Le Maroc et l'ASEAN : Un partenariat multidimensionnel tourné vers l'avenir    Conseil national de la presse: Examen en commission du projet de loi à la 1ère Chambre    Akhannouch: L'extension de l'usine Stellantis confirme l'attractivité du Maroc pour les investissements    Cours des devises du jeudi 17 juillet 2025    GNL : le ministère de l'Energie répond aux acteurs du gaz sur l'AMI en cours    OPCVM : les actifs dépassent 768 MMDH    Africa Business+ : les cabinets marocains se distinguent    Automobile : Stellantis et le Maroc renforcent leur partenariat avec l'extension de l'usine de Kénitra    Le roi Mohammed VI adresse ses condoléances à la famille d'Ahmed Faras    Irak : un centre commercial ravagé par les flammes fait 61 morts    Alaska : séisme de magnitude 7,3 et alerte tsunami sur 1.100 km de côtes    Etats-Unis : le Sénat approuve des coupes budgétaires de 9 milliards de dollars réclamées par Trump    Sahara : Après le soutien de Zuma au Maroc, l'Algérie a envoyé des émissaires en Afrique du sud    Après sa réunion avec Bourita, Zuma visite l'usine Renault à Tanger    Décès d'Ahmed Faras: une icône du football marocain s'en est allée    Ahmed Faras, légende du ballon rond marocain, s'éteint à l'âge de 78 ans    Ghizlane Chebbak sélectionnée dans le onze type de la CAN féminine 2024    Le football marocain perd Ahmed Faras, figure emblématique des Lions de l'Atlas    Ahmed Faras, leyenda del fútbol marroquí, fallece a los 78 años    Les prévisions du jeudi 17 juillet 2025    Jacob Zuma visits Tangier's Renault plant to boost Morocco–South Africa cooperation    Moroccan football legend Ahmed Faras passes away at 78    Dans un télégramme émouvant, le roi Mohammed VI rend hommage à Ahmed Faras et souligne sa place symbolique dans l'histoire du football marocain    Al Barid Bank et Barid Cash lancent une solution innovante pour démocratiser les paiements électroniques    Sahara, presse, retraites, MRE... Le PPS salue, dénonce et alerte    Mondial 2026 : La FIFA prévoit de multiplier les pauses fraîcheur    Nottingham Forest cible Bilal El Khannouss    Al Hilal proche de prolonger Yassine Bounou jusqu'en 2027    Trop de liberté tue la liberté : Le cas Jerando    Droits des filles : les femmes du PJD accusées de banaliser le discours de Benkirane    Accidents de la circulation : 24 morts et 2.944 blessés en périmètre urbain durant la semaine dernière    "Vulgarité et médiocrité" : Le PJD s'en prend une nouvelle fois à El Grande Toto    Coopération aérienne maroco-française : Clôture d'un exercice conjoint illustrant l'harmonie opérationnelle entre les forces aériennes    Coopération sanitaire renouvelée entre le Maroc et la Chine : Rencontre de haut niveau entre le ministre marocain de la Santé et le maire de Shanghai    Politique monétaire : Un verdissement, sous conditions « strictes » ! [INTEGRAL]    La police marocaine interpelle à Casablanca un ressortissant français recherché pour blanchiment et trafic international    Du voisinage à l'alliance : le Maroc appelle à un partenariat euro-méditerranéen efficace fondé sur une vision commune    Interview avec Faraj Suleiman : « La musique doit laisser une empreinte »    La pièce marocaine "Jidar" en compétition au Festival international du théâtre libre à Amman    La chanteuse marocaine Jaylann ciblée par une vague de racisme après son hommage au Maroc    Le FC Nantes signe l'expérimenté attaquant marocain Youssef El Arabi    14 juillet à Fès : quand l'histoire et la culture tissent les liens franco-marocains    La relance du Comité de libération de Ceuta et Melilla arrive au Parlement espagnol    Plaidoyer international pour les Marocains expulsés d'Algérie : «50 ans et après : Non à l'oubli !»    Le président du CESE reçoit une délégation de l'organisation de libération de la Palestine    Consécration : Abdelhak Najib honoré à Kigali pour la paix et le dialogue des cultures    L'UNESCO inscrit les tombeaux impériaux de Xixia au patrimoine mondial... La Chine poursuit la valorisation de son héritage civilisationnel    Festival des Plages 2025 : Maroc Telecom donne le coup d'envoi    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Gilles Kepel : Passée l'euphorie de la révolution, les prises de positions sont beaucoup plus tempérées
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 15 - 05 - 2013

ALM : Dans «Passion arabe», vous évoquez les grands enjeux que représente la prise de pouvoir par les partis islamistes. Qu'en est-il des défis auxquels ces islamistes devraient faire face?
Gilles Kepel : Au Maroc, le parti islamiste, le PJD, est au gouvernement mais il a été coopté. D'une certaine manière il est confronté aujourd'hui à des problèmes qui ne sont pas sans rappeler ceux existant en Egypte ou en Tunisie où les islamistes au pouvoir doivent faire face à la réalité du gouvernement et sont pris entre les enjeux du réalisme politique et leur propre idéologie.
Justement, ne devrait-on pas craindre que cette situation nous mène à un scénario à la tunisienne où les islamistes accaparent le pouvoir avec force?
C'est un peu tout l'enjeu de la politique. Les partis islamistes quand ils sont dans une structure de pouvoir, leurs forces devraient être contrôlées par l'intérieur. C'est ce que fait un peu l'AKP, parti au pouvoir en Turquie, sur lequel le PJD a copié son nom d'ailleurs. De toutes les coalitions gouvernementales en Turquie depuis 1970, ce parti n'a jamais eu de pouvoirs réels mais qui, au fur et à mesure, a placé ses hommes partout. Ce parti est bien évidemment au pouvoir aujourd'hui, mais il est dans l'obligation de composer avec les autres forces de société qui ne sont pas nécessairement dans sa même lignée d'idées. Toute la dialectique politique est là. Est-ce que le PJD s'effacera en présence d'autres puissances ou réussira-t-il réellement à pénétrer le pouvoir? Il s'agit ici d'un jeu normal de la politique et c'est un peu ce qui s'est passé avec l'USFP à la fin du règne de Feu Hassan II.
Ne pensez-vous pas que ces partis en question (les partis islamistes, ndlr), ont d'abord instrumentalisé la cause sociale et la représentativité religieuse pour accéder au pouvoir pour ensuite décevoir?
On ne peut plus parler de partis islamistes de manière unifiée. L'un des effets de la révolution arabe est justement la division de plus en plus profonde de ces partis. Autrefois leur devise était «l'Islam c'est la solution». Aujourd'hui, est-ce que c'est l'Islam des salafistes qui est la solution, celui d'Al Adl wal Ihsan ou encore celui des frères musulmans? Les visions de chaque entité sont différentes. A l'intérieur de cette même mouvance islamiste, les divisions sont fortes non seulement entre djihadistes et électoralistes mais également entre les jeunes et les vieux, etc. En Egypte à titre d'exemple, les salafistes qui ne voulaient pas au départ entrer dans le jeu politique l'ont fait à partir de juillet 2011 probablement sur inspiration saoudienne qui ne voulait pas laisser aux frères musulmans alliés au Qatar l'hégémonie sur le champ politique. Donc, les salafistes ont pris partie au jeu pour disputer aux frères musulmans le contrôle. Ce qu'il faut savoir également c'est que ces salafistes eux-mêmes vivent une non-homogénéité flagrante, ils s'excommunient et se font le «takfir» mutuellement..
La région du Maghreb connaît-elle ces mêmes jeux?
Oui. On le voit par exemple en Tunisie où, comme les réformes sociales ne se font pas, ce sont les salafistes qui en bénéficient en une certaine manière. Toutefois, ils sont eux-mêmes divisés entre djihadistes comme «Ansar al Charia» et d'autres que Rached Ghannouchi, chef du parti islamiste Ennahda, au pouvoir en Tunisie, voudrait pousser à participer dans des partis politiques institutionnels comme il a été le cas en Egypte. Je pense qu'il y a ce même genre de débat ici au Maroc où l'on assiste à l'émergence de personnes tel Mohamed Fizazi dont la libération de prison a coïncidé avec l'arrivée du PJD au pouvoir. Ce personnage est, le moins qu'on puisse dire, un salafiste très ambigu, c'est un salafiste de plateaux télévisés qu'on mettait sur Al-Jazeera pour gagner des batailles contre les courants laïcs.
Que faut-il faire pour rééquilibrer le paysage politique marocain?
C'est l'enjeu de l'évolution de la mouvance islamiste. Est-ce que ce sont les forces qui poussent à sa démocratisation où au contraire c'est la logique d'idéologies des appareils qui va l'emporter. J'ai appris qu'un récent sondage a révélé que 83% des Marocains seraient pour l'application de la Charia. Tout dépend de ce que veut dire «application de la Charia». On peut être pour l'application de la Charia et voter pour l'USFP par exemple si l'on trouve que ce sont eux qui répondent aux attentes des électeurs musulmans en matière de justice ou autres.
Ceci étant, un phénomène comme celui de la séparation de la religion et de la politique n'est pas intériorisé...
Aujourd'hui, l'élément le plus important pour un pays comme le Maroc, du point de vue politique, c'est de savoir ce que vont donner les islamistes soumis à l'épreuve du pouvoir. Il me semble que c'est beaucoup plus compliqué aujourd'hui pour Al Adl Wal Ihsan d'être audible quand on a le PJD au pouvoir.
Bien qu'ils soient plus audibles, certains trouvent qu'ils ont déçu. Quelle lecture en faites-vous?
C'est le propre de tous les pouvoirs. François Hollande n'est pas islamiste, il a fait beaucoup de promesses et son lectorat s'interroge. Dans quelle mesure la cohérence et la pureté idéologique d'un parti soumis aux contingences du pouvoir lui permettent de rester tel qu'il était en son essence? C'est là que tout se joue. L'expérience marocaine est particulière en ce sens, elle s'inscrit dans un mouvement réformiste. C'est intéressant pour les Marocains d'observer ce qui se passe dans les autres pays arabes. En 2011, beaucoup de gens se disaient heureux de voir la révolution prendre du terrain, aujourd'hui en 2013, ces prises de positions sont beaucoup plus tempérées.
Aucune révolution ne se passe de manière indolore...
C'est pour cela que j'ai appelé mon dernier livre «Passion arabe». Passion a beaucoup de sens, ce terme fait référence également à la douleur (passion christique, ndlr). En France, beaucoup sont fiers de la révolution française, deux siècles après. Si l'on vivait dans la terreur, ce serait différent. Les révolutions sont les plus dévoreuses de leurs enfants, ceux qui entrent dans le processus révolutionnaire sont rarement ceux qui en sortent. C'est tout comme vous dites chez vous, «on ne sort pas du Hammam comme on y est entré» (Rires).


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.