a appris de sources bien informées qu'une équipe de l'Inspection générale des finances (IGF) a engagé de nouvelles opérations d'audit au sein des services de paiement d'institutions et d'entreprises publiques. Cette décision intervient après la réception d'informations faisant état d'irrégularités dans le règlement des créances liées à des marchés publics et dans la liquidation de factures. Selon ces mêmes sources, des soupçons d'« extorsion » ont accéléré l'envoi de demandes d'explications à plusieurs responsables et fonctionnaires. Les éléments recueillis par les inspecteurs pointent en particulier des dysfonctionnements dans la gestion des paiements au profit de petites et très petites entreprises, les plongeant dans de graves crises financières, parfois jusqu'à la faillite. Une partie de ces informations provient de plaintes et de réclamations dont des copies ont été transmises aux ministères de l'Économie et des Finances, de l'Intérieur, ainsi qu'à la Commission nationale des marchés publics. Ces plaintes font état de demandes de commissions exigées auprès d'entrepreneurs pour chaque facture réglée, sous peine de retards délibérés. Pour justifier ces blocages, des vices de forme ou irrégularités juridiques étaient invoqués, empêchant ainsi le décaissement des montants dus. Toujours selon les sources de Hespress, les inspecteurs ont demandé aux responsables des services de paiement de deux établissements publics réalisant des chiffres d'affaires de plusieurs milliards de dirhams de leur fournir des documents relatifs aux entreprises créancières. Objectif : vérifier les allégations de « chantage » et de retard abusif dans le règlement de factures pourtant conformes aux procédures. Les missions d'audit se sont également penchées sur des rapports de contrôle interne réalisés par les services de vérification de ces deux institutions. Ces rapports ont mis en évidence un manque de rigueur dans l'évaluation des procédures de paiement et dans le règlement des dettes liées à des marchés d'équipements et de services datant de trois années. Les mêmes sources révèlent que les enquêteurs disposent aussi de données supplémentaires, tout aussi préoccupantes, concernant des soupçons d'enrichissement illicite de fonctionnaires rattachés aux services de paiement. Ces derniers auraient accumulé des biens immobiliers, mobiliers et projets commerciaux sans rapport avec leurs revenus. Parmi les cas évoqués figure celui d'une responsable du service de comptabilité et de facturation d'un établissement public basé à Casablanca, dont le salaire ne dépasse pas 8.000 dirhams, mais qui a pu acquérir deux immeubles de quatre étages à Nouaceur, ainsi qu'un local commercial destiné au lavage automobile. Un autre cadre, chargé du service de paiement dans une grande institution publique, aurait, lui, acquis trois appartements et une voiture de luxe. Cet homme est décrit par des entrepreneurs comme un véritable « cauchemar », redouté pour sa capacité à retarder volontairement le règlement de leurs créances. Une étude antérieure de la société « Inforisk » avait déjà souligné l'impact dramatique des retards de paiement liés aux marchés publics, en les identifiant comme l'une des principales causes de faillite des entreprises. Selon cette étude, 40 % des cessations définitives d'activité sont dues à ces retards, qui empêchent les entreprises de maintenir leurs opérations, d'autant plus que les banques se montrent particulièrement réticentes à octroyer des crédits pour renforcer leur trésorerie. Cette situation touche directement les secteurs du commerce, de l'immobilier, du bâtiment et travaux publics, du transport et de l'industrie. Les investigations en cours concernant des fonctionnaires suspectés d'« extorsion » révèlent également, selon les sources de Hespress, qu'ils recouraient à des intermédiaires pour approcher les entrepreneurs en difficulté face au recouvrement de leurs factures. Ces intermédiaires leur proposaient d'intervenir afin d'accélérer les procédures et d'assurer le règlement des créances, moyennant des commissions proportionnelles aux montants dus. Plusieurs entrepreneurs, craignant d'être exclus des futurs marchés publics, ont fini par céder et payer afin de récupérer leurs fonds, plutôt que d'entamer des procédures judiciaires longues et incertaines.