Au Maroc, la commande publique représente 20% du PIB et plus de 40.000 appels d'offres par an. Dans un récent rapport intitulé « Verdir l'économie marocaine en dématérialisant les marchés publics« , la Banque mondiale (BM) révèle comment les réformes entreprises par le Maroc pour dématérialiser les procédures de commande publique pourraient réduire les émissions de CO2 de 84%. Un chiffre considérable! Le rapport de la Banque mondiale explique en préambule que jusqu'à récemment, tous les soumissionnaires devaient effectuer des démarches en personne à chaque étape de la procédure. Ils devaient se rendre au bureau local des marchés publics pour rassembler les documents d'appel d'offres, obtenir une garantie bancaire, soumettre une offre, assister à l'ouverture des plis, soumettre d'autres documents après notification de l'attribution du marché et signer le contrat. Ainsi, la Banque mondiale révèle que toutes ces démarches entreprises par les soumissionnaires pour répondre aux appels d'offres de l'État nécessitaient un grand nombre de déplacements, soit un total de 12 trajets routiers d'environ 60 km chacun, ce qui correspond à 720 km par soumissionnaire. Cela entraînait d'importantes émissions de carbone, ainsi qu'une perte de temps et d'argent, ce qui était particulièrement dissuasif pour les PME. L'institution souligne que l'objectif d'attribuer 30 % des appels d'offres publics aux PME, tel qu'énoncé dans la loi marocaine, semblait difficile à atteindre. Pour y parvenir, l'un des leviers possibles pour les États est l'adoption d'une procédure numérisée qui facilite la participation des PME, estime l'institution. Dans ce sens, la Banque mondiale a décidé de soutenir les réformes entreprises par le Maroc dans le cadre de son Programme d'appui budgétaire en faveur de l'inclusion financière numérique. Ces réformes ont permis aux entreprises de participer en ligne en effectuant toutes leurs démarches à distance, affirme la Banque mondiale. Elle note que le Royaume a entamé ce processus de numérisation avec le lancement en 2007 d'un portail offrant l'accès à un système d'appels d'offres, de soumissions et d'enchères inversées électroniques. Cependant, la Banque mondiale indique que cette transition s'est heurtée à la méfiance des entreprises et à un manque de maîtrise des procédures numériques. « Au sein de la Trésorerie générale du Royaume, le passage aux soumissions électroniques a nécessité un vaste programme de gestion du changement et de renforcement des capacités pour promouvoir l'adoption de cette avancée technologique auprès des entreprises. De plus, sans recourir aux soumissions électroniques, il n'existait aucune statistique permettant d'établir que les PME bénéficiaient effectivement des marchés publics », relève le rapport. Et d'ajouter qu' »entre 2020 et 2022, les autorités marocaines ont pris trois mesures importantes« , exigeant en ce sens que « toutes les entités adjudicatrices publiques publient le nombre et la valeur des contrats attribués aux PME, que tous les soumissionnaires passent par le portail des marchés publics, et que les garanties bancaires soient numérisées« . Une fois la machine en marche, la Banque mondiale a considéré cette « dématérialisation » comme une avancée environnementale au Maroc, notant que les émissions de carbone ont considérablement diminué, malgré l'augmentation de la consommation d'énergie liée au traitement et au stockage des données. En détail, le rapport explique qu'avec les 40 000 appels d'offres annuels et une moyenne de quatre soumissionnaires par appel d'offres, la réforme lancée par le Maroc a réduit le nombre de trajets routiers effectués par les soumissionnaires de 22 à 2 par appel d'offres, seul le déplacement en personne du soumissionnaire retenu étant nécessaire pour la signature du contrat. À la fin de la réforme, la distance parcourue par l'ensemble des soumissionnaires en une année pourrait passer de 86.000 à seulement 6.000 km, soit une réduction des émissions de CO2 de 84%, souligne la Banque mondiale. En conclusion, le rapport estime qu'il est nécessaire de prendre des mesures supplémentaires pour passer de la dématérialisation à la véritable « verdissement » des marchés publics. Cela implique non seulement que l'administration publique réduise son empreinte carbone à travers ses processus d'achat, mais également dans le choix des achats eux-mêmes. Le Maroc s'y emploie avec le soutien de la Banque mondiale, selon le rapport. Celui-ci révèle qu'une charte verte pour les marchés publics est en cours d'adoption, avec l'introduction de critères écologiques au sein de la plateforme des appels d'offres en ligne. Cela permettra aux entités publiques d'acheter des biens conformes à certaines normes environnementales.