Quand il arrive à des professionnels de tomber dans le piège des conspirationnistes dans des affaires sensibles, le complotisme devient dangereux. Décidément, il n'y a pas de limite au complotisme. Cette tendance à voir, systématiquement, dans tout événement politique ou économique la main cachée de conspirateurs agissant dans l'ombre et manipulant les faits et les acteurs à leur insu, est en train de prendre des dimensions préoccupantes dans notre société. Très développée aux Etats-Unis, la théorie de la conspiration compte le plus grand nombre d'adeptes dans ce pays. Ils se sont multipliés depuis l'assassinat du président Kennedy en 1963. Une affaire qui continue, quarante ans plus tard, à susciter l'imagination des conspirationnistes. Ces derniers, pour résumer, peuvent tout accepter et tout valider sauf la version officielle. C'est dans leur nature. Mais, cela ne signifie pas que l'opinion publique américaine leur accorde une quelconque importance. Ils s'activent juste dans la presse sensationnaliste qui leur fait du tapage le temps de faire monter les ventes de leurs livres. Au Maroc, le phénomène est nouveau. Il s'est développé ces dernières années. Dans un pays en transition, il est normal que l'on assiste à un déphasage entre le rythme du détenteur de l'information et celui du relais de l'information. Le premier, dans un réflexe naturel, fait de la résistance et refuse l'ouverture et le deuxième, avide d'information, veut toujours aller plus rapidement et plus loin. Ce qui fait que, parfois, il peut tomber plus facilement dans le piège des conspirationnistes. C'est ce qui est arrivé à un confrère arabophone dans l'affaire du communiqué sur l'état de santé de SM le Roi. Il a été piégé par un journaliste connu pour être l'un des plus grands spécialistes du bidonnage de théories complotistes. Et c'est quand il arrive à des professionnels de tomber dans le piège des conspirationnistes et dans des affaires aussi sensibles que le complotisme devient dangereux. Mais, parfois, il peut juste être ridicule et revêtir la forme d'une blague. C'est le cas d'un article publié jeudi par un quotidien partisan qui affirme que «des sources informées indiquent que l'infiltration de la tuta absoluta à la tomate marocaine est un acte prémédité» et que c'est l'Espagne qui est derrière cette opération. Il y a quelques mois, un organe islamiste, lui, attribuait l'arrivée de cette maladie au Maroc aux «services sionistes». De quoi donner le tournis sauf si on a la patience d'attendre, la levée, dans quarante ans, du secret-défense sur le dossier de la tomate marocaine par le CNI et le Mossad. Ridicule !