où l'auteur qui n'a pas du tout la prétention de se considérer écrivain murmure ses impressions et ses réflexions à soi et à son journal. Cependant le résultat est, comme le signale à juste titre Bouissef Rekab dans la préface du livre, d'une teneur littéraire incontestable. Dans ce journal atypique, Mohamed Fellous justifie son entreprise par cette envie humaine de parler à quelqu'un, à soi-même peut-être, un désir d'exercer « sa liberté »… même en doutant de l'efficacité de l'acte d'écrire (comme beaucoup d'écrivains d'ailleurs !). Mohamed Fellous note de prime à bord : « […] c'est une autre dimension que ces mots auront un jour, ou peut-être n'auront-ils aucune valeur. Alors comme ça j'aurais fait un travail sans signification, gratuit… Ce n'est pas grave, je le fais quand même. » (p. 10). Il faut dire qu'il a bien fait de s'entêter car le résultat est remarquable.
A tous ceux qui ont écrit sous l'inquisition, respect et reconnaissance. Et avançons en toute liberté vers le large des hautes littératures.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.