La diplomatie marocaine nomme vingt-deux nouveaux consuls généraux dans un large redéploiement stratégique    Les pays sahéliens saluent le rôle central du Maroc dans la renaissance de l'Afrique et sa valorisation de la coopération Sud-Sud    Mohamed Abdennabaoui élu président de l'Ahjucaf lors de l'assemblée de Rabat    L'Office national des aéroports réorganise ses pôles en prévision de l'horizon 2030    Industrie : la production atteint un taux d'utilisation de 78 % en mai, selon BAM    Xlinks retire sa demande d'examen du projet Maroc–Royaume-Uni et annonce une réorientation du dispositif    CAN 2024 féminine : La CAF double la prime du vainqueur et augmente les récompenses    Moroccan by-elections see government majority parties dominate    Elecciones parciales: El PAM, RNI e Istiqlal ganan el 64% de los escaños    Rencontre entre le Directeur général de l'ICESCO et l'Ambassadeur de Chine au Maroc pour discuter des préparatifs de la participation à la réunion ministérielle sur le dialogue des civilisations à Pékin    Challenge N°976 : Du 4 au 10 juillet 2025    Jouahri : Les banques participatives ne représentent que 2 % des actifs du secteur bancaire marocain    «Aéroports 2030» : l'ONDA réorganise ses trois pôles majeurs    Sahara marocain : Le Guatemala considère l'initiative d'autonomie comme "l'unique base sérieuse, crédible et réaliste pour la résolution du différend" régional    Football féminin : Une terre, un rêve, un sacre.. Le Maroc joue sa CAN    Réorganisation du Conseil national de la presse : Ce qu'il faut retenir du texte adopté par le gouvernement    MAE : nomination de 22 nouveaux Consuls Généraux    Assises de l'IA : Un premier pas, des attentes immenses    Les secteurs porteurs en Côte d'Ivoire : quelles opportunités pour une entreprise marocaine ?    Fouzi Lekjaa intronise Achraf Hakimi en Leader des Lions de l'Atlas    Coopération Maroc-Espagne-France : 15 tonnes de cannabis saisies    La Renaissance de Ziyech passera-t-elle par Florence ?    Spain : Sumar pressures PSOE over coalition pact, avoids Western Sahara dispute    Elections partielles : Le PAM, RNI et Istiqlal remportent 64% des sièges    Solidarité à Khénifra : le ministère de la Santé prend en charge le traitement de Firdaws Bousarfan    ISIDERM et ISDIN s'unissent pour promouvoir l'éducation sur la protection solaire au Maroc    Algérie : L'historien Amine Belghit condamné à 5 ans de prison    Casablanca : 4 personnalités décorées chevalières de l'Ordre des arts et des lettres par la France    Un homme interrompt le trafic du tramway à Casablanca en s'allongeant nu sur la voie    Six personnes interpellées à Fès après une rixe nocturne à l'arme blanche    Essaouira accueille la 2ème étape du Championnat du Maroc de Kitesurf Strapless    L'historien algérien Mohamed Lamine Belghit condamné à cinq ans de prison au terme d'un procès expéditif pour «atteinte à l'unité nationale»    Biens culturels. La Côte d'Ivoire et la Suisse s'accordent    Tanger : Le caftan marocain brille lors de la Luxury Network Morocco    Rabat : L'OPM organise une semaine de concerts gratuits pour célébrer la musique classique    L'ADN d'un Egyptien de l'Ancien Empire révèle des origines marocaines et mésopotamiennes    Le ministère de la culture soutient 379 projets d'édition et du livre pour plus de onze millions de dirhams en 2025    L'Atalanta et l'OM se disputent les faveurs de Nayef Aguerd    Le Maroc à l'épreuve d'un risque climatique devenu structurel    Real Madrid : En manque de temps de jeu, Brahim Diaz inquiète    Chicago : 4 morts et 14 blessés dans une fusillade de masse    Inwi lance la campagne #Lbess_touni pour soutenir les Lionnes de l'Atlas    Algérie : Le FMI alerte sur l'urgence d'un ajustement économique    Le président de la Fédération kabyle de football écrit : Quand une interview devient un chef d'accusation de terrorisme en Algérie    L'attaquant portugais Diogo Jota et son frère meurent dans un accident de la route en Espagne    Energie propre : L'UE investit 3,66 milliards d'euros pour aider les Etats membres à faible revenu    La ville marocaine de Chefchaouen renaît en Chine : une réplique fidèle de la ville bleue au cœur de Harbin    La finale de la Coupe du monde des clubs pourrait se jouer à 9h du matin    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La place du désordre
Publié dans La Gazette du Maroc le 24 - 06 - 2002


Nouveaux partis politiques
L'étude des partis politiques ne peut se limiter à une analyse de ces organisations considérées isolément, disait Michels. En effet, un système politique n'est pas caractérisé seulement par la nature des partis politiques qui existe en son sein, mais également par le nombre des partis qui influe sur le fonctionnement des institutions d'une manière directe. Vue sous cet angle, la floraison des partis politiques, à l'heure actuelle, mérite plus qu'une réflexion.
Au Maroc, l'observateur ne manquera pas de relever le foisonnement des partis politiques qui suit une courbe ascendante. En effet, depuis octobre 2001 plus de dix partis ont pu voir le jour, bénéficiant ainsi d'une ouverture contextuelle du système politique sur ses acteurs centraux dont les partis constituent la trame de fond. On touche ici la question fondamentale, passionnante et difficile de l'explication d'un tel phénomène qui retient l'attention des observateurs surtout à l'approche des échéances électorales de septembre 2002.
C'est une illusion, en effet, de penser que l'ordre normatif, parce qu'il est censé s'imposer d'une manière inconditionnée, façonne la réalité politique et sociale sans que celle-ci lui oppose une quelconque résistance.
En pratique, c'est souvent le contexte politique qui détermine les transformations du système de partis. Autrement dit, c'est la conjoncture politique, à l'image des contraintes des nouvelles réformes politiques, qui doit être prise en considération dans l'étude, par exemple, du foisonnement des partis politiques.
C'est pourquoi, il serait vain de penser que l'augmentation du nombre des partis politiques au Maroc est due à une volonté politique explicite du pouvoir central visant la libéralisation du champ politique. Par contre, il s'agit plutôt d'une stratégie politique de la monarchie, qui s'inscrit dans le cadre d'un mode de management politique, dont l'objectif central est la restructuration du système politique (1).
En effet, l'autorisation pour créer de nouveaux partis politiques à l'heure actuelle n'est point une coïncidence, vu l'immobilisme politique actuel qui frappe le pays. Donc, il était tout à fait normal que la monarchie, en tant qu'acteur principal dans le système politique, intervienne pour remodeler la structuration de l'échiquier politique. Ce, pour deux raisons principales : la première est tactique à la veille des échéances électorales de septembre 2002. Alors que la deuxième est stratégique dans la mesure où elle est inhérente au processus de transition démocratique.
Restructuration du champ politique
Jamais le champ politique n'a été aussi fragmenté qu'il l‘est actuellement, du fait de la montée spectaculaire du nombre des partis politiques ( dix en moins d'un an). Une chose est au moins sûre : ce n'est forcément pas dû à l'effet du hasard. En effet, cette nouvelle donne politique s'inscrit dans une tactique politique programmée (2) par le pouvoir central visant, pour l'essentiel, le remodelage de la carte partisane à la veille des échéances électorales.
À cette fin, la monarchie a rompu avec la politique sécuritaire qui veillait, autant que faire se peut, à réduire le nombre des partis politiques.
Ce faisant, le pouvoir central va pouvoir d'abord tester la fiabilité du système politique, notamment sa capacité à résister à l'éclatement partisan par l'entrée en jeu de nouveaux partis. D'ailleurs, il serait intéressant de voir la réaction des partis politiques en place face à un tel changement de situation pour le moins désagréable. C'est dur pour des partis politiques qui avaient pris l'habitude de ratisser large, surtout lors des campagnes électorales, de voir leur électorat perturbé par de nouveaux protagonistes.
Ensuite, contrôler toutes les stratégies d'alliances politiques entre les partis dominants tels que l'USFP ou le RNI et, par là même, anticiper les rapprochements politiques non désirés à l'image d'une coalition entre l'Istiqlal et les islamistes modérés du PJD.
Et enfin, renforcer le rôle de la monarchie, comme le véritable meneur de jeu, en procédant à un rééquilibrage politique (3) capable d'amenuiser les partis politiques traditionnels. Car, le foisonnement des partis va générer une compétition politique susceptible de sanctionner les grands partis politiques qui risquent de voir leurs clientèles électorales largement réduites.
Réanimation proportionnée du système politique
En donnant son feu vert à la création de nouveaux partis politiques, la monarchie entend mettre en œuvre une stratégie politique qui a pour objectif principal la réanimation du processus de transition démocratique. En effet, après un mandat gouvernemental en demi-teinte, l'éclatement de la carte partisane peut être considéré comme une bouée de sauvetage destinée à sauver l'expérience de l' “ alternance”. Ce, à deux niveaux : d'une part, le foisonnement des partis va constituer le maillon fort du mode d'entretien du consensus politique par l'introduction dosée de nouvelles forces politiques. Et d'autre part, l'émergence de nouveaux partis va certainement activer la vie politique (4) et apaiser les tensions sociales qui se jouent dans les entrailles des communautés démunies.
Ce faisant, la monarchie assurera le contrôle de deux enjeux politiques majeurs : d'un côté, rééquilibrer le jeu politique entre le Roi et les partis politiques traditionnels en vue de maintenir la stabilité politique du pays. L'ouverture contrôlée de la sphère partisane sur de nouvelles forces politiques en est une parfaite illustration. Et de l'autre côté, contenir le dénigrement de la population défavorisée face à une situation socioéconomique des plus déplaisantes. Ceci, tout en renforçant le processus de transition démocratique en phase d'usure politique, du fait de la consommation immodérée du concept dans les discours politiques.
Mécanismes d'accompagnement
Un des préceptes de base de la science politique est que les politiciens et les partis font des choix d'institutions, comme des systèmes électoraux, qui les favorisent. Vue sous cet angle, la réforme électorale dissimule, vraisemblablement, une manœuvre politique implicite servant de mesure d'accompagnement à la restructuration du champ politique.
En effet, l'objectif non déclaré de l'adoption “ consensuelle ” d'un nouveau code électoral, qui a mis en place un système de représentation proportionnelle par scrutin de liste (RPSL), est double : d'une part, la réforme électorale, par l'adoption d'un système RPSL, a pour objectif d'assurer la représentativité d'un plus grand nombre de partis politiques. Par conséquent, les partis traditionnels seront obligés de batailler dur pour former un gouvernement à l'instar de celui en place, vu la balkanisation probable de la carte partisane qui résultera de l'éparpillement des voix électorales après les prochaines échéances. Du coup, on assistera, probablement, après les élections de septembre, à un scénario pareil à celui auquel nous assistons actuellement, c'est-à-dire, un gouvernement de coalition hétérogène.
Néanmoins, les partis de l'ex-opposition, au cas où ils gagnent, pourront se féliciter de pouvoir passer de l'“ alternance octroyée ” à une “ alternance des urnes ”, et de sceller, par là même, un débat politique si controversé sur la légitimité de l'expérience. Et d'autre part, l'adoption d'un système RPSL s'inscrit dans le cadre d'une stratégie politique de la monarchie qui pointe la résorption politique des leaders contestataires, représentant les différentes tendances et minorités culturelles non institutionnalisées (religieuses, ethniques, culturelles et politiques).
En somme, le multipartisme, loin de refléter le pluralisme politique qui constitue l'élément propulseur du processus de transition démocratique, peut être considéré comme un mode d'entretien des équilibres entre les différents acteurs du système politique. Ainsi, au Maroc, peu importe si les nouveaux partis politiques sont en mesure d'exprimer de nouvelles orientations politiques du moment qu'ils sont d'accord pour se présenter comme une valeur numérique qui vient consolider la thèse démodée associant le nombre des partis aux avancées du pays en matière de démocratie !
Certes, le processus de transition vers un
système démocratique suppose la floraison des partis politiques dans le cadre d'une logique incontournable de désagrégation / agrégation politique, c'est-à-dire que la sphère partisane se divise en période de transition et une fois les élections achevées les partis politiques se regroupent. Toutefois, il serait intéressant de se demander si cette situation ne serait pas due, en partie, à la recrudescence d'un système politique tribal, qui couvait depuis la nuit des temps au Maroc, et dont la segmentarité politique ne serait qu'une simple manifestation (5) ?
L'ouverture contrôlée par la monarchie de la sphère partisane sur de nouvelles forces politiques vise deux objectifs principaux : 1 – la restructuration du champ politique à la veille des élections. 2 - la réanimation de l'expérience de l'alternance consensuelle.
(1) R.Leveau 1969
(2) R.Aron 1978
(3) Lipson 1975
(4) Gaxie 1979
(5) R.Montagne 1969


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.