L'affaire de l'enregistrement audio de Nasser Zefzafi qui a « fuité » de la prison locale de Ras El Ma à Fès, et où il fait état de « viol et violence lors de son arrestation » à Al Hoceima en juin 2017, en a fait réagir plus d'un. Dans un premier temps, et en réaction à ce « manquement professionnel grave», la Délégation générale à l'administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR) a indiqué via un communiqué avoir procédé au limogeage du directeur et de certains fonctionnaires de l'établissement en question, outre l'ouverture d'une enquête au sujet de la fuite de l'audio de Nasser Zefzafi. La DGAPR a également fait savoir que « des décisions disciplinaires ont été prises à l'encontre d'un groupe de détenus dans le cadre des événements d'Al Hoceima qui se sont rebellés et ont refusé de se soumettre aux ordres ». Ces derniers, poursuit la DGAPR dans sa mise au point, ont été transférés à divers établissements pénitentiaires, placés dans des cachots et privés des visites familiales et des appels téléphoniques pour une période de 45 jours, comme le stipule la loi. Le ministère public a également réagi au contenu de l'audio fuité, attribué à Nasser Zefzafi, condamné à 20 ans de réclusion suite aux événements d'Al Hoceima, et assure être disposé à rouvrir le dossier du détenu en cas de présentation de preuves tangibles et de nouvelles données. Autre son de cloche chez les familles des détenus Toutefois, les familles des détenus du Hirak, ainsi que les associations qui les soutiennent ne l'entendent pas de la même oreille. Pour elles, la DGAPR a spolié les droits des détenus, usé de toutes les formes de vengeance et de sanctions, en les privant de leur droit d'entrer en contact avec les leurs, ne serait ce que par téléphone. Ainsi, l'Alliance démocratique pour la libération des détenus politiques et la fin de l'embargo sur le Rif, a appelé à un sit-in le 8 novembre prochain devant le siège de la DGAPR à Rabat pour « l'inciter à arrêter toutes les formes de répression exercée sur les détenus du Hirak du Rif ainsi que leurs familles ». L'alliance, formée de 33 organisations politiques, syndicales, féminines et de défense des droits de l'Homme, dont l'association marocaine des droits humains (AMDH), souligne également que « l'Etat marocain se doit de respecter ses engagements internationaux en matière de droits et des libertés et réserver aux détenus du Hirak un traitement respectueux de leurs droits en tant que prisonniers politiques». Photos Mounir Mehimdate « Cette action (sit-in) vient en réponse à l'appel des familles des détenus du Hirak du Rif, puisqu' il n'y a aucune information mais que des rumeurs. Toute communication entre les détenus et leurs familles est coupée. Donc on ne dispose pas de beaucoup d'informations les concernant» , explique à Hespress FR, Aziz Rhali, président de l'AMDH. L'Alliance, poursuit notre interlocuteur, a décidé d'organiser ce sit-in dans le but de s'enquérir de la situation de ces détenus à la prison de Ras El Ma de Fès. « On parle de torture et de beaucoup d'autres choses. La moindre des choses, et qu'il y ait une commission parlementaire qui peut aller visiter ses prisonniers et s'informer sur leur situation. La sanction des détenus est de 45 jours, sauf qu'il y a des informations qui ont fuité qui disent qu'il y a eu torture. Donc on a besoin d'avoir plus d'informations, abstraction faite de ce que dit la DGAPR», insiste le président de l'AMDH. Et d'ajouter : « normalement, dans chaque tribunal, il y a un juge qui suit un petit peu la situation des prisonniers. On a besoin que ce juge-là qui rende visite à ses détenus politiques et nous fournit des informations qui pourraient soulager la peine des familles ». Le président de l'AMDH a également accusé la DGAPR de mentir et ce, « depuis longtemps ». « On prend le cas de Rabii Lablak qui était en grève de faim. La DGAPR disait qu'il vivait normalement à la prison et qu'il n'y avait aucun problème. Ce n'est qu'après la visite de l'AMDH au détenu qu'elle a commencé à rectifier le tir », conclut notre interlocuteur. La DGAPR réagit En réponse au communiqué de l'Alliance, la DGAPR a souligné dans la soirée du mardi 5 novembre, qu'elle a déjà informé l'opinion publique, via deux communiqués, des mesures disciplinaires susmentionnées, des infractions commises par les détenus concernés et démenti tout traitement hors la loi à l'encontre de ces détenus. La DGAPR a également indiqué que les deux associations en soutien aux détenus du Hirak du Rif ainsi que le père de Nasser Zefzafi, tentent à travers ses informations et allégations « mensongères » d'induire en erreur l'opinion publique et « d'exploiter les conditions des familles des autres détenus afin d'aboutir à leurs fins et de servir des agendas qui vont à l'encontre des intérêts supérieurs de la patrie ».