Oui, bien sûr, on peut être un grand écrivain et un lâche ou un salaud. Oui, bien sûr, l'indignité morale, le mensonge, n'ont jamais été et ne doivent pas être des arguments littéraires. Oui, bien sûr, Céline. Oui, bien sûr, Aragon. Oui, bien sûr, il n'y a que les morts, ou les ânes, pour n'avoir rien à cacher. Oui, bien sûr, les nains, les gnomes immondes, les réducteurs de têtes, les tarentules, prennent un trop malin plaisir à taper sur les géants et à profiter de la moindre faille pour les ramener à taille humaine. Dans l'affaire Grass, pourtant, dans le scandale créé par le stupéfiant aveu du prix Nobel de littérature racontant comment il s'est, à 17 ans, engagé dans la Waffen SS, ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Et, à tous ceux qui, y compris parmi mes amis, se lèvent, depuis quelques jours, pour prendre la défense du grand écrivain accablé par le « politiquement correct » ambiant, j'ai envie de dire qu'ils se trompent malheureusement de combat.