Lors de la 59e session du Conseil des droits de l'homme à Genève, le Forum Canarien Sahraoui a remis une lettre officielle au Haut-Commissaire Volker Türk pour dénoncer les violations « graves et systématiques » des droits fondamentaux dans les camps contrôlés par le Polisario à Tindouf. La plainte évoque des abus allant jusqu'à des exécutions extrajudiciaires, disparitions forcées et actes de torture. C'est dans un contexte de vigilance autour des droits humains que le Forum Canarien Sahraoui a choisi d'interpeller directement les Nations Unies. Selon Europa Press, l'organisation a déposé cette semaine une lettre officielle auprès du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, à l'occasion de la 59e session du Conseil des droits de l'homme, qui se tient du 16 juin au 11 juillet 2025 à Genève. Cette lettre accuse le Front Polisario de violations « graves et systématiques » des droits humains contre la population sahraouie vivant dans les camps de Tindouf, en territoire algérien. Conduite par son président Ignacio Ortiz Palacio, une délégation du Forum a mené une série d'entretiens à Genève visant à donner une visibilité internationale à une situation humanitaire qualifiée de « critique ». L'organisation a soumis un dossier détaillé au Haut-Commissaire Volker Türk, au Conseil des droits de l'homme, au Rapporteur spécial sur la torture ainsi qu'au Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires. Lire aussi : L'Algérie brade ses ressources naturelles aux Etats-Unis pour sauver le Polisario La plainte contient une typologie précise des abus : exécutions extrajudiciaires, actes de torture, disparitions forcées, pratiques d'esclavage moderne et discriminations raciales. Un tableau accablant pour le Polisario, longtemps présenté sur la scène internationale comme un acteur « progressiste » d'un conflit gelé. Le Forum avance des chiffres et des cas nominatifs. Depuis 2014, au moins 21 exécutions ou tentatives d'exécution extrajudiciaire auraient été recensées, majoritairement visant de jeunes Sahraouis impliqués dans des activités de survie ou de contrebande. L'affaire emblématique d'Ahmed Khalil, ancien conseiller aux droits humains du Polisario, enlevé en janvier 2009 à Alger, est également citée. Le Comité des droits de l'homme de l'ONU avait, dans sa décision du 27 mars 2020, pointé « l'absence de recours effectifs » devant les juridictions algériennes pour les réfugiés sahraouis. Au-delà des atteintes directes, le Forum dénonce également l'implication présumée du Polisario dans des réseaux terroristes opérant au Sahel. Le cas d'Adnan Abou Walid al-Sahraoui, ancien cadre du mouvement devenu chef du MUYAO avant de rallier Daech, est cité à titre d'exemple. Selon le Centre africain d'études et de recherches sur le terrorisme, plusieurs anciens combattants du Polisario auraient été identifiés dans les rangs d'AQMI et du MUYAO, alimentant les soupçons de porosité entre séparatisme armé et terrorisme régional. Le Forum revient également sur le détournement « systématique » de l'aide humanitaire dans les camps, un sujet récurrent depuis les révélations de l'Office européen de lutte antifraude (OLAF). Il rappelle que sur la seule période 1994-2004, l'Union européenne a versé plus de 105 millions d'euros d'aide, dont une part significative n'aurait jamais atteint les bénéficiaires désignés. Ces pratiques, note l'organisation, renforcent le besoin d'un mécanisme international de supervision et d'un recensement fiable des populations réellement présentes dans les camps. L'opacité actuelle empêche tout suivi rigoureux et alimente des soupçons sur une instrumentalisation de l'aide humanitaire à des fins politiques. Le Forum Canarien Sahraoui appelle à un accès immédiat et sans restriction des organisations internationales de défense des droits humains dans les camps de Tindouf, afin de mener des missions indépendantes de vérification. Il exige également un recensement transparent, sous supervision internationale, des populations sahraouies retenues dans les camps, ainsi que la mise en place d'un mécanisme d'audit régulier de la distribution de l'aide humanitaire. Ce plaidoyer vient alimenter un débat de plus en plus nourri au sein des instances internationales, alors que plusieurs organisations non gouvernementales, mais aussi des agences onusiennes, s'alarment d'un manque structurel de transparence et de liberté dans les camps de Tindouf.