Le 21 juin n'est pas un jour comme les autres. Ce n'est pas juste le début de l'été , c'est le moment où les rues du Maroc s'illuminent de sons, de rires, de refrains partagés Tout commence en France, en 1982. Imaginée par Maurice Fleuret, alors directeur de la musique et de la danse, et portée par le ministre Jack Lang, cette initiative visait à démocratiser l'accès à la musique. L'idée ? Faire jouer la rue, ouvrir les micros, abolir les barrières entre scènes et trottoirs. Et puis... cette brillante idée traverse la Méditerranée . Le Maroc l'accueille à bras ouverts. Et il ne s'est plus jamais arrêté de chanter depuis.
Les premières notes, timides mais sincères C'est dans les années 1990 que les premières éditions marocaines ont vu le jour. À Casablanca, quelques cafés branchés du centre-ville ont osé installer des micros sur les trottoirs. À Rabat, des étudiants du conservatoire ont improvisé des mini-concerts dans les jardins publics. Il n'y avait pas encore de grandes scènes ni de projecteurs, mais il y avait l'enthousiasme brut, celui des débuts, des pionniers.
Une jeunesse en quête de scène Pour toute une génération, cette fête fut une révélation. Des groupes comme Mazagan, Hoba Hoba Spirit ou Fez City Clan ont profité de ces scènes ouvertes pour se faire entendre. Les souvenirs abondent : un concert improvisé sur la corniche de Tanger, un duo inattendu entre un joueur de oud et un DJ à Marrakech, ou encore ces enfants de Salé qui chantaient du Nass El Ghiwane avec des casseroles en guise de percussions.
Quand la fête devient institution Au fil des années, la Fête de la Musique a gagné en ampleur. Des associations comme Marock Jeune ou FIFAW ont structuré les événements, et les municipalités ont commencé à soutenir l'initiative. Mais certains nostalgiques se souviennent avec tendresse de l'époque où la fête appartenait à la rue, où l'on chantait sans badge ni programme, juste pour le plaisir de partager une mélodie au coucher du soleil.
Une effervescence musicale continue Aujourd'hui, la Fête de la Musique s'inscrit dans une galaxie plus large de festivals qui prolongent cette envie de partage et de découverte. À Rabat et Salé, Mawazine attire chaque année plusieurs millions de spectateurs, mêlant artistes internationaux et talents nationaux dans une programmation d'une rare diversité. À Essaouira, le Festival Gnaoua et Musiques du Monde célèbre un patrimoine spirituel en le confrontant aux sons du monde, du jazz au reggae. À Casablanca, L'Boulevard offre une scène brute et nécessaire aux musiques urbaines et aux voix en émergence. À Oujda, Agadir ou El Jadida, des festivals plus intimes réaffirment avec force que la musique peut être libre, engagée, surprenante.
Une promesse réinventée Le 21 juin, plus que jamais, n'est pas un jour comme les autres. Il est cette parenthèse enchantée où les murs s'effacent, où la scène est partout, et où chacun a le droit ,et le bonheur, de s'exprimer. Ecouter un oud dans une ruelle, découvrir un jeune rappeur sur une place, fredonner en chœur un air familier... La Fête de la Musique est tout cela à la fois : une tradition en mouvement, un patrimoine en devenir, et surtout, une invitation à tendre l'oreille et à ressentir.