Le plus grand flop en matière d'emploi, en 2002, est, sans doute, la grande arnaque de la célèbre ANAPEC (Agence nationale de la promotion de l'emploi et des compétences). Au début, il y avait cette annonce de recrutement pour le compte d'une société émiratie de 22.000 candidats appelés à travailler sur des bateaux de croisière. L'afflux des jeunes marocains croyant en une bouée de sauvetage divine fut massif. Ils étaient près de 80 000 à avoir tenté d'avoir une chance si minime qu'elle soit pour chasser le spectre du chômage. L'annonce en fanfare de cette opportunité, les déclarations extravagantes des différents responsables à propos de la crédibilité de cette opération, n'ont fait qu'enfoncer le clou de l'amertume chez des milliers de jeunes qui gardaient encore un peu de confiance dans nos responsables. Le recrutement de grande envergure, qui allait sauver quelque 30 000 chômeurs de la précarité, s'est avéré être une simple chimère. Amertume et frustration furent la récolte des centaines de jeunes. Au-delà de la désignation et même de la sanction des gens qui ont couvert à dessein cette arnaque, et au-delà des commissions qui tentent de dédommager tant bien que mal les malheureuses victimes d'un flagrant abus de confiance, il est clair que cette affaire restera une tache noire qui éclabousse les anales de la promotion de l'emploi dans sa globalité. Et ce, sans compter les énormes difficultés qui attendent les dites commissions pour remédier au choc des jeunes chômeurs et non chômeurs qui avaient cru en la véracité de cette affaire. Insister sur la gravité de ce grand flop est imputé à la nature du problème. Nous ne sommes pas devant des diplômés chômeurs dont les manifestations à la capitale font partie du quotidien, et à l'encontre desquels les gouvernants se plaisent à rappeler qu'il est impossible d'intégrer tout le monde dans la fonction publique, que ces diplômés devraient suivre des formations adéquates au marché de l'emploi etc. Il s'agit de la perte de toute confiance et de l'effet de frustration dont font l'objet des milliers de jeunes. Personne ne s'est demandé comment vivent les victimes de l'ANAPEC depuis la désillusion. Et dire que, chaque fois que l'occasion se présente, nos éminents politiciens reprochent aux jeunes leur éloignement et leur désintéressement de l'activité politique. Ce n'est pas en arnaquant une jeunesse désenchantée qu'on peut l'attirer vers les urnes. Le taux de participation lors des dernières législatives en dit long sur la perception de la responsabilité chez les jeunes marocains.