À Genève, la société civile internationale met en avant le modèle marocain de développement durable    UNITAS 2025: le Maroc participe au plus grand exercice naval aux USA    OpenAI renforce la protection des mineurs sur ChatGPT en demandant une pièce d'identité    Real Madrid : Trent Alexander-Arnold blessé et absent plusieurs semaines    Le temps qu'il fera ce jeudi 18 septembre 2025    Romain Saïss avec les Lions de l'Atlas : retour attendu ou risque pour l'équilibre ?    Hydrogène vert: adoption d'une série de mesures et validation de la clôture de la phase préliminaire du projet "Chbika 1"    Visite de Nasser Bourita en Chine : le pari du Maroc sur un partenariat stratégique élargi    ONCF : les trottinettes bannies des trains Al Boraq et Al Atlas    Global Innovation Index : Le Maroc consolide sa position de leader régional    L'IA pourrait stimuler le commerce mondial de près de 40% d'ici 2040    De Mistura à Alger : messages au régime algérien pour se préparer au choc    Le gouvernement attaché à la mise en œuvre optimale du chantier de généralisation de la protection sociale    Israël : La tentation spartiate de Netanyahou    Gaza: plus de 100 Palestiniens tués depuis l'aube dans des attaques de l'armée israélienne    UE : Bruxelles propose des sanctions contre des ministres israéliens    Lancement effectif du partenariat FIT destiné à remodeler les règles du commerce mondial, le Maroc parmi les pays fondateurs    La marocanité du Sahara débattue au Parlement portugais    Rétro-Verso : Toulal ou le conte de deux citadelles    Mondiaux de Tokyo / 1500 m : Isaac Nader, le neveu de l'ancien attaquant du Wydad Hassan Nader, en or « portugais » !    Botola D1 : Le 1er Clasico 25-26 s'achève sur un nul    Khadija Bendam nommée Présidente du Conseil International des Sociétés Nucléaires (INSC)    Maroc-Rwanda: signature d'un mémorandum d'entente pour renforcer la coopération en matière de gestion des établissements pénitentiaires    Des responsables du KFCRIS reçoivent à Riyad Abdelhaq Azouzi, président de l'Alliance des civilisations des Nations unies à l'Université euro-méditerranéenne de Fès    Météo : Averses orageuses localement fortes avec rafales de vent ce mercredi    Sommet arabo-islamique : Démonstration de force ou de faiblesse contre le bellicisme décomplexé d'Israël ?    Europe : Benfica ouvre la porte à un retour de José Mourinho    Réforme des retraites : vers un système équitable et durable    Nasser Bourita en visite officielle à Pékin du 19 au 20 septembre pour des entretiens de haut niveau avec les responsables chinois    LdC : PSG vs Atalanta, Bayern vs Chelsea ... Voici le programme de ce mercredi    Edito. Dans notre ADN…    Sofiane Boufal de nouveau freiné par un pépin physique    Été 2025, le plus chaud jamais enregistré en Espagne    Logistique dans la grande distribution au Maroc: l'analyse de Salaheddine Ait Ouakrim    Nouvelle Dacia Spring arrive au Maroc : Encore plus séduisante, toujours aussi électrisante    Zagora : Un enfant de 3 ans transféré d'urgence par avion médicalisé vers Rabat    Le temps qu'il fera ce mercredi 17 septembre 2025    Sáhara: Frente a De Mistura, Argelia se aferra al referéndum    Street art inside 2025 brings Moroccan artists to Rabat's HIBA_Lab    Princess Lalla Salma visits Hassan II University Hospital in Fez to support cancer patients    La DGSSI alerte sur des vulnérabilités critiques identifiées dans plusieurs produits Apple    Bibliothèque nationale du Royaume: Les travaux de rénovation confiés à Bora Construction    Le Prix Antiquity 2025 revient à la découverte de la première société néolithique au Maroc    Jazz à Rabat : un nouveau souffle pour un festival emblématique    Histoire : D'Al-Andalus à l'Andalousie, une évolution documentée jusqu'au XIXe siècle    Fouad Laroui : Tbourida, ailes et liens brisés    El Jadida célèbre la parution du roman "Mimosa" de Salah El Ouadie    Edito. Préserver l'authenticité, mais encore    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La déconstruction d'un mythe
Publié dans Albayane le 21 - 02 - 2020


Les confessions de M'Barek Bouderka dit «Abbas»
«Raconter un drame, c'est en oublier un autre»
Paul Ricœur
Rabat, mars 1973 : la capitale du Royaume est en ébullition après un automne mouvementé, grèves, manifestations estudiantines, arrestations.
Le 24 janvier interdiction de l'UNEM et une chape de plomb pèse sur la ville. Par cette nuit de mars encore hivernal, je rentre d'une séance de cinéma en rasant les murs : on n'est jamais sûr d'échapper à une rafle «sauvage».
D'autant plus que j'étais membre d'un parti interdit (le PLS). C'est l'année de la sortie marocaine du film italien, Nous sommes tous en liberté provisoire (Damiano Damiani, 1970). A la maison, mes compagnons sont déjà dans les bras de Morphée mais la radio (magnifique média de ces temps révolus) est encore allumée. J'attrape au passage un bulletin d'information laconique qui m'apprend qu'une bombe a été découverte dans les locaux du théâtre Mohammed V…Qui ? Quoi? Comment?
Casablanca, févier 2020 : je déambule dans les allées encombrées (c'est un samedi) du salon du livre ; j'ai déjà fait quelques provisions (Bourdieu, Guessous, Aourid, Mehdi Amil…) mais j'ai encore un titre en tête. C'est un livre qui vient à peine de sortir. Je me renseigne auprès d'un éditeur. Entendant le titre recherché, son assistant quitte pratiquement de son bureau et vient m'indiquer la direction.
Arrivé au pavillon indiqué, je regarde à gauche à droite ; un citoyen chargé de livres, pratiquement de ma génération, remarque mon hésitation et m'interpelle «tu cherches le livre de M'Barek Bouderka ? Il est en face». Je traverse l'allée, un jeune homme souriant m'accueille. Le livre se vent comme des petits pains. Il me tend un exemplaire. C'est le neveu de Bouderka. Spontanément on se met à parler en tachelhit : «ourili M'Barek ghid ? Ouhouy, iKanten sbah, iskr taouki3» (débrouillez vous pour la traduction)…
En effet, il s'agit du nouveau livre de mémoire de M'Barek Bouderka. Je dévore le livre en moins de 48 heures et j'apprends beaucoup de choses et entre autres que le poseur de bombe de ce fameux mars 1973, c'est lui. Ou plus précisément Abbas. Car Bouderka est digne d'un personnage sorti d'une fiction; il a longtemps vécu en double. Deux vies parallèles, à l'ombre des puissants de l'époque. Il y a eu M'Barek, du plein jour, jeune avocat amazigh promis à une belle carrière dans le barreau, inscrit dans un illustre cabinet, celui de Maître Abderrahim Bouabid… et il y a Abbas, celui de la nuit, le militant clandestin qui transporte les armes, prépare les caches et finit par poser des bombes.
Il y a M'Barek membre d'une cellule du parti de gauche, l'UNFP – tendance Rabat, qui organise les masses des quartiers populaires et il y a eu Abbas, partisan de la lutte armée, membre d'une organisation secrète, véritable sous-marin au sein du parti et qui coordonne avec son camarade et ami, Omar Dahkoune, révolutionnaire professionnel, rentré de l'exil malgré qu'il est recherché (c'est un rescapé du coup de force de Cheikh Alarabe); rentré au pays pour allumer la mèche de l'embrasement général, souhaité mais qui s'est révélé un mirage.
Le livre de Bouderka peut se lire en effet, comme la passé d'une illusion. Comme la chronique d'un échec annoncé. Dans ses confessions, une phrase terrible, mais qui dit bien la force de caractère de l'auteur, résume bien le bilan critique de cette tentative : «l'entreprise a échoué avant même de commencer». Un jugement né d'une approche lucide de ce qui relève bien du destin tragique d'un soulèvement armé bâclé et traversé de multiples lacunes.
Le livre est dans ce sens une œuvre fondatrice, passionnant humainement, tonique intellectuellement. Livre important par son auteur d'abord. M'Barek Bouderka a pris son temps pour livrer ses mémoires. Rentré aguerri de cette expérience qu'il a vécu pleinement, il s'est investi avec autant d'engouement dans la réussite de l'étape politique inauguré par le nouveau régime. C'est une figure majeure de l'équipe autour de feu Benzekri qui a permis au Maroc de réussir une expérience originale de la justice transitionnelle. Tous ceux qui l'ont côtoyés dans différents contextes, soulignent ses immenses qualités humaines qui remontent à son éducation, à ses origines Soussis : intégrité, loyauté, et engagement sans faille. Livre important par sa forme même.
Certes, il relève de ce tourisme en vogue, celui des voyages dans le passé, récits mémoriels, souvenirs, carnets de route commencent à fleurir dans notre paysage politique. Mais Bouderka et son co-auteur, l'historien Tayeb Beyad ont choisi de confronter discours de la mémoire et discours des archives. Des documents, souvent inédits viennent étayer, appuyer ou compléter un récit, un souvenir. La sagesse de Bouderka qui l'amène à se méfier des abus de mémoire, de ses dérives et de ses manipulations.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.