Dans un contexte emprunt d'incertitude et une compétition accrue entre les différents pays, le Maroc serait-il tenté de dévaluer sa monnaie ? Dans le contexte actuel, chaque pays tente de tirer son épingle du jeu afin de maintenir son économie tant bien que mal. Naviguant souvent à vue sans grande visibilité du lendemain, les différents pays mettent en place des mesures. Avec un état des réformes plus ou moins avancées, les différents pays essayent de maintenir la tête hors de l'eau. Il en est de même pour le Royaume. La semaine dernière le gouvernement marocain, par les mesures qu'il a prises, vise notamment à améliorer la compétitivité de ses entreprises face aux concurrents. Alors que certains pays étrangers tels que la Chine ont dévalué leur monnaie, le Maroc pourrait-il envisager cette solution ? Ce vieux débat peut revenir. Afin de dévaluer la monnaie et de prévoir ses effets, le gouvernement doit faire des études et des modélisations pour étudier les conséquences d'une telle mesure. Certes, la dévaluation du dirham aurait pour effet d'accroître l'attrait des produits marocains à l'export face à ses concurrents voisins. Sur les mêmes secteurs, le Maroc gagnerait en compétitivité dans la mesure où sa monnaie serait alors avantagée au niveau du taux de change. Cette dévaluation aurait donc pour but d'augmenter les volumes de ventes. A contrario, les importations seraient limitées car leurs prix deviendraient par effet inverse, plus chers. Un coup d'épée dans l'eau Seulement, il ne faut pas oublier que le pays est très dépendant de ses importations en matières premières. Il est vrai que le prix des matières premières est actuellement à la baisse (notamment le pétrole), mais cette baisse ne sera pas forcément récupérable. Une hausse du coût des importations aurait des incidences négatives sur la compétitivité. Ainsi, seules les entreprises qui misent sur leur main d'œuvre et qui n'ont pas d'entrants pourraient profiter de cette dévaluation. Les entreprises marocaines devront alors répercuter cette hausse sur leurs propres prix et donc absorber cette augmentation avec toutes les conséquences négatives, que cela pourrait avoir. Une sorte de mal pour un bien. En dehors des matières premières et des secteurs industriels, ce sont aussi tous les nombreux produits importés qui observeraient une flambée des prix. Les conditions de vie au Maroc deviendraient alors plus difficiles et les bas salaires risqueraient de ne plus pouvoir accéder aux produits venant de l'étranger. De même, une dévaluation de la monnaie est souvent responsable de son corolaire, l'inflation. Une montée générale des prix aurait des conséquences catastrophiques pour le pouvoir d'achat. Dans son dernier rapport, Bank Al Maghreb prévoit une baisse du taux d'inflation pour les premiers trimestres de 2009. De 3,5% il devrait passer à 2,7% en fin d'année. Un effet inverse aurait des conséquences graves sur la stabilité des prix dans un contexte de baisse d'activité. «Que ce soit technique ou structurel, la dévaluation ne peut être une politique » selon Driss Ben Ali. Toujours selon l'économiste, « elle ne peut avoir de répercussions positives sur l'économie que si la productivité est assez élevée». Or, au Maroc, elle n'est pas des plus élevée. La Banque mondiale, dans son dernier rapport sur l'industrie de trente pays émergents, classe d'ailleurs le Maroc en bas de tableau, à la 21ème place. La principale cause avancée de ce manque de dynamisme est la productivité du pays. Cette mesure aurait alors l'effet d'un coup d'épée dans l'eau. Elle pourrait même se retourner contre son objectif premier, à savoir rendre les produits nationaux plus attractifs à l'export. Dans un même niveau, la dévaluation pourrait entraîner une guerre de concurrence avec les pays voisins. Les secteurs concurrents verraient d'un mauvais œil leur voisin tenter d'abaisser les prix et seraient tentés de procéder eux aussi, à une dévaluation. On observerait donc un tassement par le bas généralisé. ■