Le programme de développement entrepreneuriat féminin dans les zones rurales et périurbaines a tenu ses promesses. Dix ans après le lancement de trois projets, les femmes ont acquis leur indépendance et exportent leurs produits. Prenez trois régions rurales du Maroc. Donnez à leurs femmes les moyens de travailler par le biais de coopératives. Saupoudrez de formations et d'aides financières. Laissez mijoter. Dix ans plus tard, soulevez le couvercle. Leur vie se trouvera irrémédiablement changée ! La recette est celle testée par le programme de développement de entrepreneuriat féminin dans les zones rurales, dont les résultats ont été présentés jeudi dernier par le ministère de l'Industrie, du Commerce et des Nouvelles technologies, accompagné de ses partenaires. L'ONUDI par son savoir-faire, et l'Agence espagnole de coopération internationale pour le développement (AECID), par son appui financier. Trois centres pilotes avaient été choisis au début du programme en 2001. Un projet de trituration d'olives à Ouezzane, de séchage de figues et de prunes près de Taounate, et de tissage de tapis traditionnels dans le village d'Aït Hamza près de Boulemane. « Avant, la femme rurale ne sortait qu'à de rares exceptions. Ce programme prouve qu'elle peut avoir un rôle à jouer dans la société, et réussir à trouver sa place sur le marché du travail », a lancé Ahmed Réda Chami, ministre du département à l'origine de l'initiative. Grâce à l'aide qui leur a été apportée (modules de formation, accompagnement dans la production et la commercialisation), ces femmes engagées dans le programme ont pu diversifier leur gamme de produits, et même les vendre sur les marchés internationaux. Des chiffres prometteurs Un sens du marketing qui les a menées à multiplier leur chiffre d'affaires. Ainsi, les 300 femmes du groupement d'intérêt économique (GIE) « femmes du Rif » de Ouezzane l'ont multiplié par quinze, passant de 58.300 DHh en 2003 à 2,15 millions DH en 2009. Les 70 femmes de la coopérative « sources de Bouad » ont quant à elles multiplié le leur par 10 en une seule année, entre 2005 et 2006. Des bénéfices qui ne sont pas dispersés à tort et à travers, comme le remarque Alberto Navarro, ambassadeur d'Espagne au Maroc. « Les femmes sont les meilleures pour s'occuper de l'argent. Elles savent le garder au sein de la famille ». Bien plus que des entrées d'argent, ces GIE ont amélioré la qualité de vie de ménages ruraux, leur injectant l'autonomie et la prise d'initiative dont elles manquaient dans le passé. Hanane Lachehab, présidente du groupement « femmes du Rif », compare la situation actuelle à celle d'avant. « Dans plusieurs douars, des femmes faisaient sortir leurs enfants de l'école pour qu'il puissent les aider. Maintenant que la coopérative est là, l'enfant reste à l'école, et la femme est bien encadrée dans son travail ». Au tour de Fès ! Les trois projets pilotes ayant été à la hauteur des espérances, le programme compte s'étendre à d'autres régions. Le ministère de l'Industrie, du Commerce et des nouvelles technologies a signé, jeudi dernier, un mémorandum portant sur le développement d'activités génératrices de revenus dans la région de Fès. Les autres signataires étant l'ONUDI et le réseau Espace civil de Fès. L'objectif sera à nouveau d'améliorer les capacités de gestion, de production et de marketing de groupement d'associations et de coopératives féminines dans cette région. Fatima Felfouli, présidente de la coopérative Atma de Aït Hamza, constate elle aussi un changement radical. « La femme ne savait pas vendre son produit, et acceptait n'importe quel prix. Aujourd'hui, nos tapis sont commandés d'Italie, et des Etats-Unis. Elles n'ont plus peur de personne, et savent maintenant négocier ». Mais il ne faut pas qu'elles s'arrêtent là. Le représentant de l'ONUDI conseille à ces femmes de « diversifier leurs produits, d'améliorer le design aux préférences du consommateur européen, tout ceci pour développer la distribution de leurs revenus tout au long de l'année ». Ahmed Réda Chami extrapole un peu plus. « Il faut intégrer les activités de ces femmes à l'économie à laquelle elles participent. Le Maroc ne peut pas se développer sans elles. Il faudrait même, pourquoi pas, les encourager à aller vers l'industrie ».