Pour la première fois depuis 2021, le prix du gasoil au Maroc est repassé sous la barre symbolique des 10 dirhams le litre, marquant un tournant notable sur le marché national des carburants. Cette baisse, effective à partir de la fin décembre, intervient après plusieurs mois de fluctuations et met un terme, au moins temporairement, à une séquence prolongée de prix élevés qui pesait sur les ménages comme sur les secteurs productifs. Dans de nombreuses stations-service à travers le Royaume, le gasoil s'affiche désormais autour de 9,90 à 9,95 dirhams le litre, tandis que l'essence sans plomb enregistre également un léger repli, s'établissant aux alentours de 13 dirhams le litre. Si l'ampleur de la baisse reste modérée en valeur absolue, son impact psychologique et économique est loin d'être négligeable. Un reflux lié aux marchés internationaux Cette évolution trouve d'abord son origine dans la détente progressive des cours internationaux du pétrole et des produits raffinés, observée ces dernières semaines. Après une année marquée par de fortes incertitudes géopolitiques et des tensions sur l'offre, les marchés énergétiques ont bénéficié d'un rééquilibrage relatif, porté par une demande mondiale plus modérée et une meilleure visibilité sur les capacités de production. Comme à l'accoutumée depuis la libéralisation des prix des carburants, la répercussion sur le marché marocain s'opère avec un décalage temporel, intégrant les coûts d'importation, de raffinage, de transport et de distribution. La baisse actuelle reflète ainsi des contrats d'approvisionnement conclus à des niveaux plus favorables qu'au cours des mois précédents. Lire aussi : Carburants : plus de 25 milliards dirhams de recettes fiscales en 2024 Un seuil hautement symbolique pour l'économie nationale Le retour du gasoil sous les 10 dirhams revêt une portée particulière dans un pays où ce carburant constitue la colonne vertébrale du transport routier, de la logistique, de l'agriculture et d'une large part de l'activité industrielle. Depuis 2021, la flambée des prix avait alimenté des pressions inflationnistes persistantes, renchérissant les coûts de production et de distribution, avec des répercussions directes sur le pouvoir d'achat. Cette baisse offre donc un léger bol d'air aux professionnels du transport et aux opérateurs économiques, même si elle ne suffit pas, à elle seule, à compenser les hausses accumulées sur plusieurs années. Les organisations professionnelles rappellent d'ailleurs que les coûts énergétiques demeurent sensiblement plus élevés qu'avant la pandémie et la crise énergétique mondiale. Un marché toujours sous surveillance Si la tendance actuelle est accueillie favorablement par les consommateurs, elle ne dissipe pas pour autant les interrogations structurelles qui entourent le marché des carburants au Maroc. La question de la formation des prix, des marges de distribution et du degré de concurrence reste régulièrement au cœur du débat public, notamment lors des phases de hausse rapide. Les autorités, pour leur part, continuent de souligner que la libéralisation vise à garantir l'approvisionnement et à éviter les pénuries, tout en s'appuyant sur les mécanismes de contrôle existants. L'évolution des prix demeure toutefois étroitement dépendante des facteurs exogènes, au premier rang desquels les cours internationaux du brut, la parité du dirham et les tensions géopolitiques régionales. Une embellie fragile dans un contexte incertain La baisse observée en cette fin d'année pourrait se prolonger si les conditions actuelles sur les marchés mondiaux se maintiennent. Elle reste néanmoins fragile, exposée à tout retournement lié à l'offre pétrolière, aux décisions des pays producteurs ou à une reprise plus vigoureuse de la demande mondiale. En repassant sous le seuil des 10 dirhams, le gasoil offre un signal positif, sans pour autant marquer la fin d'un cycle. Pour les ménages comme pour les entreprises, cette évolution rappelle que le prix des carburants demeure un baromètre sensible de l'économie nationale, à la croisée des dynamiques internationales et des équilibres internes.