ONU : Entretien entre Ahmed Attaf et Wang Yi sur le Sahara avant le vote    Lancement d'une nouvelle liaison aérienne entre Varsovie et Marrakech    Blocus de Cuba : A l'ONU, le Maroc fait un geste envers Trump    Madagascar. Un nouveau gouvernement en place    Botola D1: L'AS FAR victorieuse du Hassania    Derby casablancais : un choc sans éclat sur le terrain, le ''spectacle'' était ailleurs !    Mondial U17 féminin : Le Maroc s'incline face à la Corée du Nord    Desarrollo territorial: Marruecos inicia las consultas provinciales    Algeria and China discuss Western Sahara ahead of crucial UN Security Council vote    Mohamed Tozy nombrado Decano de Ciencias Sociales en la Universidad Internacional de Rabat    Peines alternatives : Déclaration de Maître Abdelkebir Moggar, ancien bâtonnier du barreau d'El Jadida    Alerte du CESE : Périlleuse équation pour notre recherche scientifique    Programme Tadarroj : Signature d'une convention à l'INAS Tanger    18 millions de touristes attendus au Maroc d'ici fin 2025    NEONOVIA : la nouvelle ère numérique made in Morocco    Campagne agricole 2025-2026: la production prévisionnelle des dattes s'élève à 160.000 tonnes    Transports : le total des investissements s'élève à près de 29 MMDH dans le budget de 2026    Maroc-Paraguay : Une volonté commune pour intensifier « un partenariat stratégique »    Un appel téléphonique entre Wang Yi et Marco Rubio ravive la chaleur des relations sino-américaines    Arabie Saoudite : Méga-projets et IA au menu du "Davos du désert"    Terres rares : accord Japon/Etats-Unis pour "sécuriser" les approvisionnements    Événements de la "Gen Z 212" : 49 jeunes condamnés à un total de 168 ans de détention    Le Maroc participe au programme arabe des jeunes dirigeants diplomatiques à Abou Dhabi    L'Union européenne met en avant la présidence marocaine du COPUOS dans le débat sur l'usage pacifique de l'espace    Le temps est écoulé... Le Conseil de sécurité vote demain une résolution adoptant l'autonomie comme solution définitive au différend du Sahara marocain    Nouvelle génération de programmes de développement territorial: Début des concertations la semaine prochaine    Le Maroc et le Paraguay ont réaffirmé, mercredi à Rabat, leur volonté commune de renforcer leur dialogue politique et d'approfondir leur coopération bilatérale dans un esprit d'amitié, de confiance et de concertation continue.    L'Algérie privée de l'inauguration du Stade Moulay El Hassan    Genesio : « Ayyoub Bouaddi a acquis une dimension supérieure »    L'IFAB prépare une réforme historique du VAR avant le Mondial 2026    Lazio : Reda Belahyane sur le départ ? Côme se positionne    Le Real Betis souhaite lever l'option d'achat de Sofyan Amrabat    Le Maroc et la Gambie signent un accord de coopération militaire    Les Etats-Unis proposeront une refonte du mandat de la Minurso centrée sur le plan d'autonomie, d'après le Centre égyptien Al-Ahram    Vidéo. Akhannouch: « l'investissement de Renault au Maroc va créer des milliers d'emplois »    La SRM Casablanca-Settat en ordre de bataille pour la saison pluviale    Industrie marocaine : Un chiffre d'affaires record de 898 MMDH en 2024    Espagne: 20 tonnes de hachich saisies grâce à la collaboration avec le Maroc    Véhicules volés en France: La DGSN signe un partenariat avec les assureurs français    Campagne nationale de sensibilisation : Jusqu'à 90% des AVC peuvent être évités    Festival des Andalousies Atlantiques : 20 ans de mémoire partagée !    La Rentrée Littéraire 2025–2026 : Trois jours d'échanges autour de la lecture et de la création littéraire    FCMT : 40 ans de passion et 30 ans de grandes marées    Rencontre. FCMT : Zakia Tahiri, le plan séquence d'une rebelle    Camus délocalisé : L'Algérie ferme sa porte à L'Etranger qui trouve refuge à Tanger    Cinéma : Le Festival de films émergents débarque à Lomé    50 ans de la Marche Verte : Dakhla sous l'objectif    Marrakech brille sur la scène internationale : l'Associated Press célèbre la ville rouge    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Essaouira, la mariée de l'Atlantique aux mille et une saveurs
Publié dans Maroc Diplomatique le 08 - 03 - 2021

Anciennement appelée «Amogdul» (la bien gardée) ou encore «Mugadur» – tout proche de «Mugadir» qui signifie en berbère «la remparée», ou «celle au rempart», d'où l'origine du nom de Mogador-, Essaouira (la bien dessinée) trône sur la côte atlantique, dans un bel écrin de nature. La «ville du vent» émerveille non seulement par sa beauté naturelle et brute à la fois, ses forêts, ses dunes, ses lacs, son océan et sa côte sauvage mais aussi par sa culture et ses arts bercés par un climat doux, toute l'année. Bâtie sur une presqu'île rocheuse, en face s'érigent les Iles de Mogador protégeant la baie et le sable fin de la splendide plage contre les vagues fortes de l'Atlantique et abritant les faucons d'Eléonore, les goélands et les mouettes qui animent le ciel bleu de cette magnifique réserve naturelle. Au loin, les adeptes du surf, windsurf et kitesurf ne se lassent pas de la qualité du vent qui embrasse les lieux au cachet si particulier. Du cœur du cocon fait de murailles qui cernent la cité d'Alizé tel un joyau, la ville, où le bleu et le blanc règnent en maîtres, invite à un voyage envoûtant, hors du temps et de l'espace, entre ses remparts séculaires, ouvrages d'art et de défense. Au détour de chacune des ruelles parsemées de maisons consulaires, le visiteur a rendez-vous avec l'Histoire, un élément du patrimoine ou encore une galerie vouée à l'œuvre d'artistes qui sortent de l'ordinaire.
Histoire d'une forteresse
Dans le but de s'ouvrir sur l'Europe et sur le monde afin de développer le commerce international, Mohammed Ben Abdellah alors califat de la vice-royauté de Marrakech, propose à une compagnie danoise de s'installer dans l'îlot de Mogador, en 1751. Et c'est en 1757 alors qu'il devient Sultan, après la mort de son père, qu'il fait de Marrakech sa capitale et décide de fonder Essaouira pour disposer d'un port accessible, à longueur d'année. La médina fortifiée, telle qu'elle existe aujourd'hui, est l'œuvre de Théodore Cornut, un spécialiste français qui avait été employé par Louis XV pour la construction des fortifications du Roussillon. Son inspiration est puisée dans la forteresse de Saint-Malo et fait réaliser son plan par des prisonniers français, pris lors de la défaite de Larache. La ville est alors organisée en damier et l'enceinte qui étreint la cité rappelle le style Vauban dont il était le disciple. D'ailleurs, le plan original du port et de la Kasbah est conservé à la bibliothèque nationale de France à Paris. Force est de rappeler que la médina d'Essaouira est donc la seule médina du Maroc construite sur plan. Aussi la fameuse Scala est-elle bâtie avec des fortifications installées dans la baie, en plus des batteries de canons à feux croisés, selon les normes de l'architecture militaire européenne de l'époque tout en respectant, toutefois, les principes de l'architecture et de l'urbanisme arabo-musulmans. Depuis, reliant le Maroc et l'Afrique subsaharienne à l'Europe et au reste du monde, elle a été le premier port incontestable de commerce international, des siècles durant. Et c'est d'ailleurs par Mogador, ou le port de Tombouctou, que le thé est introduit au Maroc au XVIIIe siècle. De facto, durant le règne du Sultan, Mogador prend son essor et connaît son âge de gloire en devenant la capitale diplomatique du pays, entre la fin du XVIIIe siècle et la première moitié du XIXe siècle. Et comme les belles choses ne durent pas, la ville commence à se détériorer, considérablement, entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe. En 1799, assaillie par une violente épidémie de peste qui emporte environ 4.500 personnes, la ville voit partir ses chrétiens. Par la suite, il y a eu le bombardement dont elle fait l'objet, en 1844, avant qu'elle ne se dégrade encore plus, sous le protectorat français.
Histoire juive de la ville
Pour établir des relations avec l'Europe, le Sultan se sert de la communauté juive qui fut baptisée «Toujjar assoultane» (marchands du Sultan). Ils rempliront alors le rôle d'intermédiaires entre lui et les puissances étrangères. Ainsi, pour alester la Kasbah devenue trop peuplée, le Sultan Slimane Ben Mohammed ordonne la construction du mellah, en 1807 afin d'y installer tous les Juifs de la ville dont le nombre dépassait, à l'époque, celui des musulmans. Malheureusement, Essaouira se verra quitter par ses juifs, vers les années 1940 et 1950 pour aller principalement en Israël mais aussi en France, au Canada et aux Etats-Unis, avant la guerre des Six jours, qui provoquera un départ massif, en 1967. Aujourd'hui, au mois de septembre, les juifs du monde entier viennent se recueillir sur la tombe du rabbin Chaim Pinto, enterré à Essaouira. Une occasion pour les descendants des anciens résidents qui viennent, imprégnés de nostalgie, fouler la terre des ancêtres et découvrir leurs origines. Pour l'anecdote, le général Vichy aurait demandé à Feu le Roi Mohammed V, pendant la seconde guerre mondiale, combien de juifs vivaient au Maroc, et la réponse du Monarque ne s'est pas fait attendre : «Je n'ai pas de juifs mais que des Marocains». Preuve s'il en faut, les deux cimetières juifs et leurs tombes qui s'ancrent dans la terre d'Essaouira pour témoigner de plusieurs générations juives dans la ville.
Source d'inspiration de nombreux artistes et grandes personnalités, depuis les temps immémoriaux tels Tayeb Seddiki, Haïm Zafrani, David Bensoussan, André Azoulay et bien d'autres, la cité aux murs crénelés où gît le corps d'Edmond Amran El Maleh, a su garder, au fil des siècles, toute son authenticité et son histoire. Son patrimoine riche et exquis a servi de décor à plusieurs séquences cinématographiques renommées notamment Othello qui a connu un franc succès en 1952.
Pour le film Kingdom of Heaven, le réalisateur en a fait la Jérusalem médiévale en 2004. Dans la série Game of Thrones, les remparts de la Kasbah ont servi de paysage pour les punis d'Astapor. Et ce n'est pas fortuit si en décembre 2001, l'UNESCO inscrit la médina au registre du Patrimoine mondial de l'Humanité. N'est-ce- ce pas la ville dont Paul Claudel avait dit qu'«Il n'y a qu'un seul château que je connais, où il fait bon vivre enfermé. Il faut plutôt mourir que d'en rendre les clefs. C'est Mogador, en Afrique» ?
Mogador, symbole de tolérance
Faut-il rappeler qu'Essaouira a longtemps été un symbole de tolérance, depuis sa création par le sultan Mohammed Ben Abdallah au XVIIIe siècle ? Amazighs, Arabes, Africains et Européens ont longtemps cohabité dans le respect et la richesse de la différence. Musulmans, Juifs et Chrétiens y travaillaient confortablement côte à côte. Ceci étant, la culture de la cité des Alizés est imprégnée d'un brassage riche d'anciennes traditions et de nombreuses influences qui font d'elle un creuset où verse une identité plurielle. Mémoire d'une Histoire dense, Essaouira étreint nombreux édifices religieux tels que des zaouias (à elle seule, elle compte une quinzaine) mais aussi l'église portugaise construite vers la fin du XVIIIe siècle par les négociants européens, la synagogue de Simon Attias, construite à la fin du XIXe siècle par un marchand juif dont elle porte le nom et l'église Notre Dame de l'Assomption, construite en 1936 par des prêtres espagnols.
Un métissage de musiques et de cultures
Ville d'art et d'histoire, Essaouira constituait un havre de paix et de ressourcement pour les hippies du monde entier, dans les années 1960. À tel point que Cat Steven, Jimmy Hendrix et d'autres stars de l'époque venaient se régénérer dans l'atmosphère magique de l'ancienne Mogador. Ces dernières décennies et chaque année, ce sont des milliers de mélomanes qui se ruent vers la ville, escale incontournable, pour découvrir les nombreux festivals, porteurs d'un message universel invitant au dialogue entre les cultures et faisant vibrer la cité aux rythmes tantôt de l'Orient tantôt de l'Occident. À Essaouira, les saisons se suivent et ne se ressemblent pas et les fluctuations particulièrement conviviales et chaleureuses non plus. Depuis 1998, le Festival des Musiques du Monde diffuse son ambiance magique et ravive la spiritualité ancestrale des Gnaoua dans les rues d'Essaouira faisant du mois de juin un rendez-vous dédié aux «Musiques du Monde». En automne, elle résonne aux assonances du Festival des Andalousies atlantiques, célébrant l'art et le patrimoine arabo-andalou et dévoilant un passé fort et riche de métissage ethnique, culturel et artistique propre à la cité. Travestie en une vaste scène de spectacles à ciel ouvert, Essaouira danse aux couleurs d'un métissage d'harmonies qui font éterniser l'âme de l'authenticité plurielle d'une valeur universelle exceptionnelle. Dès lors, la beauté de la ville jumelée avec La Rochelle et Saint-Malo (en France), Etterbeek (en Belgique), l'Île de Gorée (au Sénégal), et Changshu (en Chine), aurait le goût d'inachevé sans son art pictural, son artisanat qui porte l'empreinte des lieux et qui constitue la principale activité des Souiris, en plus de son huile d'argan qui ensorcelle les touristes.
En somme, à Essaouira, la ville aux remparts et fortifications portugaises et au patrimoine judéo-musulman, on se repose, on se ressource et on se cultive.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.