On reproche à Rachida Dati un goût prononcé pour le luxe. Non franchement, Strasbourg et son Parlement européen où l'attend un poste de député, c'est largement suffisant. Faudrait-il conjuguer Rachida Dati au passé simple ? On ne peut jurer de rien, toujours est-il que l'icône est tombée. Bientôt, elle ne sera plus garde des Sceaux ni ministre du tout. La mariée était trop belle ? Peut-être. Ce qui est certain c'est qu'elle incarnait trop la diversité. Franco-maroco-algérienne. Ça fait beaucoup. Il ne manquerait plus qu'à trouver un père tunisien à sa fillette Zohra pour que le monde se mette à l'envers, le Maghreb qui occupe la France en donnant à l'Hexagone une gardienne des Sceaux qui relie la République à son passé monarchiste, c'est-à-dire à sa grandeur. Ne le dites pas aux Français, car ils n'aiment pas ça, mais la France et ses châteaux et tout ce que Paris compte de grand et de racé exhalent un parfum de sang bleu. L'Arc de Triomphe, c'est Napoléon Bonaparte fait empereur, le Louvre est un des plus beaux musées du monde, mais c'est le Roi-Soleil qui lui donne son éclat historique. Même l'Assemblée nationale, chef-lieu de la démocratie républicaine, est un Palais Bourbon. Alors, une plébéienne sans particule au nom à consonance curieuse à l'Hôtel de Bourvallais au cœur de la Place Vendôme… ! Avec ça, on reproche à Rachida Dati un goût prononcé pour le luxe. Non franchement, Strasbourg et son Parlement européen où l'attend un poste de député, c'est largement suffisant. La France est ainsi. Un Noir à la Maison-Blanche c'est bien, mais pour les Américains. Non, mais il faut le dire, Rachida Dati ne les a pas beaucoup aidés. Maroco-algérienne, c'est déjà pas beaucoup. Ostentatoire et crâneuse, c'est un peu trop. La diversité, oui, mais discrètement. Sur la pointe des pieds. La justice et sa toge, la roturière et ses tailleurs, non, décidément non, c'est dépareillé. Ségolène Royal, du temps où elle était ministre, sous Bérégovoy ou Jospin, avait sacrifié son congé de maternité pour reprendre le travail. Tout le monde avait trouvé cela plutôt bien. Rachida Dati en a fait de même, pratiquement toutes les associations féministes lui sont tombées dessus : elle mettrait en péril les droits acquis de la femme. Rachida Dati, Ségolène Royal quelle différence ? L'une a peut-être encore un destin, l'autre a un nom prédestiné. Vous trouvez que j'y vais un peu fort de café ? Lisez dans le dernier Nouvel Observateur les dates marquantes de sa vie : «1997 : entrée sur dossier à l'Ecole nationale de la magistrature.» Sur dossier ! Ça veut dire quoi sur dossier ? Que Rachida Dati y est entrée par la petite porte, qu'elle n'a passé aucun concours d'admissibilité. Une garde des Sceaux quasi «autodidacte», les dieux seraient-ils tombés sur la tête ? Un lot de consolation pour la sulfureuse aventurière. Deux auteurs lui consacrent un livre au titre évocateur, « Belle amie », piqué au Bel ami de Maupassant. Certes, il s'agit de l'histoire d'une arriviste dans un jeu d'une sournoiserie très parisienne où se croisent ambition et séduction, mais Rachida, un livre, sur toi, pour toi toute seule, la roturière, c'est un couronnement.